Abstract

Les Fables de La Fontaine ont été d’abord transposées en créole mauricien en 1939, puis en 1952. Ces deux éditions sont une source importante pour comprendre les mentalités et les modes d’identification de soi et des autres. Il n’existe, à ma connaissance, aucun autre exemple littéraire de l’époque qui émette de façon aussi percutante la duplicité des discours coloniaux ainsi que la critique du mimétisme qu’ils ont pu provoquer chez les Noirs eux-mêmes. Les théories postcoloniales du mimétisme (Fanon et autres) ne font en somme qu’amplifier une réflexion déjà bien intégrée dans la sagesse populaire. Le folklore créole des Antilles et des Mascareignes est connu pour ses méthodes d’autodérision et sa mise en œuvre de tactiques de subversion et de dissimulation. Ce sont ces tactiques, et l’autocritique qu’elles présupposent, qui donnent la possibilité de se ménager, grâce au rire, un espace de manœuvre à l’intérieur de la culture dominante qui limite la liberté individuelle et collective.

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