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552 LIVRES EN FRANC;:AIS lumiere crue, comme chez Jean-Guy Pilon; qu'elle soit evasion aux iles du reve avant d'accepter la mort deja familiere, comme chez Alain Grandbois; la poesie nouvelle est, plus qu'un art, un moyen de connaissanee , une aventure interieure, voice une mani~re d'etre, alors qu'elle etait encore chez Robert Choquette et chez Roger Brien, d'abord et avant tout un art litteraire, une maniere de faire. Quoi que l'on pense de l'une ou de l'autre attitude, il est certain que la poesie a atteint au Canada fran~ais, ces dernieres annres, a un niveau remarquable et qu'elle a commence II retenir l'attention de l'etranger. Les quelques poetes authentiques que nous avons nous consolent de compter encore parmi nous trop de versificateurs appliques ou d'adolescents en proie au verbiage esoterique. LE ROMAN Roger Duhamel Sans atteindre encore au chef-d'reuvre toujours esper6---le chefd 'reuvre, seule la posterite en decide---nos romans acquierent d'annee en annee plus de maturite. Us delaissent de plus en plus ces anecdotes pueriles dont nous eprouvions 11 juste titre depuis longtemps une lassitude legitime. Nos 6crivains ne redoutent pas d'aborder des problemes humains et de leur decouvrir des solutions adaptees aux conditions particulieres de notre milieu. S'ils ressentent parfois quelque gene facile II souligner, c'est que notre petit monde des lettres n'est pas encore tout II fait prepare a entendre des verites qui derangent son confort intellectuel paresseusement entretenu depuis quelques generations. Peu d'ecrivains canadiens, meme s'ils possOdent un talent aussi authentique que celui de Robert Elie, auront eu autantde chance que lui a leurs debuts. La Fin des songes n'etait encore qu'un manuscrit quand il obtenait Ie grand prix de la province. La critique fut ensuite 11 peu pres unanime a louer comme il se devait la valeur de ce roman serieux ou se livrait un drame grave au niveau des ames. D'un premier elan, Elie rejoignait Ie peloton de tete de nos romanciers. Sa piece, L'Etrang~re, confirmait quelque temps plus tard ce sentiment. Dans son second roman, Il sUffit d'un jour (Montreal, Edns Beauchemin , 230 pp., $2.50), on Mcouvre chez I'auteur une plus solide possession de ses moyens, avec des qualites et des defauts qui n'existaient pas precedemment. Pour recourir aux vieiIIes formules cIassiques, on doit reconnaitre que si I'unite d'action fait sensiblement detaut, en revanche les unites de temps et de lieu sont rigoureusement observees, lIl'inverse de ce que l'on observe generalement de nos jours. Les drames multiples LETTERS IN CANADA: 1957 553 qui se recoupent en un chasse-croise ou il est parfois difficile de se demeler se deroulent dans un meme village en l'espace de 24 heures. Cette analyse d'un microcosme possede une indiscutable efficacite. C'est Ie procede auquel s'est soumis Roger Martin du Gard dans Vieille France. Point n'est besoin ici de raconter ces diverses anecdotes, dont certaines atteignent ala hauteur de la tragedie. A vrai dire, ce ne sont pas tellement ces faits exterieurs qui nous retiennent que leur retentissement dans les ames des personnages, dont quelques-uns font la decouverte de leur propre moi, ala faveur de I'ebranlement subi. Je pense notamment a Charlie Lamont, retraite qui dispose de beaucoup de loisirs pour regarder vivre les autres; sans doute frustre jadis dans ses affections, il se veut au centre de toutes les vilenies dont il se repait avec une gourmandise assez sadique. Sa fin lamentable Ie rend tel qu'en lui-meme l'eteruite Ie change. Le romancier s'est applique anous rendre sensible la decouverte de la vie interieure chez Ie cure. D'un milieu intellectuellement modeste, il mettra un certain temps aprendre une vue exacte de sa haute mission, mais il y parviendra, grace sans doute aux plus desheritees de ses ouailles. n ne saura s'accommoder de la routine administrative du ministere paroissial, il lui faudra aller plus loin que les apparences. Dans I'ensemble, la mediocrite 'des etres l'emporte de beaucoup: une mediocrite passive, qui n'est jamais mechancete...

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