In lieu of an abstract, here is a brief excerpt of the content:

Reviewed by:
  • Politique du renonçant: le dernier Rousseau des ‘Dialogues’ aux ‘Rêveries’ by Jean-François Perrin
  • Sylvie Romanowski
Politique du renonçant: le dernier Rousseau des ‘Dialogues’ aux ‘Rêveries’. Par Jean-François Perrin. (Détours littéraires). Paris: Éditions Kimé, 2011. 362 pp.

Ceux qui connaissent les nombreux travaux de Jean-François Perrin sur Rousseau seront ravis de lire cette somme de sa recherche sur ces deux œuvres qu’il lie étroitement dans une approche non pas autobiographique mais politique et théorique. Dans son annexe, Perrin évoque les multiples interprétations des Dialogues pour conclure que Rousseau vise avant tout à former un ‘lecteur majeur’ (p. 289). Perrin sera ce lecteur, et nous à sa suite profiterons de son étude magistralement détaillée, structurée et lumineuse. Dans la première des trois parties, ‘Soi comme autre: un dispositif de travail’, Perrin définit le renonçant ainsi: ‘un “renonçant” selon la Nature au cœur de la Cité’ (p. 40). Renoncer est un processus actif, un acte continu et créateur qui s’oppose à quelque chose de bien connu: la société des Lumières en crise historique dans les décennies avant la Révolution. Comment est structuré le ‘moi’ du renonçant, comment est-il lu au dix-huitième siècle, quelle est l’interaction du renonçant avec le public? Ainsi Perrin oriente-t-il toute son étude vers une contextualisation politique des Dialogues. La Cité est donc omniprésente et le renonçant y occupe une position particulière que Perrin analyse dans la deuxième partie, ‘Politique(s) des Dialogues’. D’abord Perrin examine le paradoxe des Lumières qui prêchent la tolérance mais qui exercent une hégémonie violemment intolérante. Ensuite il montre que le renonçant essaie toutefois de comprendre comment cette opinion publique toute puissante peut interpréter les intentions des autres de manière auto-justificatrice qui ne laisse pas de place pour un contestataire permanent tel que ‘J.J.’. Perrin décrit la crise de la justice, alors que ‘J.J.’ réclame un procès juste, public et contradictoire, interdit par les lois de l’Ancien Régime, dont le public est cependant fasciné par les procès et les mémoires judiciaires. Dans la troisième partie, la plus longue, ‘L’Incessant: des Dialogues aux Rêveries’, ce renonçant persécuté, mis dans une position intenable dans une société qui l’observe sans lui donner la parole, se sent exclu comme un monstre que Perrin compare à l’ostracisé, l’homo sacer du droit romain. Ici Perrin entame une analyse du contexte littéraire des textes romanesques du dix-huitième siècle, qui mettent en scène les espaces publics et mondains (contrairement aux espaces privés des cours et salons du dix-septième siècle) où chacun peut être vu et surveillé. Dans cet univers, le renonçant, seul homme selon la Nature, doit trouver une autre position d’énonciation explicitée dans les Rêveries. Après une analyse de l’obligation de dire la vérité à la société ou de mentir (centrée sur la ‘Quatrième promenade’), le renonçant devenu incessant conclut qu’il préfère s’abstenir pour garder sa liberté (‘Sixième promenade’), ne plus s’adresser aux hommes tout en restant profondément attentif à la rumeur de la ville. Dans une brève conclusion, ‘Retour amont’, Perrin relie ces deux dernières œuvres au Rousseau qui, se qualifiant de ‘barbare’ dès le premier Discours, commence par s’opposer à ‘eux’ pour arriver à être ‘soi’, celui qu’il a toujours été, tel qu’en lui-même enfin, et ainsi Perrin montre la logique profonde de la trajectoire spirituelle de Rousseau. [End Page 107]

Sylvie Romanowski
Northwestern University
...

pdf

Share