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HUGUES CORRIVEAU Ou formalisme ou des jeux formels L'emotion de la forme. Des Ie debut, cette fascination pour Ie texte, sa structure, sa maniere. II faut que l'ecriture meme seduise, sa fabrique, le style dans son deploiement, son depliement. II faut tm premier ravissement. Les Herbes rouges, La Barre du Jour, voila des Heux qui donnent ajouir du texte, du « sexte » comme on disait alors car, ludique, Ie monde des mots valait bien - ace moment-Ia -l'autre monde que les liens grammaticaux, les ellipses comme les genres, les trous, les beances, les traits d'union et la ponctuation imitent si bien. On plongeait dans les trames textuelles comme des explorateurs d'un monde syllabique. La forme... 0'aboq:ielle, pour dire Ie ~ a mange tout Ie portrait. Mais cette epoque dont je parle, qui durera quelque quinze ans et qu'on nommera (malgre les hesitations et les polemiques) la modernite quebecoise, m'apparait ffieme aujourd'hui essentielle, fondamentale, exploratrice et jouissive. En ce sens capitale, apres les poussees de I'Hexagone et du quebecisme oral. Quant amon activite litteraire, elle sera entramee dans ce tourbillon, originellement, venue comme de soi. Tous les textes premiers furent happes par cette force du formalisme, dans ce desir d'atteindre au moyen de celie voie rna propre voix. Beaucoup de textes de cette epoque seront touffus, denses extremement, brutaux meme quant aleur rapport al'accessibilite. Mais il y aura plaisir dans ce travail de sape. La poesie ne sera pas seule en cause, les romans aussi (Rose Marie Berthe, Les chevaux de Malaparte) seront tires de ce cote des choses qui pretend que Ie litteraire est avant tout un evenement de style bien avant que d'etre histoire ou anecdote. Une seule et prirnordiale question: « QueUe sera la maniere de ce texte ? »Et non pas:« au ce texte me rnenera-t-il ? » Toujours cette question de la voix particuHere du poeme, du roman. Les textes s'ecrivent sans avenir, toujours dans Ie present et I'etonnernent : je reste Ie premier Iectem de mes textes. Le joui ki, c'est la surprise devant ce qui (se) passe en ecrivant, dans ce travail continu de Ia prose comme de la poesie. Et vint Ie premier projet d'un recueil de nouvelles: Autour des gares. Livre ace point « lisible» qu'on s'etonnera un peu de ce revirement (?). Or, la pulsion qui va me mener 121 n'est pas autre que cene qui rn'a pousse a UNIVERSITY OF TORONTO QUARTERLY, VOLUME 68, NUMBER 4, FALL 1999 940 RUGUES CORRIVEAU ecrire les livres precedents. Car si Ie formalisme tres orthodoxe des productions « herbes-rougistes}> et «nbjiennes» anb~rieures semble acent Iieues de la production des eourtes nouvelles des Gares, il n'en est rien. La forme encore prime, du moins Ie jell formel. Car ce recueil tient d'un pari« oulipien ». La rencontre avee les textes de Georges Perec aura ete acet egard capitale. Les cent nouvelles des Cares tiennent chacune a trois contraintes fondatriees : toutes originent d'une citation d'A La recherche du temps perdu de Marcel Proust; toutes racontent une histoire ayant lieu dans une gare, sur une voie ferree, dans un wagon de train; toutes - adivers niveaux - investissent une pensee, un evenement, un desir ou un lieu qui tient de l'autobiographique. C'est d'abord ce defi formel qui me seduira dans cet itineraire. C'est toujours et encore la forme qui va guider la pulsion. C'est apres que la fabrique va devenir plus souple, qu'un certain relachement des barrieres, des guides va operer la relance. En fait, trois autres recueils vont suivre les Cares, asavoir, d'abord, Courants dangereux, qui n'est fondamentalement nourri que de cette idee sous-jacente du danger permanent d'exister. Viendra ensuite un autre recueil tres « structure »,lui aussi soumis a un imperatif oulipien, soit l'enfance et sa solitude dans Attentiol1, tu dors debout. Enfin, Ie plus libre de mes recueils, Le ramasseur de souffle, sera tout de meme regi par une mathematique rigoureuse qui en organise la structureJ soit cinq themes se partageant chacun trois nouvelles. Tant qu'a reconnaitre une detteprecise et immense ace que fut pour moi...

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