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  • La Famille des Pitite-Caille; Zoune chez sa ninnaine, par Justin Lhérisson by Léon-François Hoffmann
  • Hugues Saint-Fort
La Famille des Pitite-Caille; Zoune chez sa ninnaine, par Justin Lhérisson. Edition établie et présentée par Léon-François Hoffmann. Saint-Etienne, France: Publications de l’Université de Saint-Etienne, 2012. 271 pp. 15 euros.

Justin Lhérisson (JL) est mort relativement jeune à 34 ans et on se demande ce qu’aurait été sa carrière littéraire s’il avait vécu plus longtemps.1 En effet, selon Georges Anglade (2006), il a été journaliste à 16 ans, patron de presse à 26, auteur célèbre de deux romans inoubliables, connus comme des «lodyans» et a laissé dans son quotidien Le Soir environ dix mille pages qui «constituent les archives originelles de la lodyans et des premiers lodyanseurs à l’écrit.» Le nom de JL est aussi passé à la postérité pour avoir écrit les paroles de l’hymme national haïtien «La Dessalinienne». Lhérisson lui-même présente «La Famille des Pitite-Caille» comme une «modeste histoire», une «audience»: «D’autre part, s’il faut s’en rapporter à l’opinion des amis aussi indulgents que vous, cette audience a eu la vertu de dérider les fronts les plus graves» (17).

Georges Anglade qui a mené une brillante carrière universitaire de géographe à l’Université du Québec à Montréal (UQAM) s’est laissé tenter par la littérature après sa retraite et a élevé la «lodyans» à la hauteur d’un véritable genre littéraire. Il a été le premier à faire l’effort de théoriser ce «genre narratif qui s’est épanoui en Haïti comme un art de miniatures.» Il le présente comme «cet art haïtien du bref, passé de l’oral à l’écrit à partir des années 1900, … entre 1899 et 1908, dans les colonnes d’un quotidien de Port-au-Prince, Le Soir, sous l’impulsion de deux maitres lodyanseurs, Justin Lhérisson et Fernand Hibbert.» Anglade lui-même avait commencé [End Page 317] une carrière littéraire de «lodyanseur» (lodyansè) et il a réuni plus de quatre-vingt-dix de ces miniatures dans un album intitulé Les lodyans de Georges Anglade: Rire haïtien (2006) avant de disparaitre dans le violent séisme du 12 janvier 2010.

Pour Marie-Denise Shelton (1993, p. 170), «l’audience, dans le contexte haïtien, est une forme d’entretien oral, où le locuteur use de ruses serpentines pour raconter de manière humoristique tel événement social ou tel fait politique.»

Pompilus définit la «lodyans» comme un «récit burlesque fait par un conteur professionnel à un auditoire familier.» Le mot «lodyans» est une création lexicale créole obtenue par agglutination du syntagme nominal français «l’audience» (565). L’agglutination est un procédé linguistique bien connu dans les langues créoles en général et particulièrement en créole haïtien, procédé par lequel l’article défini français placé en position de syllabe initiale de quelques mots français et perdant sa fonction originale d’article. Ce procédé a permis de créer un certain nombre de mots en créole tels que: «legliz», (du syntagme nominal français: l’église), «labank», (du syntagme nominal français: la banque), «lavil», (du syntagme nominal français: la ville), «diri», (du syntagme nominal français: du riz), «lari», (du syntagme nominal français: la rue), «lekòl», (du syntagme nominal français: l’école) «lakou», (du syntagme nominal français: la cour), «lapli», (du syntagme nominal français: la pluie), etc. La «lodyans» est un genre littéraire typiquement haïtien dont les racines se trouvent au plus profond de la culture haïtienne, au même niveau que la langue créole et le vodou. L’expression créole «tire lodyans / bay lodyans» s’emploie quand on raconte des histoires brèves et pleines d’humour dans lesquelles les Haïtiens sont passés maitres. Généralement, ces histoires sont dites au cours de circonstances spéciales, par exemple durant...

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