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Reviewed by:
  • Conservatism in Canada ed. by James Farney and David Rayside
  • Hubert Villeneuve
Farney, James et David Rayside (dir.) – Conservatism in Canada, Toronto et Londres, University of Toronto Press, 2013, 379 p.

Depuis l’élection du premier gouvernement de Stephen Harper en 2006, on note un intérêt accru pour le conservatisme canadien, longtemps négligé par la recherche académique. De fort pertinents ouvrages sont ainsi apparus ces dernières années, qu’il s’agisse de synthèses (The Right Balance : Canada’s Conservative Tradition, de Hugh Segal, ou Le conservatisme au Québec. Retour sur une tradition oubliée, de Frédéric Boily), de monographies historiques (Keeping Canada British : The Ku Klux Klan in 1920s Saskatchewan, de James Pitsula), ou de travaux sur la droite canadienne contemporaine. C’est à cette dernière catégorie qu’appartient Conservatism in Canada, ouvrage collectif dirigé par deux politologues ayant euxmêmes auparavant contribué à ce nouvel essor : David Rayside (Faith, Politics, and Sexual Diversity in Canada and the United States) et James Farney (Social Conservatives and Party Politics in Canada and the United States). Quoique compréhensible, le choix de diviser l’ouvrage en deux sections, l’une sur le Parti Conservateur du Canada (PCC) et l’autre sur les conservatismes provinciaux, n’est pas sans causer certaines redondances, tout en rendant plutôt lacunaire la seconde section, qui aurait aisément pu faire l’objet d’un ouvrage séparé, notamment en raison du cas fort particulier du Québec. [End Page 807]

Bien que les 22 collaborateurs participant à cet ouvrage soient politologues, l’approche est relativement pluridisciplinaire et accessible à toute personne de niveau universitaire. Seules trois études sont ici de nature essentiellement quantitatives, incluant l’article introductif de Christopher Cochrane qui, se basant sur les données d’un sondage international, voit l’opinion publique canadienne évoluer selon les tendances du monde industrialisé : bien que les Canadiens soient devenus plus progressistes au cours des dernières décennies (rejet des autorités traditionnelles, préoccupations croissantes pour les enjeux d’égalité, diversité et environnement, déclinantes pour les questions d’ordre social et moral), leurs comportements électoraux ne traduisent pas cette évolution. En effet, l’électorat est de plus en plus fragmenté et demeure divisible sur la base d’enjeux ciblés tels l’immigration, l’économie ou les politiques publiques. C’est sur cette configuration qu’a su jouer le PCC, tout en réussissant la difficile tâche d’assurer la cohésion de sa propre base, elle-même aux prises avec des clivages reproduisant les principaux courants historiques de la droite canadienne.

Ces derniers, écrit Steven Patten (p. 59), sont au nombre de quatre : le néolibéralisme (terme malheureusement employé tout au long de l’ouvrage sans qu’il soit réellement expliqué en quoi il différerait du libéralisme classique); un vieux « red toryism» soucieux de la stabilité de l’ordre social, associé à des personnalités telles Robert Stanfield ou Joe Clark; un traditionalisme moral d’inspiration essentiellement évangélique; et un populisme opposant les intérêts citoyens et ceux de certaines élites. Longtemps dominé par le red toryism, qui attribuait à l’État un rôle de protecteur et guide de la communauté, le conservatisme canadien fut, surtout durant les années Mulroney (1984-1993), investi par un néolibéralisme anti-étatiste et pro-marché, qui imposa de nouveaux paramètres en matière de gouvernance. Cette influence s’est aussi fait sentir sur la gauche canadienne au point où celle-ci a intégré, et paradoxalement mieux appliqué lorsqu’au pouvoir, les préceptes d’austérité budgétaire figurant au cœur du discours néolibéral (Frebdreis & Tatalovich, p. 132-133).

Parce qu’elle insiste sur les libertés individuelles, la « néolibéralisation » du conservatisme canadien s’est harmonisée avec la volonté pragmatique de Stephen Harper, exprimée dès 1991, de voir la droite abandonner le nationalisme identitaire et formuler sa propre vision conservatrice du multiculturalisme, élément déterminant dans les récents succès du PCC auprès de nombreux groupes ethnoculturels dans les grandes agglomérations urbaines...

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