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  • Les plaisirs et les jours; actes du colloque de 2011 à Trois-Rivières éd. by Claude Thérien et Suzanne Foisy
  • Claude Gagnon (bio)
Les plaisirs et les jours; actes du colloque de 2011 à Trois-Rivières, éd. Claude Thérien et Suzanne Foisy Québec: Presses de l’Université du Québec, 2013. 195pp. $22. ISBN 978-2-7605-3667-8.

Le colloque tenu à Trois-Rivières en 2011 réunissait des chercheurs qui ont traité de l’émergence d’un renouveau du concept de plaisir à partir du xviiie siècle et de son évolution dans les deux siècles qui suivirent. Aujourd’hui, les deux cofondateurs du laboratoire de recherche en esthétique de l’UQTR éditent un ensemble de textes choisis en prolongement de ce colloque.

La ligne d’horizon du concept moderne de plaisir est certainement la définition qu’ont donnée les utilitaristes d’une part et la critique de Kant d’autre part. Danielle Lories résume le dépeçage de l’hédonisme par le philosophe allemand quand il distingue l’agréable, le beau et le bien [le sublime]. Cette distinction proposée par Kant permet notamment de « distinguer le plaisir d’agrément du plaisir esthétique » (26); ainsi, « le plaisir du beau, seul plaisir proprement humain » et complètement désintéressé peut être facilement distingué « de la satisfaction animale de l’agrément » aussi bien que de « la satisfaction purement spirituelle et morale du bien » (27). La recherche du beau, contrairement à la recherche de l’agrément, est désintéressée dans sa finalité mais elle s’articule sur le monde phénoménal et non pas sur le monde des idées pures.

Les plaisirs sont-ils égaux ou équivalents? En compilant la démarche des philosophes utilitaristes et celle de Hume, Carole Talon-Hugon montre qu’il n’en est rien malgré les apparences. En effet, l’hédonisme aboutit logiquement au relativisme en matière de goût. Le philosophe utilitariste Jeremy Bentham, en mesurant quantitativement les plaisirs, en arrive à soutenir qu’ils sont essentiellement comparables et qu’un simple jeu avec des épingles peut équivaloir à la grande musique ou à la poésie. Mais ce jugement a rapidement engendré une réaction d’autres philosophes, que ce soit John Stuart Mill ou David Hume. Pour ces deux derniers, une comparaison essentiellement quantitative des plaisirs est raisonnablement intenable et l’argument de Mill aboutira à préférer « être un Socrate insatisfait qu’un idiot satisfait » (36).

Ces réflexions issues des philosophes du xviiie siècle devraient donc être garantes du statut du plaisir en général et en art particulièrement pour les siècles suivants mais deux siècles plus tard, il semble que tout cela soit à recommencer. C’est le sentiment que l’on éprouve quand on lit la contribution de Dominique Sirois-Rouleau sur l’art kitsch. Avec cette forme d’art, on retombe dans « le plaisir personnel » et le « relativisme esthétique » (119). La médiocrité, la cumulation, le grand nombre et le [End Page 323] confort reprennent la vedette. L’auteur voit très lucidement dans l’art kitsch une esthétique que rend possible la mentalité dite « postmoderne » (122). L’art kitsch aboutit donc à un « avilissement de l’esthétique » (127) puisque cet art de masse, basé exclusivement sur le goût subjectif personnel, « signe la fin de l’objectivité et des critères esthétiques » (129).

Les éditeurs du colloque ont regroupé un ensemble de contributions dans une section consacrée aux « plaisirs paradoxaux ». En tête de cette section, Daniel Dumouchel expose ce qu’ont écrit les philosophes du xviiie siècle de ces « passions douloureuses » (79–94); puis il interroge des ouvrages de fiction de l’époque sur la recherche du plaisir paradoxal. Ce type de plaisir entre dans la catégorie des « plaisirs tragiques » (83). L’exemple classique de Lucrèce du plaisir ressenti par un spectateur situé à une « distanciation sécuritaire » d’une scène tragique (90) est évoqué par l’auteur qui étudie l’émotion en cause dans pareille situation. L’élément psychologique retenu...

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