In lieu of an abstract, here is a brief excerpt of the content:

Reviewed by:
  • De l’esthétisme au modernisme. Théophile Gautier, Ezra Pound by Christopher Bains
  • Violaine White
Bains, Christopher. De l’esthétisme au modernisme. Théophile Gautier, Ezra Pound. Paris: Éditions Honoré Champion, 2012. Pp. 344. isbn: 9782745323286

Cette étude se propose de démêler les rapports de filiation entre Théophile Gautier et Ezra Pound grâce à une lecture de leur œuvre poétique et de leurs textes de “seuil.” Bains offre une analyse limpide de l’ascendant du “poëte impeccable” sur quelques écrivains anglais et américains ayant admiré chez lui le perfectionnisme et l’autonomie du “positionnement.” L’absence notable de ce terme bourdieusien, faisant pendant à un soupçon plus ou moins explicite à l’égard des théories d’Harold Bloom, révèle pour le reste un certain rejet de la part de l’auteur d’une “approche conflictuelle de l’influence” (124).

La première partie de l’ouvrage retrace tout en nuances le primat de la perfection formelle chez Gautier et Pound, leur rôle dans la promulgation des logiques esthétique et moderniste par le biais de leur activité critique, ainsi que leur mépris partagé pour la culture de masse. Selon l’auteur, l’omniprésence chez Gautier et Pound de la métaphore de la pierre explicite de façon “hyperbolique” ce qu’il nomme une “poétique de l’extériorité.” Ainsi Bains relie-t-il les deux poètes par leur “transposition” de l’art plastique à la littérature, leur souci commun pour la précision linguistique et la maîtrise technique, et leur désir de faire apparaître le réel sans filtre autre que celui de l’Art. Une analyse des Cantos permet à l’auteur de signaler le revirement de la poétique de Pound dans les années 1920 suite à sa prise de conscience des limites du “cothurne étroit” et son adoption de formes moins [End Page 303] organiques. Le travail de Bains nourrit substantiellement, quoique de façon tacite, la discussion engagée par des auteurs tels que Kristeva, Kahler, Blanchot, ou Barthes sur la clôture du texte, le discours et la texture, l’organique et le décousu, l’unité et la pluralité.

La deuxième partie du volume clarifie davantage les rapports entre l’esthétisme et le modernisme en regardant de plus près l’engagement politique et la conception de l’image des deux poètes. Bains démontre avec brio que l’autonomie est paradoxalement ce qui affilie l’art pour l’art à l’avant-garde. Sans trop s’attarder sur la composante antihumaniste et conservatrice d’un tel désengagement, l’auteur analyse l’esthétisation de la guerre par Gautier et Pound et voit dans leurs poétiques des mouvements de “résistance” pour le salut de l’Art. Retracer la valeur contestataire du dandysme—de l’esthétisme au modernisme en passant par le décadentisme—permet à Bains d’entreprendre une admirable démonstration des signes précurseurs de l’avant-garde dans l’esthétisme. Le reste de la section, qui ne manquera pas d’exciter le débat, est consacré à une analyse de la nature et de la fonction de l’image. Si Bains distingue les deux poètes de par leur utilisation de la description et leur exploitation du topos de la Chine, il offre en revanche un exposé incontournable sur leur intérêt commun pour le mouvement et la condensation, rapprochant par exemple “Symphonie en blanc majeur” et l’idéogramme rouge du poète américain. Bains suggère que la suspicion de Pound envers toute métaphore obscurcissant les qualités matérielles de l’objet dériverait en partie de l’usage “parcimonieux” du trope chez Gautier. La conclusion de ce chapitre semblera peut-être prématurée à ceux qui aimeraient voir ici une étude approfondie de l’image de la médaille dans “L’Art” ou dans le titre du recueil Émaux et Camées. Une telle analyse ferait écho aux comptes rendus, par ailleurs excellents, sur la métaphore de la pierre, le “Paideuma” et le microcosme.

La dernière partie...

pdf

Share