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  • Afrique du Nord
  • Alek Baylee Toumi

Hommage à Tahar Djaout

Il y a vingt ans, le 26 mai 1993, le poète, romancier et journaliste Tahar Djaout était assassiné par des islamistes et leurs commanditaires dans la banlieue d’Alger, en Algérie. Il avait trente-neuf ans, était marié et père de deux petites filles. Sa mort marqua le début du génocide des intellectuels par des “Khmers verts” islamistes.

Né le 11 janvier 1954, à Azzefoun, ex- Port- Geydon en Kabylie, un village au bord de la mer, Tahar Djaout a d’abord fait des études de mathématiques. Très jeune, élève brillant, il obtenait une licence de mathématiques en 1974, à l’âge de vingt ans. Sous le régime stalinien du parti unique fln, les médias indépendants n’existaient pas alors, et la campagne d’arabisation en arabe classique battait son plein. Les rares intellectuels qui osaient critiquer le régime se voyaient censurés et sévèrement réprimés comme les pères fondateurs de la littérature algérienne, Kateb Yacine, Mohamed Dib et Mouloud Mammeri. Le premier fut exilé d’Alger à Sidi Bel Abbes, le second vécut toute sa vie à Paris parce qu’on ne voulut pas qu’il revienne à Alger, et le troisième fut chassé de l’université d’Alger, à la fin des années soixante.

Tahar Djaout commença par écrire dans le supplément culturel du quotidien national El Moudjahid, pour ensuite aller à l’hebdomadaire Algérie Actualités, journal moins contrôlé et qui osait parfois défier la censure. Après les événements d’octobre 1988, de façon très machiavélique, le “Pouvoir fln” fractionna l’opposition démocratique en plus d’une cinquantaine de partis politiques. Au même moment, il légalisa le Front Islamique du Salut, en disant: “c’est nous ou c’est eux.” Automne 1989, Kateb Yacine s’en allait un peu et l’Algérie s’apprêtait à mourir beaucoup. Quelques années après, en janvier 1992, Tahar Djaout fonda avec ses amis Arezki Metref et Abdelkrim Djaad le journal Ruptures, hebdomadaire dont le titre annonçait leur intention de rompre avec la langue de bois des années de plomb. Vingt numéros plus tard, le 26 mai 1993, Djaout était abattu de deux balles en pleine tête par un marchand de bonbons, sur le parking devant son appartement. Il était alors en train de rédiger un nouveau roman, Le Dernier Sommeil de la raison, paru aux Éditions du Seuil en 1999, puis traduit en anglais sous le titre The Last Summer of Reason. Après une semaine dans le coma, il mourut le 2 juin 1993 à Alger.

Parmi les ouvrages qui lui ont été consacrés, on pourrait citer celui de Julija [End Page 203] Sukys, Silence is Death: The Life and Work of Tahar Djaout, (Nebraska Press, 2007). Trois jours avant sa mort, Djaout donnait une dernière interview parue dans le quotidien francophone El Watan.1

Quelque temps avant de partir, le poète prononça ces vers:

Le silence, c’est la mort,Et toi, si tu parles, tu meurs.Et si tu te tais, tu meurs.Alors, dis et meurs.

Si Tahar Djaout et Youcef Sebti nous ont laissés, les poètes, eux, ne mourront jamais.

Bande dessinée

Begag, Azouz et Djillali Defali. Leçons coloniales. Paris: Delcourt, 2012. isbn 9782756026954. 72 p.

Azouz Begag n’est plus à présenter. Romancier beur, sociologue, ancien ministre du gouvernement de Dominique de Villepin, il est l’auteur de Le Gone du chaaba, roman autobiographique qu’il a adapté pour le cinéma. Il vient de publier une bande dessinée sur les événements du 8 mai 1945 à l’est de l’Algérie, dans la région de Sétif, Guelma et Kherrata.

Leçons coloniales raconte l’histoire d’une jeune institutrice française, Marie Delmas, qui est venue de la métropole pour aller enseigner aux petits enfants, précisément à Sétif. Afin de libérer la France des nazis par le sud, trois cent cinquante mille Maghr...

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