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Reviewed by:
  • Municipal Officials, Their Public, and the Negotiation of Justice in Medieval Languedoc: Fear Not the Madness of the Raging Mob by Patricia Turning
  • Vincent Challet
Patricia Turning
Municipal Officials, Their Public, and the Negotiation of Justice in Medieval Languedoc: Fear Not the Madness of the Raging Mob
Leyde/Boston, Brill, 2013, 199 p.

Reprendre à nouveaux frais le lancinant problème de l’intégration du Languedoc au royaume capétien sous l’angle des conflits de juridiction entre justice consulaire et justice royale, afin d’en mesurer l’impact sur la population toulousaine et de mettre en exergue tout à la fois les efforts des capitouls pour maintenir une certaine autonomie urbaine – notamment en matière criminelle – et le rôle actif des citoyens dans la formation et l’évolution des structures politiques et judiciaires de la cité : ainsi peut-on résumer la belle ambition de Patricia Turning dans cet essai qui emprunte sa démarche à la fois au courant historiographique « from the bottom » et à l’idée d’une construction spatiale des pouvoirs et de ses représentations, tout en se fondant sur l’analyse des affaires criminelles consignées dans un registre de 1332 relevant de la justice capitoulaire.

L’auteure utilise souvent comme point de départ de sa réflexion un fait divers particulier découvert au fil de ses archives. Le livre s’ouvre ainsi sur la découverte, en août 1226, de deux corps mutilés et les pressions de la population qui s’ensuivirent à l’encontre du comte de Toulouse, Raymond VII, soupçonné d’abriter le meurtrier : à cette occasion, celuici fut contraint de prêter serment publiquement de reconnaître les sentences des capitouls en matière criminelle et P. Turning y voit le premier exemple attesté d’une manifestation publique de force utilisée par les consuls comme une arme politique pour renforcer leur autorité. Mais si la lutte engagée entre juridiction comtale et juridiction capitoulaire tourne plutôt à l’avantage des seconds, l’installation tant des pratiques de l’Inquisition que du pouvoir royal, qui impose, à partir de 1283, la présence de son viguier au cours du processus judiciaire, déstabilise le pouvoir des consuls en la matière et instaure une situation de concurrence juridictionnelle que viennent encore compliquer le for ecclésiastique, l’application du droit d’asile – que les magistrats urbains n’hésitent pas à violer en 1288 – et, bien entendu, les privilèges de l’Université, qui soustraient maîtres et étudiants à l’autorité des capitouls. En réaction, l’adoption de ce dernier terme par les magistrats à partir de 1295 n’est autre que le signe d’une volonté de promotion de la dignité consulaire, dont témoigne aussi l’année suivante le début de la rédaction des Douze livres de l’histoire de Toulouse qui enregistrent noms et portraits des magistrats.

L’analyse sociale des plaignants et la distribution spatiale des crimes enregistrés pour l’année 1332 permettent ensuite à l’auteure de démontrer que la justice des capitouls s’adresse avant tout « à des citoyens impliqués financièrement et personnellement dans la fabrique sociale de la ville » (p. 65), même s’il est tout de même curieux de ne pas appuyer une telle démonstration sur un plan du Toulouse médiéval, qui aurait permis de situer les lieux des crimes et les lieux de résidence des victimes qui demandaient une restitution publique de leur honneur. Le constat que cette criminalité ne se situe pas dans la sphère de la marginalité incite l’auteure à émettre l’hypothèse que la justice des capitouls n’a pas tant pour objet de lutter contre le crime que de raffermir l’autorité consulaire aux yeux des habitants, ce qui implique une évidente publicité tant des sentences que des châtiments : à crime public, jugement et châtiment publics ; d’autant que le jugement est l’occasion « d’accomplir la fonction rituelle de déterminer les standards d’un comportement socialement acceptable ou deviant » (p. 74). Mais c’est aussi que les crimes dont il est question sont des crimes publics, préc...

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