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Reviewed by:
  • Avant le contrat social. Le contrat politique dans l’Occident médiéval, XIIIe-XVe siècle ed. by François Foronda
  • Roxane Chilà
François Foronda (dir.)
Avant le contrat social. Le contrat politique dans l’Occident médiéval, XIIIe-XVe siècle
Paris, Publications de la Sorbonne, 2011, 726 p.

Ces actes de colloque font suite à un séminaire de la Casa de Velázquez ainsi qu’à un programme de recherche sur les coups d’État à la fin du Moyen Âge. L’étude des fondements du pouvoir politique et de la production sociale de l’État est au centre de ces projets collectifs portés par François Foronda 1, spécialiste de la royauté castillane au XVe siècle, qui revendiquent leur insertion dans la veine du programme de Jean-Philippe Genet sur la genèse de l’État moderne.

Cet épais volume quadrilingue constitue une importante contribution à l’analyse des sociétés politiques médiévales, de la question de la souveraineté et de la sujétion. Les contributeurs ont bénéficié d’autant d’espace qu’ils le jugeaient nécessaire pour leurs démonstrations, dans le cadre d’une démarche comparatiste ambitieuse qui conduit de l’Angleterre à la France et à la péninsule Ibérique, en passant par l’Italie et l’Empire germanique. Les États ibériques, Portugal et Navarre inclus, se taillent cependant la part du lion, avec environ un tiers des contributions. L’organisation du volume obéit à un principe géographique qui a l’avantage de permettre à des spécialistes de chaque aire de proposer des introductions problématiques à chacune des sections. Confiées respectivement à Patrick Boucheron, Jean-Marie Moeglin, Claude Gauvard, John Watts et María Asenjo González, ces synthèses sont assurément l’un des points forts du livre, elles scandent la lecture et facilitent le projet comparatiste, tout comme les deux conclusions de Jean-Philippe Genet et José Manuel Nieto Soria.

Les formes possibles de la contractualisation et les cas dans lesquels elles s’appliquent dans les sociétés médiévales font l’objet d’analyses qui se rejoignent souvent. Ainsi, Mario Ascheri présente la contractualisation comme étant soit horizontale soit verticale : pacte horizontal à l’échelle du groupe social, communautaire ou familial, sans parler du contrat commercial ; pacte vertical entre le prince et les représentants de ses sujets, qui fonde la légitimité de cette représentation, mais aussi de l’autorité politique même, dans les États ibériques dits pactistes. Les négociations2 et la conclusion de contrats entre inégaux, dans le cadre d’une relation verticale, sont au cœur de la réflexion collective. Comme l’écrit Pierre Savy à propos de la féodalité dans le duché de Milan, il ne s’agit en général pas tant de contrats de gré à gré que de contrats d’adhésion aux termes du plus puissant. Pourtant, selon J.-M. Moeglin, la contractualisation véritable ne peut exister qu’entre personnes du même rang ou, du moins, selon l’œuvre théorique du franciscain catalan Francesc Eiximenis présentée par Eduard Juncosa Bonet, qu’en étroite association avec la liberté des contractants, cette liberté étant la condition de la validité du contrat. Dans ce contexte, l’analyse, proposée à l’aune de la notion de contrat, de la variété de conventions, pactes, capitula, qui organisent délégations d’autorité et concessions de juridictions, représente une plongée au cœur des mécanismes du politique et du pouvoir souverain.

Les cas étudiés montrent que les pactes procurent aux parties contractantes une légitimité accrue, mais sans que la seule invocation du non-respect du contrat suffise à justifier le retrait d’obédience des États de Prusse à l’ordre des chevaliers Teutoniques, au profit de Jagellon III de Pologne en 1454. Dans ce cas, les acteurs ont éprouvé le besoin d’un autre discours légitimant, cette fois historicoidentitaire. La contractualisation appartient certes aux pratiques des acteurs, mais sans pour autant faire l’objet d’une theorization [End Page 203] massive dans...

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