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Reviewed by:
  • The State and Rural Societies: Policy and Education in Europe, 1750-2000 éd. by Nadine Vivier
  • Laurent Brassart
Nadine Vivier (éd.) The State and Rural Societies: Policy and Education in Europe, 1750-2000 Turnhout, Brepols, 2008, 278 p.

Le processus d’étatisation des sociétés rurales européennes (encore que l’Europe orientale soit ici sous-représentée), accéléré depuis la seconde moitié du XVIIIe jusqu’au XXIe siècle, constitue l’objet de réflexion de cet ouvrage (treize études de cas et une introduction synthétique). Sa première originalité tient en son refus d’aborder la problématique de l’étatisation des sociétés rurales par les biais les plus connus de l’historiographie (la fiscalité, le service militaire, l’imposition de la norme judiciaire) [End Page 578] afin de privilégier au contraire celui de l’éducation dans une perspective comparatiste ; la seconde renvoie à une approche dans laquelle interfèrent constamment le politique, le social et l’économique.

L’intérêt de l’État pour la croissance agricole s’est affirmé dès la seconde moitié du XVIIIe siècle sous l’influence des projets caméralistes en Allemagne et physiocrates en France (Lars Behrisch). Si la rivalité commerciale entre les nations reste une puissante source de motivation des États, un nouveau point de fixation la concurrence et la complète à partir du XIXe siècle, particulièrement dans les pays méditerranéens, au point de devenir une priorité nationale sous les régimes autoritaires du franquisme et du salazarisme : l’auto-suffisance alimentaire (Ernesto Clar).

Au service de leurs politiques agricoles, les États combinent des interventions de nature variée. La plus connue est l’application des tarifs douaniers, soit pour protéger le marché intérieur de la concurrence, soit pour aider les producteurs à s’adapter à la nouvelle donne économique. Les effets des politiques douanières n’en restent pas moins inégaux selon les pays. Ainsi, pendant la Grande Dépression, le royaume de Belgique définit une politique agricole originale conjuguant application de droits de douane modestes d’une part et versement d’aides diverses aux agriculteurs de l’autre, afin de réorienter la production agricole nationale de la céréaliculture à l’élevage et de promouvoir l’avènement d’un système productif plus intensif (Leen Van Molle). Au contraire, dans l’entre-deux-guerres, le choix de l’Espagne et du Portugal d’adopter le modèle autarcique de l’Italie fasciste se fit au détriment de l’efficacité économique – et in fine de l’idéal de la modernité agricole.

Agir sur les structures foncières, en particulier sur les droits de propriété, fut un autre type d’intervention de l’État dans l’agriculture. La Révolution française, en s’attaquant aux droits seigneuriaux et aux usages collectifs, fut pionnière pour « libérer non seulement les hommes mais aussi la propriété foncière » (p. 98), entreprise qui, bien qu’incomplète (Noelle Plack), fut reprise plus tard dans d’autres pays européens. D’ailleurs, dans le duché de Brunswick, les réformes agraires s’accompagnèrent de la mise en place dès les années 1830-1840, sous l’égide de l’État, d’un réseau bancaire pour soutenir les nouvelles petites exploitations (Andreas Kulhawy).

Il ressort des différentes contributions que les États européens n’ont véritablement investi l’éducation des ruraux qu’à partir du milieu du XIXe siècle selon des modalités variées et à des degrés divers. La modernisation technique de l’agriculture était l’une des finalités majeures de cette intervention. Jusqu’alors, l’initiative relevait plutôt de particuliers, d’aristocrates comme le comte György Festetics, fondateur de la première école d’agronomie (Georgikon à Keszthely) en Hongrie en 1797, de savants comme Albrecht von Thaer en Prusse, Mathieu de Dombasle à Roville, près de Nancy, ou du marquis agronome toscan Cosimo Ridolfi, créateur de l’Istituto agrario di Meleto en 1834. Le mitan du siècle marque une rupture : l’État...

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