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Reviewed by:
  • Robertine Barry. La femme nouvelle by Sergine Desjardins, and: Robertine Barry. On l’appelait Monsieur by Sergine Desjardins
  • Valérie Lebrun (bio)
Sergine Desjardins, Robertine Barry. La femme nouvelle, Trois-Pistoles, Éditions Trois-Pistoles, 2010, 407 p.
Sergine Desjardins, Robertine Barry. On l’appelait Monsieur, Trois-Pistoles, Éditions Trois-Pistoles, 2011, 493 p.

« À travers la vie de Robertine, c’est la vie de ces femmes nouvelles mais aussi celles des écrivaines et des premières journalistes qui se déroulent sous nos yeux. » Cette phrase de l’avant-propos du premier des deux tomes biographiques qu’a publiés l’auteure Sergine Desjardins sous la direction littéraire de Victor Lévy-Beaulieu aux Éditions Trois-Pistoles résume à elle seule l’ampleur et la finesse des recherches nécessaires à l’élaboration d’une œuvre singulière ayant été récompensée très justement par le prix Jovette-Bernier en 2011. Comme l’écrit Sergine Desjardins : « [ … ] raconter la vie de Robertine, c’est faire la rencontre de plusieurs personnages historiques intéressants qui nous révèlent, chacun à sa façon, un aspect de la vie de cette femme mais aussi de notre histoire. » Ainsi, le travail de l’auteure n’est pas seulement marqué par un désir sincère de faire connaître la première femme journaliste du Canada français. Par ses descriptions minutieuses, ses références variées et ses légères digressions, l’œuvre de Sergine Desjardins se distingue par une plume teintée de respect et de passion pour l’histoire collective.

Bien que l’éditeur ait vanté une lecture qui rappelle celle d’un bon roman, la véritable force du travail mené par Desjardins sur la vie de Robertine Barry – nom véritable de celle qui signait Françoise dans la presse de l’époque – provient d’une solidarité féministe. En effet, Sergine Desjardins ne se contente pas de faire le récit chronologique de la vie de Barry. Sensible au climat hostile de l’époque pour les femmes, Desjardins ponctue sa narration d’anecdotes et de citations tirées des chroniques de Robertine Barry pour mettre en lumière les affiliations revendiquées et refusées par cette dernière. Si la femme nouvelle qu’incarnait Barry en ouvrant la voie du journalisme aux autres femmes disait qu’elle « admirait [celles] qui se servaient de leur plume pour aller à l’encontre des attitudes misogynes et transformer l’image de la femme dans toutes les couches de la société », on ne peut que souligner l’habileté avec laquelle Sergine Desjardins parvient à reconstruire le réseau d’influences de celle qu’on appelait Monsieur. De Madeleine de Repentigny à Séverine puis de Mary Graddon à George Sand, Jane Austen, les sœurs Brontë et Laure Conan, les références se multiplient comme un éventail sur la vie de Robertine Barry. [End Page 184] Or, ces références ne sont pas sans résonance avec les propos que tenait Barry sur le revers plutôt sombre de l’amour dans sa Chronique du Lundi. Déjà consciente de l’amour comme obstacle aux femmes, ou du moins comme enjeu à leur émancipation, Barry « mentionna [it] souvent combien une femme qui écrit, donne son opinion, parle d’autres choses que de colifichets, éloignait les hommes, leur faisait peur ».

Dans un contexte où le clergé s’acharne à exercer un pouvoir réprobateur sur la population canadienne-française, et encore plus durement sur les femmes, Robertine Barry attire l’attention, dès son premier article, en prenant position sur la laïcisation de l’éducation et sur la réforme de l’enseignement réservé aux filles. Sergine Desjardins parvient à rendre compte du double effet que provoquera la voix contest-ataire de Barry tout au long de sa vie en refusant de faire de la journaliste le porte-étendard d’une révolution à venir. Desjardins choisit plutôt de mettre l’accent sur les risques et la précarité qui menaçaient « la femme nouvelle » à chaque jour où elle décidait de ne pas se taire. À la lecture de cette biographie, on comprend rapidement que parler pour Robertine...

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