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HUMANITIES 483 parole et faire germer en soi la poesie, la commencer comme si c'etait la premiere fois. Car, si l'on assiste au questionnement du poeme, l'on vit peut-etre encore davantage celui du lecteur. L'auteur veut que la poesie devienne un revoir it l'occasion des ceuvres de Ouellette et de Giguere. La critique ouellettienne se base avant tout sur les notions d'espacetemps , et, it partir d'une analyse tres eclairante du texte, 'Et nous aimons: nous arrivons it la 'Iumiere sous l'abime' et enfin it la parole denouee. II y fait chaud de solei!, de fruit et de naissance, d'attention a I'cei! et a l'oreille, a l'enfance, au torrent et it la mer, a la femme, au mouvement, au clair-obscur ." On y parle aussi de difference, de simultaneite, de disjonction, de nombre d'or, de derives imaginaires, de quete mystique, etc. De la poesie de Giguere, Paul Chanel Malenfant souligne avant tout l'eclatement, l'explosion, les metamorphoses, Ie pluriel, les repetitions, la brisure et !'incantation. II en deguste la violence, les cris, la perle, la couronne et I'oiseau, Ie nid et les ailes, la presence-absence de la main it l'humain. II reussit une lecture initiatique de ce trop galvaude 'Roses et ronces' et rend cette ceuvre rapide comme I'eau d'une soit. La Parlie el Ie loul arrive donc bellement it nous donner 'des indices et des echos.' On y considere Fernand Ouellette et Roland Giguere comme des auteurs tres impliques dans leur histoire, refusant des frontieres pour faire la synthese du Quebec et de l'Europe et recrivant Ie nucleaire dans leur eclate, afin d'arriver au 'reel absolu' a la Grandbois. C'est a travers une parole fracturee que Ouellette fait I'experience du triangle et Giguere celui du 'son du signe colore: que Ouelette realise la marche ". et l'amour et que les yeux de Giguere 'inventent leur propre voyance.' Comme nous Ie confie l'auteur, cette lecture 'a ouvert des textes pour en montrer l'ouverlure, elle les a approfondis pouren percevoir la multitude des profondeurs.' (CECILE CLOUTIER-WOJCIECHOWSKA) Fran<;ois Colbert. Le Marche quebt!rois du thelitre Institut quebecois de recherche sur la culture, 1982. 109. $8.00 Monique Genuist. Languirand et l'absurde Cercle du Livre de France '')82. 223· $'4.95 Renate Usmiani. Michel Tremblay Douglas and Mcintyre '982. '77· $5.95 Ce n'est pas d'hier que les liens etroits entre l'activite theatrale et les conditions socio-economiques attirent I'attention des chercheurs. Pour Ie Quebec, l'exegese brillante d'un Baudoin Burger, solidement ancree dans de telles donnees, sert de modele du genre, du moins pour la periode dont elle traite. Plus proches de nous, des enquetes telles que Le Theatre et rEtat au Quebec d'Adrien Gruslin (1981) et Crise de croissance d'Angele Dagenais (celle-ci parue en 1981 dans la meme serie que Ie livre de Fran~ois Colbert) continuent et parachevent l'analyse de ces rapports. L'etude de Colbert, austere mais non aride, pousse encore plus loin que les deux precedentes l'auscultation de ce grand malade qu'est, dit-on, Ie theatre au Quebec actuel. Statistiques 11 l'appui, notre guide nous depeint l'evolution de l'offre sur Ie marche du theatre francophone pour adultes en meme temps que la courbe, independante et helas! bien plus faible, de la demande dans ce domaine. Entre 1974 et 1979 Ie decalage entre les deux courbes est devenu alarmant: Ie nombre de troupes professionnelles s'est accru presque cinq fois, passant de 26 a120. (On calcule qu'il existait, de plus, quelque 450 troupes d'amateurs en 1981!) Et la moyenne des spectateurs tombe, dans Ie cas du theatre institutionnel de 382 a371 par spectacle, de 127 11 121 pour Ie Jeune Theatre. D'ou !'importance de cette enquete. Elle est fort bien menee. La collecte d'information est soigneuse et savante: fort de renseignements recueillis pour les marches du theatre quebecois, ontarien, canadien, americain, fran~ais et autres, Colbert inspire pleine confiance dans sa maitrise des donnees. L'approche etant de type offre-demande, il s'agissait d'etablir, dans la premiere partie de ce rapport, Ie nombre de compagnies sur Ie marche, d'evaluer leur revenu global, et de calculer ensuite Ie nombre d'entrees necessaires pourassurer la viabilite de l'activite theatrale telle qu'elle se pratique a l'heure actuelle, cette viabilite etant definie comme Ie point d'equilibre budgetaire. Dans la deuxieme partie l'auteur identifie les composantes de la demande pour ce marche afin de preciser son niveau actuel. Il ne reste ensuite qu'a tirer les conclusions qui s'imposent, ce que fait Colbert en peu de mots. Les trois categories de theatre etablies pour cette etude sont les compagnies institutionnelles, Ie Jeune Theatre et Ie theatre d'ete. Il ressort clairement des chiffres fournis que Ie theatre institutionnel tient mieux Ie coup que les autres. Quoique l'auteur ne nous Ie dise pas, cela semble dii aune demarche plus pragmatique de la part de ces compagnies etablies, leur nombre etant reste a peu pres fixe pendant une periode ou les nouvelles troupes foisonnent malgre les dures conditions economiques que connait Ie pays. Les institutionnels ont su se serrer la ceinture, a preuve la baisse du nombre de leurs comediens (414 en 1977, 338 en 1980) par rapport a un nombre stable de productions (56 en 1977-8, 55 en 1979-80), tandis que la moyenne des spectateurs par representation tombe. La Jeune Theatre par contre passe de 51 troupes en 1977 11 88 en 1980 (ces chiffres comprennent les groupes pour adultes et pour enfants). Pourtant c'est dans Ie secteur du theatre d'ete que la croissance est plus frappante et la concurrence par consequent plus acharnee: de 22 en 1979, ces troupes passent a une centaine en 1981, cela sans aide exterieure, la plupart des compagnies d'ete n'etant pas subventionnees, HUMANITIES 485 a la difference des autres categories. nen est comme de la Ligue nationale de Hockey dans son ere de grand expansionnisme. Les parametres etablis, Fran~ois Colbert a vite fait de tirer les conclusions qui s'ensuivent. II y a actuellement saturation de ce marche theatra!. Pour qu'elle corresponde a l'offre, il faudrait doubler la demande: 'Le marche actuel devrait generer 1,4 millions d'entrees supplementaires; c'est-a-dire que l'on devrait augmenter Ie niveau des assistances du theatre institutionnel de 15% (passer de 70% a 80% de capacite), doubler les entrees du Jeune Theatre et quadrupler la clientele des theatres d'ete: soit 100000 + 320000 + 980000 = 1,4 millions de spectateurs' (p 70). au bien s'attendre aune augmentation massive des subventions municipale, provinciale, federale (solution improbable); ou bien doubler Ie prix des billets d'entree (solution inacceptable). Peut-etre faudrait-il penser surtout a des mesures actives pour reduire radicalement Ie nombre de compagnies evoluant sur Ie marche. Et Colbert de conclure: 'Une chose semble certaine: Ie marche ne peut admettre de nouvelles unitE's de production sans deteriorer encore la situation: Soit. Mais dans ce cas-Ia que faire des nouveaux diplomes des six ecoles de theatre au Quebec, qui produisent une soixantaine de nouveaux comediens, metteurs en scene, directeurs en herbe chaque annee? Que faire des troupes existantes? Comment proceder aune liquidation plus ou moins equitable des compagnies, et a base de quels criteres? En l'absence d'une politique concrete, faudra-t-i/ laisser faire a une sorte de darwinisme , au risque de voir disparaitre l'espece entiere? Fran~ois Colbert a savamment sonde l'etat actuel du patient: a d'autres de trouver la solution aux maux diagnostiques. Jacques Languirand, de son propre aveu, n'aurait jamais eu Ie sentiment d'etre 'bien integre dans Ie monde du theatre: D'autant plus difficile, done, Ie defi que se pose Monique Genuist qui, dans Languirand et l'absurde, vise justement a l'integrer ou tout au moins a situer son ceuvre dans l'evolution d'un certain theatre de langue fran~aise moderne. En partant d' Ubu roi elle nous achemine atravers les etapes connues de cette evolution, les theories d'Artaud, Ie theatre de Cocteau, Camus, Sartre, Adamov, Ionesco, Beckett. Le theatre de I'absurde en France 5'avere ainsi I'aboutissement tout naturel de traditions, de tendances et de theories qui, passees par Ie creuset de l'apres-guerre et son pessimisme pervasif, se cristalliserent vers 1950. Or c'est en 1949 que Languirand, muni de l'enthousiasme de ses 18 ans, arrive it Paris, tout epris de theatre. Inscrit a l'Atelier de Charles Dullin, i1 continuera pendant quatre ans afrequenter les milieux theatraux, assistant a des centaines de productions dramatiques dans la metropole. Quelles pieces, quels auteurs? Ceux et celles qui faisaient fureur a Paris it I'epoque: La Cantatrice chauve d'Ionesco en 1950, La Leron en 1951; Les Chaises du meme auteur et En attendant Godot datent de 1953. II est tout a fait naturel que les 486 LETTERS IN CANADA 1983 memes structures, la meme vision, 1a meme thematique servent ainspirer les premieres ebauches de ce jeune dramaturge qui, des son arrivee 11 Paris, s'etait efforce d'extirper chez lui tout ce qui pourrait trahir ses origines quebecoises, 11 commencer par I'accent. Definitivement de retour au Quebec en 1955, Languirand decide de se consacrer pour de bon II l'ecriture dramatique. Les cinq pieces majeures dont dependait sa reputation jusqu'll assez recemment sont signees pendant Ia periode 1955-61, et c'est it elles que l'etude de Genuist est consacree: Les Insolites, Le Roi ivre, Les Grands Departs, Le Gibet, Les Violons de l'automne. Etude incisive, analyse perspicace. Libre de tout systeme preetabli, l'auteur examine chaque texte, les critiques qu'il a suscitees, I'accueil qu'il a connu. Elle essaie ensuite de faire degager de chacune de ces pieces ses caracteristiques indiscutablement 'absurdistes' selon une definition precise , sans chercher d'abord, comme I'ont trop souvent fait les critiques de I'ceuvre de Languirand, des liens directs avec des auteurs particuliers. C'est une ceuvre qui n'.a jamais connu de veritable popularite au Quebec. Les Insolites, joues en 1956 et 1957, attirerent I'attention - fort mixte - des critiques mais, per~us comme etrangers 11 toute realite quebecoise contemporaine, ne semblent avoir touche aucune corde sensible. Le Roi ivre (1956 aussi) paralt II premier abord s'installer dans Ie Quebec de I'ere duplessiste, mais Ie protagoniste, 'despotique, cruel et debauche: s'apparente davantage aux personnages du Theatre de la cruaute d'un Antonin Artaud qu'aux figurants sur la scene provinciale. La piece passa apeu pres inaper~ue. Les Grands Departs, joues en 1958 II Perce, ensuite 11 Geneve, II Birmingham, 11 Londres (mais pas II Montreal) n'ont aucune dimension quebecoise, restant fideles aux traditions de Ia dramaturgie fran~aise d'avant-garde. Sans doute sensible aux critiques suscitees par son ceuvre jusque-lit, l'auteur decide de situer au Quebec sa prochaine piece, Le Gibet, etrennee par la Comec1ie Canadienne de Gelinas en 1958. Mais dans cet ouvrage qui aurait pu representer un tournant dans la dramaturgie de Languirand, etant Ie seul qui par son decor et ses personnages soit situe dans un contexte c1airement quebecois, Ie public montrealais ne sut se reconnaltre. Comme Ie souligne Genuist, 'II s'agit moins de I'exploitation du colonise quebecois que de l'homme absurde, incarne par Perplex: On n'est pas encore prets, sur les bords du Saint-Laurent, 11 ouvrir les bras 11 un genre dont Ie souffle, II Paris meme, devenait quelque peu court, fin 1958 .. . La derniere piece absurdiste de I'auteur, Les Violons de l'automne, s'ouvre au Theatre-Club 11 Montreal en mai '960, pour ne rester it I'affiche que deux semaines. Piece divorcee de toute realM quebecoise precise, elle est pourtant couronnee deux ans plus tard par Ie Prix du Gouverneur-General. L'auteur decide qu'il est temps d'essayer l'ouvrage sur une scene ou ses talents ont meilleure chance d'etre reconnus, II la Comedie de Paris. La, il fait four. lroniquement, la critique parisienne, HUMANITIES 487 unanime dans sa reaction, trouve les Violons desaccordes, vieux jeu, sentant trop Ie rechauffe. Trop avant-gardiste pour ses compatriotes, trop 'retarde' pour Paris, Languirand decide de tirer son epingle du jeu. Ce sera sa demiere sortie sous les armes de I'Absurde. Il ne faudrait pas conclure, semble-t-il, a la simple reaction d'une sensibilite froissee par 1'accueil re~u sur deux continents. La philosophie personnelle de notre auteur n'aurait cesse d'evoluer, se degageant peu a peu de celle des mages de I'absurde, presageant deja la direction esoterique qu'elle prendrait plus tard. Monique Genuist observe: 'Languirand , produit d'une education catholique traditionnelle, ne parait pas avoir pu faire completement corps avec 1'absurde. Nous serions meme prete Ii avancer 1'hypothese que Languirand n'a jamais tout Ii fait cesse d'eirecroyant' (p 151). Oucomme elleajoute plus tard, apparemmentsans malice, 'Languirand n'avait pas la vocation d'un echorche vif et il n'a pas vecu 1'angoisse, la cruaute, I'absurde jusqu'a en mourir comme un Artaud: Le dramaturge lui-meme avoue: 'Au fond, Ie theatre de I'absurde, toute cette epoque-Ia, etait tres importante pour moi. C'etait la periode des questions. Et maintenant j'ai trouve les reponses pour moi.' Malgre Ie pietre succes de son theatre, Languirand merite une attention particuliere de la part de I'historien, ne filt-ce qu'a cause de 1'echec qu'essuya sa tentative de greffer, sur Ie chetif arbre indigene, Ie bourgeon Ie plus vigoureux du theatre occidental de son epoque. Que cette tentative n'ait pas porte fruit, cela nous renseigne aussi sur l'etat des arts sceniques dans son pays natal, aux lueurs de sa Revolution tranquille. L'etude de Monique Genuist, solide, lucide, fera autorite. Elle se complete d'une entrevue revelatrice de l'auteur avec Languirand, tenue en octobre '979, et d'un inedit, L'Ecole du rire, comMie-ballet montee en 1958 et qui, lue aujourd'hui, evoque encore la nostalgie de cette epoque revolue. Un peu comme epilogue, nous apprenons que I'orientation mystique de Languirand, cristallisee sinon etayee par des experiences psychMeliques telles que c'EHait de rigueur pour les jeunes des annees 1960, se precise de plus en plus, jointe Ii un ideal de 'service aux autres' qui n'est pas sans rappeler un engagement de la sorte preconisee par maint auteur existentialiste. Faudrait-il resister ala tentation de voir dans un tel ideal et dans les ecrits de Languirand qui Ie refletent (La Voie initiatique, 1978; Mater Materia, 1980), encore un 'retard' de I'auteur par rapport Ii Paris, aMontreal ... et ala Jeune Amerique meme? La monographie de Renate Usmiani, seizieme de la serie 'Studies in Canadian Literature: releve un defi rendu encore plus difficile par Ie fait que son sujet continue - et comment! - Ii evoluer. Le but de Michel Tremblay est louable: l'auteur cherche une synthese des plus recents jugements critiques portant sur ce dramaturge, Ii laquelle elle contribue aussi un apport personnel. Aucune approche critique precon,ue, aucune grille preetablie: une structure diachronique fondee sur la conception - 488 LETTERS IN CANADA 1983 discutable - d'une certaine evolution 'From French-Canadian to Quebecois Theatre' (chapitre 1) dans laquelle elle essaie d'encadrer Tremblay, ensuite une description generale de son ceuvre (,Contexts of the Tremblay Opus'), suivie d'une analyse detailIee des principaux themes qui s'en degagent. L'enchainement des chapitres est clair et logique, une fois acceptes les criteres de base. Le premier chapitre constitue cependant I'une des principales faiblesses de I'entreprise. Dans sa tentative de situer I'ceuvre de Tremblay, Usmiani se croit obligee de decrire I'evolution de theatre francophone au Canada depuis ses origines. Elle ne reussit pas a sortir des tiedes resumes et des pales lieux-communs qu'on croyait exorcises ii jamais. Comme Leopold Houle I'avait deja affirme en 1945 dans son Histoire du theatre au Canada, comme I'ont bien demontre ensuite Jean Laflamme et Remi Tourangeau dans L'Eglise et Ie theatre au Quebec, il n'y a pas eu, pour les compagnies d'amateurs au dix-neuvieme siecle, 'harassment from the political authorities who suspected them of revolutionary and subversive activities' (p 6), a part Ie cas de la Mort de Jules Cesar de Voltaire, montee en 1839 par la suspecte troupe des Amateurs Typographes de Napoleon Aubin, lui-meme recemment sorti de prison. Sauf respect, Tit-Coq n'est guere 'the first genuinely French-Canadian play because in theme and language it reflected the reality of French Canada rather than that of the "mother country'" (p 1): que I'on relise Une partie de campagne de Pierre Petitclair, souvent jouee it Quebec apres 1856, ou La Conversion d'un pecheur de la Nouvelle-Ecosse d'Elzear Labelle (1868) ou il n'y a que Ie joual (et I'acadien) et dont les preoccupations n'ont rien ii faire avec la mere-patrie. Enfin, car il ne faut pas trop nous y attarder, les recherches d'un John Hare, d'un Jean-Marc Larrue sur Ie theatre a Montreal au toumant du siecle auraient du faire moderer les affirmations d'Usmiani quant a la difficile transition entre les theatres amateur et professionel, transition qui n'est certes pas 'attributable mainly to the achievements of two groups ... the Compagnons [de Saint-Laurent] and the drama division of Radio-Canada' (p 7). Heureusement, I'utilite de cette monographie ne depend pas de ce premierchapitre; aussi aurait-il pu en eire exclu. Les grands perimetres de I'ceuvre de Tremblay decrits, I'auteur en entreprendl'arpentage detaille. CommeelleIe souligne, Tremblay reussit, consciemment ou non, a conjoindre les grands courants du theatre des annees 1960 et a en faire une synthese brillamment originale. A larges touches, ces diverses couleurs nous sont depeintes et leur apport au canevas evalue. Comme il se doit, I'analyse detaillee commence par Les Belles-Sceurs. Avec une concision admirable, Usmiani raconte l'epopee de la piece, l'enthousiasme que suscita sa representation a Montreal en 1968, I'accueil hesitant des critiques devant la verdeur de son langage, les remous politiques causes par la decision d'exporter I'ouvrage a Paris OU il s'a!tira des louanges telles qu'aucune piece quebecoise n'avait connues HUMANITIES 489 jusque-lil. L'analyse du texte qui suit est attentive et detaillee, car elle represente la cle de voute de l'edifice critique que l'auteur veut construire. Usmiani souligne surtout sa composition musicale, passee inaper~ue trop souvent, et pourtant centrale a ce theatre. Elle definit trois voies principales que Tremblay explorera ensuite: celie de la rue Fabre, axee sur la famille et la 'maudite vie plate'; celie, etincelante, de la Main, illaquelle aspirent les traumatises de la rue Fabre; celie enfin de la transcendance personnelle vers laquelle tendaient inconsciemment tous ces personnages . Au grand risque de refaire Ie lit de Procuste, l'auteur dresse alors un schema inclusif pour illustrer une progression geometrique: Towards Mysticism Damnee Manon, Sacree Sandra Sainte Carmen de Ia Main Hosanna Trois Petits Tours Demain matin, Montreal m'attend La Duchesse de Langeais THE MAIN A toi pour toujours, ta Marie-Lou Bonjour, la, bonjour En pieces detachtes Les Belles-Soeurs THE RUE FABRE (Evidemment, il faut commencer a la base de cette pyramide et suivre la montee vers I'apotheose.) Hypothese interessante, a la lumiere de laquelle tout s'expliquerait. Ou presque. Tremblay se serait donne d'abord comme but de detruire les illusions nocives emanant de la conception quebecoise de la famille (ch 4: 'Debunking a Myth: Tremblay's Unholy Families'), pour s'en prendre ensuite au monde plus attirant de la Main (ch 5: 'Debunking a Dream: Grotesque Love and Monstrous Sexuality'). Ces ponts breMs, la nouvelle direction s'amorce: 'With Sainte Carmen de la Main, Tremblay's mystical tendencies, always present but often hidden beneath surface realism, finally come to the fore. Sainte Carmen de la Main and Damn'e Manon, Samie Sandra ... clearly represent a progression towards a more spiritual view of the universe and of human life' (p 109). D'ou Ie dernier chapitre qui doit servir de conclusion (il n'y en a pas d'autre): The Great Beyond: Mythopoeic Drama and Early Prose Narratives: Tout est dorenavant clair: Tremblay, comme Jacques Languirand, aura eu sa petite revolte. Ayant roule sa bosse un peu partout, Ie voila au pied de la montagne de Sisyphe: peut-elre Ie verra-t-on bientOt rentrer sagement dans les rangs ... Le merite - il est considerable - de cette etude sera de preter achaude discussion. Meme sans accepter toute la construction savante de I'edifice critique qu'eUe assemble, Ie lecteur saura gre a Usmiani des aper~us souvent fort originaux qui en illuminent chaque palier. Justement, iI y avait grand besoin d'une reestimation de cette oeuvre, y compris la partie 490 LETTERS IN CANADA 1983 non-dramatique. Et il Yavait besoin que cela se fasse en anglais, etant donne !'interet que provoque l'ceuvre de Tremblay hors Quebec. L'analyse de Renate Usmiani servira, nous I'esperons, de catalyseur pour une telle reevaluation. Un dernier mot sur la traduction anglaise du theatre de Tremblay. Usmiani la trouve peu satisfaisante: elle se sert donc de la sienne. Non sans risques evidemment, surtoutquand il s'agit de resonances multiples, et abase sexuelle: Ie 'palais des mille et une nuits humides' dont parle Sandra signifie plus que 'my palace of the thousand and one damp nights' (p 139). L'expression 'wet dream' n'est pourtant pas pour choquer de delicates oreilles anglosaxonnes; et Ie texte classique auquella citation se rapporte s'intitule The Arabian Nights en anglais. La langue de Mordecai Richler Ge pense aCocksure) possede plus d'un seul vocable ('tail') pour traduire Ie membre viril, pour la designation duquel Tremblaydeploie tant de virtuosite ... et Ie 'pompier' qui revient si souvent dans son langage si verdoyant est beaucoup plus qu'un simple 'fireman' ... Les collaborateurs aux Journal des savans, des sa parution en 1665, se plaignaient regulierement du manque d'index aux livres erudits qu'ils recensaient. Plus ~a change: voici encore trois etudes dont la consultation s'averera indispensable aux chercheurs presents et futurs, et aucune ne nous offre cette modeste commodite. Existe-t-il une etude portant sur Ie theatre quebecois depuis celie de Baudoin Burger qui comprenne une table alphabetique des ceuvres, des auteurs cites? (L.E. DOUCETTE) Pierre Gerin, Pierre M. Gerin. Marichette, Lettres acadiennes, 1895-1898, edition commentee Editions Naaman 1982. 302, illus Deux universitaires des provinces maritimes du Canada presentent, avec cet ouvrage, un commentaire etoffe et multiple de lettres publiees dans L'Evangeline de Weymouth Bridge, en Nouvelle-Ecosse, du 14 fevrier 1895 au 3 £evrier 1898. L'introduction tente de cerner Ie mythe 'Marichette: qui, selon les auteurs, concurremment avec toute une tradition acadienne, a fraye la route al'avenement de la desormais celebre Sagouine. La correspondance compte treize lettres de Marichette, deux de Pite, son pnHendu mari (lignes reproduisant Ie style et la fa~on de penser de l'epouse presupposee), et l'une d'un certain Marc. Toujours dans cet avant-texte, l'on nous devoile la thematique de I'auteur des lettres: preoccupations politiques et feministes (revendication du droit de vote - Ie 'souffrage' - des femmes, luttes entre conservateurs et liberaux, proclamation de la superiorite de la femme sur l'homme), Ie desordre social, les injustices, I'emigration de la jeunesse ...

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