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550 ANNE-MARIE PICARD Les Des-Astres de I'Amour ANNE-MARIE PICARD Julia Kristeva. Soleil nair: depression et melancolie Gallimard '987. 266. 82FF Commencer par Ia grandeur redemptrice de Ia douleur de I'exergue de Celine: 'C'est peut-etre ~a qu'on cherche a travers la vie, rien que cela, Ie plus grand chagrin possible pour devenir soi-meme avant de mourir.' Uy a, dans Ie demier livre de Julia Kristeva, 10 simplicite retrouvee de Ia parole pour h~ moigner de celle de la tristesse et de la melancolie qui depuis toujours a partie Iiee avec Ia philosophie. Car elle est parole qui dit sa propre mort, qui est 'lucidit~ ... metaphysique car on voit sans dire, on voH trop' Ie nan-sens de I'etre, I'absurdite des rapports, des liens. La douleur du melancolique est 'la face cachee de [s)a philosophie, sa soeur muette' (14). Cest dans Ie creux de I'entre-deux, dans Ie mouvement meme de]a relation qui soudain se fige avant que d'aboutir a I'autre, qu'H souffre et se tait. Mouvementpetrifie dans son envoi dialectique, car percevair me fait mourir. Julia Kristeva habite ses mots d/une mort dans I'ame et dit Ie. Elle ~crit bien I'amour, Julia. Apr"s Histoires d'amour (Gallimard '987, 266p), ce sont Lettres de mort. 'Melancolie: doublure sombre de la passion amoureuse,' autre versant, comme une reversibilite ineluctable du saleH. Et la semiologie kristevienne veut se faire science du 'degre a du symbolisme' et science des fragments amoureux de I'ecrilure et des eciats melancoliques de I'imagination. Julia Kristeva a Ia foi: 'i1 n'y a de sens que du desespoir.' Le deprime, lui, est 'un ath~e radical et morose' (15). L'artiste, seul, sait donner existence ala fiction de son mal 'mobilisateur' et Ie sublimer, dans un desaveu qui est erection 'du fetiche de roeuvre.' Kristeva se propose ainsi, par une archeologie psychanalytique/ semiologique, de retracer la representation de ce combat contre 'la demission symbolique' que livre I'artiste. Dans deux oeuvres souffrantes, Le Christ mort de Holbein et El Desdichado de Nerval, et dans I'ecrilure douloureuse de Dostoievski et de Duras, Kristeva dessine ce qui fait symptome, ce qui fait question et tente de fonder un savoir de la melancolie. Ene ira a1a recherche de cette anciennete endeuillee de marques traumatiques dans les signes textuels. LA PERTE DE L'OBJ E T Sa perspective freudienne est tracee: 'degager ce qui, au sein de I'ensemble melancolico-depressif, quelques floues qu'en soient les limites, releve d'une commune experience de la perte de ['objet ainsi que d'une modification des liens signifiants' (19). La melancolie, Ia d~pression s'ebaurne d'une lancinante presence d'une perte lointaine, OU je me suis perdue avec/dans l'autre cher. Souffrance en moi au lieu de la haine etlou du 'd~sir d'emprise' pour l'etre dechire de moL Simplifier un parcours tres complexe, au risque de prendre des raccourcis (iei LES DES-ASTRES DE L' AMOUR 551 impos~s): cet ensemble m~lancolie/d~pression (difficiles ad~partager), se situe au carrefour du biologique (utilisation efficace des anti-depresseurs) et du symbolique. Sa symptomatologie alteme entre inhibition/asymbolie et exaltation de la parole: du ralentissement a1'extinction totale, en passant par des phases f~briles qui ne sont que feux d'artifice 'd~vitalis~s,' caril n'y a plus de desirpour Ie langage, plus de desir pour Ie desir (voir notre deuxieme partie). Blessure narcissique innommable du moi primitif du deprime blesse par personne, par Tien, si ce n'est par sa prepre tristesse, 'ersatz d'objet auquel iI s'attache ... faute d'un autre' (22). Suicide-reunion avec l'impossihilite de I'amour condamne a Nre dans un ai11eurs, a n'etre que promesse: Ie depressif croit etre desherite d'un supreme bien, d'un irr~pr~sentable, irrempla~able par un objet erotique qui est toujours decevant, toujours poursuivi, caT il est endeuille de la Chose. La Chose, c'est 1'~lan vital, ce qui est effort et qualite, pulsion de vie donc (Eros, ce qui lie), commencement de la saisie de l...

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