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sciences humaines 159 Alain Létourneau, L'herméneutique de Maurice Blondel. Son émergence pendant la crise moderniste Saint-Laurent, Bellarmin, 308 p. Le mal dans l'imaginaire littéraire français (1850B1950), s. la dir. de Myriam Watthee-Delmotte et Metka Zupancic Paris et Montréal, L'Harmattan, Orléans (Ontario), David, 1998, 432 p. Les hasards de l'édition amènent parfois de curieuses B et fructueuses B rencontres, notamment celles d'ouvrages que rien ne semblait autoriser à mettre en rapport. La lecture successive des livres de Létourneau et de Watthee-Delmotte et Zupancic appartient à ces étranges accidents de parcours. Il s'agit certes de deux ouvrages fort différents, tant dans la manière que dans les sujets ou les points de vue, mais c'est fondamentalement la même interrogation qui est présentée au lecteur: au delà des éphémères certitudes, comment faut-il penser/lire/interpréter la modernité et ses *dangers+ (trivialisation du sacré, ou même du mal)? Le Blondel peint par Létourneau est fascinant. Philosophe, théologien, catholique non dogmatique, Blondel fut en constant dialogue avec ses contemporains, et son herméneutique des textes sacrés fut peu à peu intégrée par les théologiens français du tournant du XIX e siècle, et par ceux qui suivirent, conduisant ainsi à Vatican II et au grand renouveau catholique des années 1960. Ce ne fut cependant pas chose facile: cette œuvre provoquante (pourtant jamais mise à l'Index) fut lue discrètement jusqu'en 1950. En effet, la crise moderniste du catholicisme s'est jouée autour de la lecture des textes sacrés, c'est-à-dire, plus précisément, autour des approches modernes de lecture, en particulier les méthodes historicocritiques (qui, pour certains, menaçaient la positivité de la Révélation divine). Si, comme l'écrit Létourneau, *la pensée de Blondel peut être vue comme l'accueil de la conscience de l'histoire et de la modernité à l'intérieur du catholicisme+, l'ouvrage en fait l'éloquente démonstration. On y voit le philosophe refuser de reculer devant les questions suscitées par les apports de l'histoire et de la théologie: il interrogea la tradition à partir de la modernité, sans crainte. De ce point de vue, l'introduction du livre est d'une admirable clarté; elle situe tout autant les acteurs que les enjeux, de même qu'elle peint une France en crise, partagée entre la laïcité et l'émergence d'un catholicisme social de mieux en mieux organisé. Sous la sourde influence de Kant, Blondel pratiqua une herméneutique de la génialit é, qui se voit souvent traduite par le biais de métaphores vitalistes (grain, semence, germe, fécondité...). Ce sont là des images caractéristiques du discours pastoral, tout autant que de la pensée sur la langue des années 1880B1900, sous l'influence de Darmesteter (La vie des mots étudiée dans leurs significations, 1888), autre dimension de la modernité chez Blondel. La discussion entre Loisy et Blondel, analysée à fond par Létourneau, révèle les impacts de la rencontre entre histoire, philosophie et théologie 160 lettres canadiennes 1999 (j'ajouterais aussi philologie): l'herméneutique des textes sacrés peut-elle * légitimement+ se nourrir de l'expérience intime? Comment le savoir (et la conscience) historiques s'opposent-ils aux formes plus *personnelles+ du savoir? Blondel souhaitait la réconciliation des points de vue. *Son+ histoire s'inscrit dans un cadre de pensée théologique, histoire qui est aussi réflexion sur l'Église et la vérité des Évangiles. Mais c'est tout de même du choc des disciplines que naît son herméneutique. Le lecteur-Blondel est un croyant qui cherche. Il ne s'agit pas là d'un paradoxe, mais d'une volontaire position de l'esprit, considérée *à la fois comme action et comme signification+. On n'a pas encore fini de prendre la mesure de l'influence de l'œuvre de Blondel et l'ouvrage de Létourneau en fait amplement la démonstration. *** Si la...

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