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1 Natif du Cap-de-la-Madeleine (Québec). university of toronto quarterly, volume 70, number 3, summer 2001 M I C H E L L O R D Montréal «fantastique» chez Jean-Pierre April et André Carpentier Longtemps je me suis demandé sous quel angle j’allais aborder la question qui nous est soumise. Pour un Trifluvien ou plutôt pour un Capon1 comme moi, émigré à Québec puis exilé à Toronto, venir parler de Montréal vue d’en haut ou d’en bas relève de la gageure. Après réflexion, c’est finalement en amateur de nouvelles fantastiques et de SF que j’ai décidé d’aborder la question. Cela, pour la raison que j’ai l’air de regarder Montréal par le truchement de tout petits genres (la nouvelle, le fantastique, la sciencefiction ), petits genres qui n’en sont pas en réalité, mais qui sont perçus en tant que tels par une certaine Institution littéraire. Il y a aussi le fait que, parmi toutes mes lectures, deux textes m’ont toujours frappé et continuent toujours de me hanter, et c’est donc en obsédé de ces deux textes, euxm êmes obsédés par Montréal que je parlerai de Montréal. Un mot des textes et de leur auteur respectif. D’abord je déroge à la règle du choix obligé ici en optant pour «Le “aum” de la ville» d’André Carpentier puisque ce dernier est un Montréalais pure laine, né dans le quartier Hochelaga. Si je l’ai choisi, c’est pour deux raisons: d’abord pour ce qu’il fait avec l’île de Montréal dans sa nouvelle, ensuite parce que je veux mettre sa vision de Montréal en regard de celle d’un autre auteur, non-Montréalais celui-là, Jean-Pierre April, né à Rivière-du-Loup, et qui a, dans «Le vol de la ville», donné un des plus fascinants textes sur Montréal. Dans les deux cas, faut-il préciser, Montréal est beaucoup plus fantasmé que dépeint dans sa réalité quotidienne, ce qui à mon sens en rend la lecture encore plus proche de la réalité intérieure, de la vision que les nouvellliers fantastiqueurs en ont. Par ailleurs, même si les deux textes ne sont d’aucune façon reliés l’un à l’autre, ils forment à la lecture un dyptiquefantastico-science-fictionneloù l’île de Montréal est, à chaque fois, arrachée de son port d’attache, voyage dans le fleuve et dans l’espace, puis se rétablit sur d’autres bases, d’autres fondements sociaux ou politiques. En somme, on a affaire à des formes d’utopies de types fort particuliers. Étrangement, les deux textes comportent également sept séquences narratives,àcetteexceptionprèsquela nouvelle d’April commence in media res et que celle de Carpentier est précédée d’une sorte de petit essai où le montréal «fantastique» 753 2 Nous pourrions aussiinsister sur la dimension comique de ces textes, maisce serait un tout autre discours. narrateur interne – mais bizarrement effacé tout au long de l’aventure – insiste sur ce dont il va parler: «L’affaire [dit-il] est construite comme un fantasme, elle n’existe que par le discours » (Carpentier, 1992: 46). Mais le discours chez Carpentier donne forme à une nouvelle réalité à Montréal, dont l’île est littéralement terrassée par « une série de catastrophes [qui] s’abattent sur la communauté » (46), et qui relèvent, selon le narrateur, de la «magie» (46) ou de l’«ordalie» (46), c’est-à-dire de la punition ou de l’épreuve par les éléments naturels, ici mêlés forcément à un surnaturel des plus étranges qui n’est pas d’origine divine, mais où une forme de sacré et de sacrilège joue un rôle. Pour bien faire voir de quoi il retourne, je ferai un rappel de certains des élémentsformalisateurdesdeux textes.Pour ce faire, j’aborderai la question sous l’angle du descriptif et de l’émotif, le descriptif servant à illustrer la vision qui est offerte de la r...

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