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Reviewed by:
  • La vie littéraire à la toise by Björn-Olav Dozo
  • Karim Hammou
Björn-Olav Dozo. - La vie littéraire à la toise. Bruxelles, Le Cri, 2010, 187 pages.

L’ouvrage de Björn-Olav Dozo rassemble une série de travaux sur la vie littéraire belge de la première moitié du XXe siècle. Outre des résultats empiriques significatifs, La vie littéraire à la toise présente une réflexion stimulante sur la constitution d’une base de données et l’usage des méthodes quantitatives en analyse littéraire. L’une des originalités majeures de ce livre est sans doute la méticulosité avec laquelle il accompagne pas à pas le lecteur dans chaque étape d’une recherche collective au long cours, n’éludant ni les difficultés ni les limites des analyses engagées. De ce point de vue, et au-delà de la seule discipline littéraire, Björn-Olav Dozo offre une introduction de qualité aux méthodes quantitatives en sciences humaines et sociales.

La vie littéraire à la toise se divise en trois parties. La première est consacrée à ouvrir le « laboratoire » qui a permis de construire les résultats déployés dans les deux parties suivantes. Elle illustre l’ambition didactique et réflexive de l’ouvrage. Cette partie présente la base de données à vocation à la fois patrimoniale et scientifique du Collectif interuniversitaire d’étude du littéraire (CIEL), en partie disponible en ligne (http://www.ciel-litterature.be), et précise les questions auxquelles se confronte toute entreprise, individuelle ou collective, de constitution d’une base de données. Sur quelles sources s’appuyer ? Quel degré de standardisation des données privilégier ? Comment composer avec le caractère lacunaire de certaines informations sans repousser sans cesse l’exploitation de la base de données ? Autrement dit, cette première partie offre des clefs pour comprendre les analyses qui suivent, mais aussi pour saisir certains enjeux de ce type de démarche scientifique. Elle se conclut sur une étude de cas, illustrant l’ambition du projet : contribuer à ériger la statistique en science auxiliaire des études littéraires. À l’aide d’une analyse factorielle des correspondances multiples (ACM), l’auteur interroge le rôle de l’Académie royale de langue et littérature française de Belgique dans la vie littéraire belge, et démontre les corrélations entre les conceptions successives de la littérature défendue par l’Académie et l’évolution du recrutement social de ses membres. Il prend la peine de préciser chaque étape de l’ACM, facilitant l’accès au raisonnement suivi pour les lecteurs non familiers de cette méthode.

La deuxième partie explore la question de l’inscription professionnelle des écrivains belges francophones. Au moyen de tris croisés et d’ACM, elle met à l’épreuve la thèse fréquente en histoire littéraire d’une domination des juristes dans la vie littéraire belge. Cette représentation, liée à la proximité au XIXe siècle entre les cursus universitaires de droit et de lettres, se révèle peu fidèle à la réalité de la vie littéraire belge au XXe siècle. Les métiers du droit déclinent, tandis qu’un nombre important d’écrivains soutiennent leur engagement dans la vie littéraire par une carrière dans l’enseignement. Aux côtés de la profession d’enseignant et des métiers du droit, le journalisme apparaît comme « une activité de compromis efficace pour exercer sa plume » (p. 73). Une seconde étude vise à construire un portrait statistique de cet écrivain-journaliste. L’écrivain-journaliste type est un homme et, s’il est tourné vers Paris en matière d’édition littéraire, sa pratique journalistique s’inscrit dans le contexte belge. Massive, puisqu’elle concerne plus d’un écrivain sur trois dans la première moitié du XXe siècle, la pratique du journalisme apparaît cependant comme une activité épisodique, souvent adossée à une carrière dans l’enseignement. Ces résultats ouvrent sur deux hypothèses : l...

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