In lieu of an abstract, here is a brief excerpt of the content:

Reviewed by:
  • Les Origines de la France: quand les historiens racontaient la nation by Sylvain Venayre
  • Edward Ousselin
Les Origines de la France: quand les historiens racontaient la nation. (L’Univers historique). Par Sylvain Venayre. Paris: Seuil, 2013. 423 pp.

Ce que démontre l’étude détaillée de Sylvain Venayre, c’est que les débats politiques autour de la notion confuse de ‘l’identité nationale’ ont eux-mêmes une longue histoire, dont le plus récent épisode a été la malencontreuse décision du président Nicolas Sarkozy, nouvellement élu en 2007, de créer un ministère de l’Immigration et de l’Identité nationale (il a été supprimé en 2010). Plutôt que d’examiner cet épisode à caractère épiphénoménal, Venayre retrace les efforts de nombreux historiens de remonter jusqu’aux sources de la nation française, d’identifier la période historique qui vit l’émergence d’une ‘conscience’ ou ‘identité’ nationale. À travers une opération de renversement de perspective que d’aucuns qualifieraient de mise en abyme, la quête des origines de la France moderne, dont les modalités et les enjeux ont souvent évolué depuis le dixhuitième siècle, devient ainsi elle-même un objet d’analyse historique. Selon la démarche de Venayre, cette analyse passe par l’étude du vocabulaire, par l’identification du moment où apparaît un mot dans le discours des historiens, par le suivi de l’évolution de son usage et du contexte dans lequel il est utilisé: ‘Surtout, [certains historiens] parlaient de “nation”. Et ce simple mot semblait les autoriser à chercher dans l’histoire les qualités “natives” de la France’ (p. 14). Au fil des chapitres, Venayre relève également les diverses métaphores (le berceau, le germe, l’arbre, la famille, etc.) qui ont servi à illustrer les conceptions successives des origines nationales. Cette quête du ou des moments historiques de formation, de naissance de la nation française a préoccupé de nombreux écrivains tout au long du dix-neuvième siècle. Marqués par les révolutions et les changements de régime politique qui s’étaient succédé depuis 1789, ces écrivains (libéraux ou conservateurs, historiens professionnels ou non) ne pouvaient plus se contenter d’examiner l’histoire de la royauté, alors que le peuple, la nation s’en étaient détachés. La liste de ces écrivains est longue: les frères Thierry, Guizot, Maistre, Bonald, Michelet, Quinet, Fustel de Coulanges, Lavisse, Jullian, Renan, Taine … Parmi les théories sur les origines, ou ce qui constituerait le point de départ de la nation française, les facteurs qui auraient contribué à l’émergence de son identité, Venayre recense entre autres l’héritage romain, les invasions des Francs et le statut subalterne des Gaulois, le mouvement d’affranchissement des communes au douzième siècle. Aux polémiques sur les origines de la nation s’ajoutaient des débats (dont certains semblent bien dépassés à notre époque) sur les fondements présumés de l’identité nationale: la langue, le territoire, la race (rappelons la fameuse théorie de Taine selon laquelle les événements historiques seraient déterminés par la race, le milieu et le moment). Venayre consacre un Épilogue, intitulé ‘La Fin d’une idole’, au déclin et à la disparition — parmi les historiens (l’École des Annales joua un rôle décisif dans ce domaine) — des recherches sur un point d’origine qui servirait à expliquer l’identité de la France moderne. Venayre a également ajouté une section à son livre qui fournit de nombreux extraits des œuvres qu’il analyse, ce qui sera utile aux nonspécialistes. [End Page 140]

Edward Ousselin
Western Washington University
...

pdf

Share