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Reviewed by:
  • Property Rights and Their Violations: Expropriations and Confiscations, 16th-20th Centuries dir. by Luigi Lorenzetti, Michela Barbot et Luca Mocarelli
  • Florent Le Bot
Luigi Lorenzetti, Michela Barbot et Luca Mocarelli (dir.) Property Rights and Their Violations: Expropriations and Confiscations, 16th-20th Centuries Bern, Peter Lang, 2012, 322 p.

Le droit de propriété, son élaboration, ses contours, ses implications et ses limites, son rôle dans la structuration de la famille et de la communauté, y compris en relation avec l’organisation politique de la société (songeons aux patriciats des cités italiennes médiévales, au droit de vote censitaire dans la France du XIXe siècle, à l’extension du rôle de l’État à l’époque contemporaine, etc.), sa place dans les dynamiques de production, d’échanges et d’accumulation, dans les mutations du capitalisme, du local au global, selon la conjoncture, la moyenne et la longue durée, constituent un Everest historiographique. Qu’il suffise notamment d’évoquer la littérature autour du mouvement des enclosures en Angleterre. Qu’il suffise également de se référer aux travaux de Douglass North concernant la problématique de l’efficacité économique selon les modes d’appropriation1. Pour le dire autrement, dans quelle mesure le droit de propriété favorise ou, au contraire, freine le bon fonctionnement du marché ? Les auteurs de ce collectif proposent d’orienter le regard sur « la propriété violée ». La richesse du vocabulaire [End Page 574] en la matière ouvre à la variété des situations politiques, administratives et juridiques : dépossession, mise sous séquestre, aliénation, expropriation, confiscation, spoliation, vol, correspondent dans les faits à une large palette de configurations historiques.

L’ouvrage est organisé en quatre parties : « Les confiscations : un instrument de l’État », les « Modèles et pratiques de l’expropriation durant l’époque moderne », puis à « l’époque contemporaine », enfin, les « Expropriations et confiscations dans le monde colonial et postcolonial ». La France et l’Italie sont les deux terrains d’enquête privilégiés, avec des prolongements vers l’Amérique et l’Afrique du Nord, ainsi que des changements d’échelles spatiales et chronologiques : le Palazzo Marino de Milan du XVIe au XIXe siècle, le Hainaut français au cours des guerres de la fin du règne de Louis XIV, Trieste au XVIIIe siècle, le Nouveau Monde en 1777-1888, le district de Rochefort en 1792-1826, les départements alpins et algériens durant la seconde moitié du XIXe siècle, Rio de Janeiro en 1870-1910, Padoue en 1921-1977, l’Italie fasciste, etc. Ces enquêtes croisent d’autres thématiques historiographiques : outre la question des enclosures et celle de l’organisation politique, déjà évoquées, l’histoire coloniale et impériale, la question des formes de servitude, celle des politiques antisémites dans l’Europe des années 1930-1940, l’histoire de la propriété intellectuelle, celle du rôle des guerres dans les dynamiques historiques, etc.

Trois séquences, plus ou moins longues, sont à distinguer : le temps du débat préludant à la dépossession ; la dépossession elle-même qui peut s’étirer sur des années, par exemple dans le cadre de procédures d’expropriation par voie judiciaire ; le temps plus ou moins étalé de l’indemnisation (lorsqu’indemnisation il y a), en corrélation, ou non, avec un retour du débat autour de la légitimité de cette dépossession et de la consistance des indemnisations. Ainsi, la spoliation des juifs de France en 1940-1944 a donné lieu à restitution ou indemnisation au sortir de l’Occupation – processus qui s’étend dans certains cas jusqu’aux années 1960 –, puis à un nouveau mouvement d’indemnisation à partir de 1999 (qui n’est pas encore clos en 2014), à la suite des travaux de la Mission d’étude sur la spoliation des juifs de France. Les politiques ordinaires, reposant notamment sur la notion d’« utilité publique », sont à distinguer des politiques extraordinaires des temps de guerre, de purification ethnique ou de révolution politique et économique. La question de la fiscalité, relevant des...

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