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Reviewed by:
  • Droit et régulations des activités économiques: perspectives sociologiques et institutionnalistes ed. by Christian Bessy, Thierry Delpeuch, Jérôme Pélisse
  • Michel Coutu
Christian Bessy , Thierry Delpeuch et Jérôme Pélisse , dir. Droit et régulations des activités économiques: perspectives sociologiques et institutionnalistes. Paris : L.G.D.J., Série Droit et Société, coll. Recherches et travaux , 2011 . 358 pp.

La parution de cet ouvrage traitant des rapports entre droit, économie et sociologie doit être vivement saluée: il s’agit en effet d’une publication importante, issue de dialogues croisés entre traditions disciplinaires, contextes culturels et paradigmes scientifiques distincts et parfois fort éloignés. Le travail réalisé par les directeurs de publication doit être tout particulièrement souligné: Christian Bessy, Thierry Delpeuch et Jérôme Pélisse ont non seulement rédigé les riches introduction et conclusion de l’ouvrage, ils signent à tour de rôle le texte précédant chacune de ses trois parties (consacrées respectivement aux concepts et théories, aux porteurs spécialisés de l’intermédiation entre le droit et l’économie, enfin aux dispositifs d’interaction ou de « couplage » entre ces deux sphères), tout en contribuant en outre à son contenu. Au surplus, chacun d’eux a participé à la traduction d’auteurs américains réputés en sociologie du droit, tels Lauren B. Edelman et Robin Stryker, dont l’apport représente sans conteste l’un des points forts de l’ouvrage.

Dans l’introduction consacrée aux rapports entre l’économie institutionnaliste et la sociologie du droit, Bessy, Delpeuch et Pélisse indiquent clairement vouloir porter un regard « endogène » sur les interactions entre le droit et l’économie. Cette perspective s’oppose en particulier à la vision du courant « law and economics » aux États-Unis, où l’influence du droit sur l’économie (abordée sous l’angle de la théorie néo-classique) est envisagée sur le mode de l’externalité: ce courant ne s’intéresse en effet qu’à l’efficience économique, comme norme d’évaluation des règles formelles du droit étatique. Contre cette perspective, les auteurs se revendiquent de l’apport de l’économie institutionnaliste américaine et de la socio-logie (économique) du droit. Les économistes institutionnalistes (avant tout John R. Commons) furent en effet très attentifs à « l’encastrement »—pour emprunter à M. Granovetter et avant lui, à Karl Polanyi—du droit et de l’économie; cette tradition, dans une certaine mesure, se voit reprise par le néo-institutionnalisme défendu par O. Williamson et D. C. North. L’attention portée à cette influence réciproque du droit et de l’économie fut également très présente chez les fonda-teurs de la sociologie, notamment chez Émile Durkheim, Werner Sombart et [End Page 423] Max Weber. La sociologie du droit centra en outre son intérêt, davantage que l’institutionnalisme à notre avis, sur le rôle des acteurs, notamment des porteurs spécialisés (ou « intermédiaires » comme l’écrivent les auteurs) de l’interaction entre le droit et l’économie. Trois concepts sont examinés par Bessy, Delpeuch et Pélisse: celui d’endogénéité du droit, d’internormativité, enfin de régulation. L’endogénéité vise, à titre heuristique, la capacité des acteurs économiques à définir ou à mobiliser de manière autonome les règles juridiques sous-tendant leur activité. L’internormativité (terme introduit à notre connaissance par Jean Carbonnier) concerne les rapports entre normes juridiques et normes sociales, formelles ou informelles, dans l’interaction droit/économie: la question du pluralisme juridique—nous y reviendrons—se voit ainsi soulevée. Enfin, la notion de régulation peut être abordée sur deux plans: sur le plan sociologique (comme l’entend J.-D. Reynaud), elle met l’accent sur le jeu des acteurs, ceux-ci modifiant sans cesse les règles juridiques, objets d’une constante reconstruction, dans la poursuite de leur activité économique. Sur le plan politique, toutefois, le concept de régulation, tout comme celui de « gouvernance », témoigne de la perte de centralité de l’État et du poids toujours accru des acteurs privés...

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