In lieu of an abstract, here is a brief excerpt of the content:

Essai sur la symbolique et la structure d'Omneros Guy Dugas L E RECUEIL OMNEROS DE MOHAMMED DIB (Paris: Seuil, 1975) constitute l’exemple, rare dans la poésie maghrébine de langue française, d’une volonté de l’auteur de structurer forte­ ment l’ensemble de la matière poétique présentée, l’œuvre rappelant par son organisation générale (une table des matières, de “chapitres” poétiques pourvus de titres, . . .) la forme d’une œuvre romanesque. Si bien que l’espace clos de chacun des poèmes s’inscrit dans un autre espace plus vaste, situant ce poème et Péclairant, sans toutefois le signifier. Tant de poèmes—et parfois chez Dib lui-même ceux d'Ombre gardienne (1961), rééd. 1984) ou de Formulaires (1970)—semblent recueillis sans autre ordre apparent qu’une thématique commune ou une chronologie de création (et les titres de tels recueils sont alors souvent si consternants: Premiers vers, Poésies choisies, . . . !). Pourvu qu’on sache l’interroger avec méthode, la rigoureuse et singulière structure d’Omneros doit donc nous parler, par delà chaque poème du recueil. Possibilité d’autant plus appréciable que la poésie de Mohammed Dib s’avérant hermétique et cérébrale, particulièrement dans ces pages, le structurel et le para-textuel pourront ainsi oppor­ tunément aider au déchiffrement du poème dans sa clôture. I. Structure globale Reprenons, afin de la commenter, la table qui achève le recueil considéré: Exergue 1. Eros crypte. “chapitre” composé de sept “publications.” Parabase. 2. Eros mer. Parabase. 3. Eros terre. 22 Spring 1986 D ugas 4. Eroslude. Parabase. 5. Omneros. Parabase. 6. Thanateros. Parabase. 7. Plus noir Eros. Outre l’intérêt ici accordé par le poète au lexique puisant dans l’Antiquité gréco-latine (et dont on retrouverait trace dans les poèmes eux-mêmes) et les jeux de composition à partir du lexème “Eros” (JeanPaul Sartre avait construit de même le titre de l’une des nouvelles du Mur, “Erostrate”), on constate bien dans cette table la volonté d’organiser le recueil autour d’une thématique unique: Eros = amour sensuel, désir sexuel. De fait, plus encore que l’amour, c’est le désir, l’amour charnel qui apparaît omniprésent en ces pages, et “Omneros” (omni-éros) est à la fois le titre du recueil et celui d’un de ses “chapitres” les plus importants. Le “chapitre” 6 s’intitule ensuite, assez contradictoirement semble-til , “Thanateros” . On sait en effet que la mythologie grecque avait coutume d’opposer au contraire Eros et Thanatos, les forces de vie et celles de mort, toutes deux présentes en chaque individu. Mais cette opposition est-elle vraiment pertinente? Le “projet d’Eros” , selon l’expression de Mohammed Dib, n’est pas toujours du côté de la vie, du mieux-être et de la lumière partagée. “Soleil à vide”—soleil avide—Eros ne participe-t-il pas également, à sa façon, de ces forces de mort auxquelles la tradition tend à l’opposer? Cette thématique, qui parcourt le recueil Omneros, n’est pas—il faut bien le dire—des plus neuves. Il y a beau temps que l’on a pris l’habitude de nommer “petite mort” l’aboutissement de l’acte érotique. C’est bien sûr au Freud des dernières expériences et, à travers lui, au Surréalisme, que renvoie Dib dans l’apparent paradoxe constitué par ce titre et la thématique qu’il recouvre: “L’homme n’est vivant que de son désir, cependant que ce désir est désir de mort.” ' 1. Marianne Van Hirtum, “Eros-Thanatos” , in Non-Lieu, 1 (1977). Vol.XXVI, No. 1 23 L ’E sprit C réateur II. Eros à tête de Janus Toutes les “publications” du premier “chapitre” , Eros crypte, tendent à mettre à jour, à affirmer l’amour sexuel, à la fois: 1) Comme une évidente source de lumière au sien de laquelle l’exis­ tence se jubile, le désir se sublime. L’être aimé, ou rêv...

pdf

Share