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B o o k R ev iew s aurait préféré une affectation dans une grande ville européenne, couronnement traditionnel de la “ carrière” . A priori, Gobineau n’est donc pas le témoin idéal pour décrire ces îles peuplées de quel­ ques miliers d’hommes, vivant en quasi-autarcie, loin de la civilisation. Cependant, c’est précisément cela qui va attirer l’écrivain: dans ces rudes pêcheurs de morue, il trouve une sorte d’incarnation moderne de son idéal de l’Arian, homme d’action et d’aventure, courageux et farouchement indépendant. Comme l’Arian, ces hommes vivent au sein d’une microsociété de type communal et se gouvernent eux-mêmes, sans lois écrites, sans juges ni police, sans Etat. Pour assurer leur subsistance, ils affrontent tous les jours des périls extrêmes et leur survie est un miracle quotidien sur ces rivages incléments. On voit que Gobineau n’est pas un voyageur sans bagages: les observations de l’auteur de l’Essai sur l’inégalité des races humaines sont largement surdéterminées par ses thèses raciales, qu’elles ont souvent fonction de confirmer, parfois de nuancer. Mais les thèses de Gobineau sont elles-mêmes assez contradictoires pour ne pas nuire à la fraîcheur et à la vivacité de son observation. D’une façon générale, les meilleures pages de Gobineau dans cet ouvrage sont celles qu’il consacre aux différentes populations qui peuplent la région: les Indiens, dont il évoque avec compassion la dégradation au contact des populations blanches et l’inexorable disparition, les Acadiens qui, d’une certaine façon, disparaissent aussi, parce que leur mélange avec les populations anglaises, condition de leur survie, altère irrémédiablement leur identité. Enfin, lorsqu’il décrit les puritains, ou la chasse au mari des jeunes filles américaines, on retrouve le Gobineau humoriste de La Chasse au caribou. Enfin, signalons la qualité de l’introduction et de l’appareil de notes de Roland Le Huenen, très complets, qui permettent au lecteur de bien situer l’ouvrage dans le contexte de l’œuvre et de la problématique gobiniennes. F r a n ç o is e M . T a y l o r SA IS—Johns Hopkins University Fernande Bartfeld. L ’E f f e t t r a g iq u e : E ss a i s u r l e t r a g iq u e d a n s l ’œ u v r e d e C a m u s . Paris-Genève: Champion-Slatkine, 1988. Pp. iii + 286. On connaît aujourd’hui l’importance du jeu dans l’explication des faits sociaux de même que la respectabilité justement accordée au roman policier qui expose surtout le per­ sonnage du détective se livrant à la réflexion et à l’analyse. C’est le mérite de Fernande Bartfeld d ’avoir relevé ces deux notions pour les transformer en instruments de critique littéraire qui lui permettent de considérer avec clairvoyance l’ensemble de l’œuvre de Camus. Ajoutés au thème du “ malentendu” qui caractérise non seulement l’œuvre mais la personnalité même de Camus, le ludique et le policier servent à élaborer dans cet ouvrage une conception tragique chez Camus aussi originale que fascinante. Tout écrit de Camus contribuant généralement à créer l’effet tragique, il s’imposait de grouper les oeuvres selon l’affinité thématique qu’elles présentaient les unes pour les autres. D’où la charpente solide de ce livre où sont examinées les œuvres de l’engagement et de la révolte tragiques, les adaptations dramatiques et les écrits critiques, et la part occupée par le mythe. La signification de L ’Etranger, de Caligula et du Malentendu, illustrations de l’absurde, peut être appréhendée par le ludique et le policier. Mais ni Caligula, personnage dramatiquement excessif, ni Jan, ayant décidé trop tard de ne plus “jouer” , n’atteignent la dimension métaphysique et donc tragique à laquelle parvient Meursault qui...

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