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  • L’Année balzacienne 2012: Balzac, fantastique fantaisiste? Situations de la fantaisie balzacienne by Michel Lichtlé, Max Andréoli, et al., eds.
  • Suzanne F. Braswell
Lichtlé, Michel, Max Andréoli, et al., eds. L’Année balzacienne 2012: Balzac, fantastique fantaisiste? Situations de la fantaisie balzacienne, troisième série 13. Paris: Presses Universitaires de France, 2012. isbn: 978-2-13-06173-0

Tout en insistant sur le génie poétique de l’auteur de La Comédie humaine, Charles Baudelaire proclame Balzac un “visionnaire passionné” dans son célèbre essai, Théophile Gautier (1859). Les communications réunies dans ce volume de L’Année balzacienne 2012, dont la plupart portent sur les divers rôles que joue la fantaisie chez Balzac, illustrent le degré auquel le constat baudelairéen est perspicace. En particulier, ce volume révèle l’éventail de formes et de pratiques poétiques que comprend la fantaisie à l’époque de Balzac, et dans l’œuvre du romancier. Comme le propose Bernard Vouilloux, la “polysémie” que comporte la fantaisie déborde sa [End Page 267] richesse sémantique. De même, elle se répand dans l’élasticité formelle des caprices, des caricatures, des satires, et des fantaisies journalistiques balzaciens, publiés dans La Silhouette et La Caricature au début de la Monarchie de Juillet (8–18). Ces courts textes fantaisistes (réunis dans les deux tomes des Œuvres diverses de Balzac) serviront comme avant-textes à développer dans les romans de La Comédie humaine.

Une des contributions majeures de ce volume se trouve donc dans sa mise en évidence de la portée génétique de la fantaisie dans la pensée créatrice balzacienne. Véritable “creuset d’une écriture en devenir” (Sylvain Ledda 53), la sinuosité stylistique des textes fantaisistes et drolatiques (tels que Le Succube et La Grande Bretèche) se traduit dans les jeux de voix et de perspectives qui animent la narration et le cadre temporel dans Autre étude de femme et Physiologie du mariage, tout en reprenant de manière ludique certains thèmes et techniques de L’Heptaméron de Marguerite de Navarre (Nicole Mozet 88, 91). Mireille Labouret montre également la libre exploration de formes que la fantaisie inspire chez Balzac dans de nombreux romans de La Comédie humaine. Elle la retrouve dans la récurrence de variations et “d’improvisation[s] sur des thèmes connus,” où se fait sentir la suggestion des “mécanismes” de la fantaisie musicale développée plus “largement sous la Monarchie de Juillet” (122, 128). Des exemples notés comprennent le caprice (124), la mise en œuvre de contrastes thématiques qui, dans César Birotteau, La Femme abandonnée, et La Duchesse de Langeais opposent aux “délices amères du ressassement sans espoir” (132) les “célestes délices d’une passion infinie.” Parallèlement, Owen Heathcote marque, dans la structure de La Fille aux yeux d’or, la récurrence de variations sur des thèmes d’“hybridité” identitaire, sexuelle, et politique que vivent Henri de Marsay et Paquita Valdès à l’époque “bicéphale” des années 1814–1815 (190). Ce sont des thèmes qui prennent une ampleur particulière dans les vicissitudes des fantaisies et des fantasmes passionnels chez les protagonistes, et même encore dans l’hybridité stylistique du roman, dont l’intrigue entremêle délibérément “la poésie orientale, le roman noir et ‘cette éternelle vieille comédie’” (199).

La fantaisie balzacienne prend son inspiration initiale dans les textes fantaisistes des premières années 1830. Cependant, elle se métamorphose vite en un mode de composition et d’invention, aussi bien qu’en une manière de rendre la prose plus poétique et plus élastique. Comme le montre cet important volume, ce genre apparemment mineur joue un rôle majeur dans la pensée et dans l’œuvre de Balzac où la fantaisie ne cesse de se faire sentir.

Suzanne F. Braswell
University of Miami
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