- Intrangers (I) Post- migration et nouvelles frontières de la littérature beur by Ilaria Vitali, and; Intrangers (II) Littérature beur, de l’écriture à la traduction by Ilaria Vitali
Dirigés par Ilaria Vitali, ces deux volumes offrent une présentation et une exploration de l’évolution de la littérature beur depuis sa naissance dans les années 1980 ainsi qu’une proposition de nouvelles pistes de réf exion sur ces écritures de la post- migration. Devant la dif culté de classement dans ce champ littéraire qui demeure problématique, Vitali opte pour le néologisme intranger, tiré du roman Allah superstar de l’écrivain algérien Y. B., alias Yassir Benmiloud, justifiant ainsi le choix de ce vocable qui lui “semble saisir mieux que d’autres le concept d’une identité interstitielle, qui se bâtit à partir des assonances et des dissonances de deux cultures différentes que l’on s’efforce de mettre au diapason” (13).
Structuré en deux parties, le premier volume Intrangers. Post- migration et nouvelles frontières de la littérature beur se penche sur les “vies et la mort” (14) de ce phénomène littéraire en s’ouvrant par “Construction et dé(con)struction de l’écrivain beur” qui comporte trois chapitres. Kathryn Kleppinger, dans son étude “L’invention du roman beur: Mehdi Charef, Leila Sebbar, Azouz Begag et Farida Belghoul,” souligne un aspect bien connu des membres du collectif “Qui fait la France?” qui se sont insurgés contre la considération de leur écriture comme “beure” ou de “banlieue,” revendiquant “le droit d’être respectés comme des auteurs français à part entière, sans ces qualificatifs qui occultent, selon eux, la dimension artistique de leur travail” (21). Pour montrer comment cette étiquette “beur” s’est développée pour désigner une catégorie bien spécifique d’écrivains de la première ou deuxième génération issus de l’immigration [End Page 240] maghrébine en France, Kleppinger s’est penchée sur les positions, les réactions, les débats et les discussions de quelques- uns de ces pionniers qui avaient contribué à l’émergence de ce phénomène littéraire, montrant l’influence des médias et des critiques dans la création de ce label aujourd’hui très discuté. En recourant à “la notion de ‘performative documentary’” de Bill Nichols et à la “technique du recadrage qui traduit le désir de l’auteur de se démarquer de l’étiquette d’’écrivain de banlieue’” (47), Laura K. Reeck examine le travail conçu par Rachid Djaïdani dans son film documentaire Sur ma ligne, “dans lequel l’auteur occupe lui- même le rôle principal” (47) afin de faire intervenir le champ filmique dans celui du littéraire pour parler de sa situation, la montrer en se filmant soi- même. L’originalité de Sur ma ligne réside dans le fait que ce travail cinématographique “s’attaque au monde des lettres françaises et en même temps fournit une preuve incontournable: Djaïdani prouve qu’il est écrivain en se filmant pendant la rédaction de son roman, et, du même coup, il redouble son statut d’auteur en devenant réalisateur” (66). La troisième contribution, de Robert Varga, aborde la réaction virulente d’Azouz Begag contre la supercherie de Paul Smaïl, un “faux beur” qui a connu un succès retentissant après la publication en 1997 de Vivre me tue. La véritable identité de cet usurpateur n’a été révélée qu’après la parution de son quatrième roman Ali le magnifique en 2001. Il s’agit du Français Daniel Théron, également connu sous le nom de plume de Jack Alain Léger. Présentant...