Au chic resto pop – le direct émancipateur

JOHN KRISTIAN SANAKER Au chic resto pop Ie direct emancipateur Apres Au chic resto pop, je sais que pour chaque film il me faut trouver Ie comment, 1a fa~on qui va exprimer la totalite ... d'un etre, comme une entrevue ne peut pas Ie faire, et comme la chanson permettait achaque personnage d'etre entier.J Au chic resto pop (1990) de Tahani Rached est un film avec et sur une equipe d'ex-assistes sociaux qui ont cree leurs propres emplois en organisant un restaurant populaire dans Ie quartier de Hochelaga/Maisonneuve aMontreal. Quand j'ai vu Ie film pour la premiere fois lors des Rendez-vous du cinema queoecois, rai ete tout de suite conquis, et cet article va, je l'espere, satisfaire un besoin ressenti depuis: savoir pourquoi. Aujourd'hui, critiques et historiens ont deja donne au film de Rached une place d'honneur dans Ie cinema quebecois. Selon Louise Carriere, c'est un film qui Ja toutes les chances de devenir un classique du cinema quebecois,'2 un film representant Jtoute une culture cinematographique depoussieree, celIe du nouveau documentaire rendue amaturite';3 pour Pierre Demers, c'est un film qui nous 'reconcilie avec une forme de cinema d'animation sociale qu'on croyait passee date al'ONF.'4 Au chic resto pop est un film qui est loue pour ses qualites propres, mais qui en meme temps, acause de ces memes qualites, nous invite aussi a reflechir sur la tradition du documentaire au Quebec. Dans cet article je me propose surtout d'etudier Au chic resto pop en Ie situant par rapport au cinema direct traditionneP Vne telle lecture mettra surtout en evidence des qualites du film de Tahani Rached qui comportent une solution a certains problemes methodologiques du direct classique. Les specialistes sont d'accord pour considerer Ie cinema direct non pas comme une ecole bien definie ou comme un cinema particulier, mais plutot comme June technique, une methode, de nouvelles possibilites qui modifient Ie tournage,'6 phenomenes dec1enches par un certain nombre d'innovations techniques. Le nouveau materiel portable et la possibilite d'une prise de son synchrone, permettaient a l'equipe filmante de s'approcher avec souplesse du monde a filmer, alors que l'equipement ancien obligeait les filmeurs soit as'installer en esperant que Ie monde a UNIVERSITY OF TORONTO QUARTERLY, VOLUME 63, NUMBER 4, SUMMER 1994 AU CHIC RESTO POP 639 filmer viendrait vers eux, soit as'organiser et aorganiser Ie monde de fale y 646 JOHN KRISTIAN SANAKER ait d'autres contextes historiques plus inb~ressants ~t plus pertinents. Cependant , pour l'observateur distant du cinema quebecois que je suis (en Norvege), la disponibiliM des films aussi bien que de la litterature est limitee. 6 Michel Euvrard et Pierre Veronneau, 'Le direct,' dans Les Cinemas canadiens, ed P. Veronneau (Paris/Montreal: L'herminier 1978), 87. 7 Nanook of the North (Nanook l'esquimau), Robert Flaherty, 1922. 8 Cinema d'ici, ed A. Lafrance (Ottawa: Lemeac 1973). 9 EUVTard et Veronneau, 94. 10 Robert Daudelin, 'La Rencontre direct - fiction,' dans Les Cinemas canadiens, 113. 11 On n'est guere etonne d'apprendre que Perrault avait d'abord pense faire un film de fiction; puis il avait pense aun documentaire traditionnel, et ce n'est qu'apres l'intervention de Michel Brault et Marcel Carriere que Ie film a eu la forme que Yon connalt. Gilles Marsolais, 'Michel Brault,' Cineastes du Quebec 11, (Montreal: Conseil quebecois pour la diffusion du cinema 1972). 12 Voir aussi cette remarque d'Alexis Tremblay: 'Ces gars des vues, au fond, iIs vous font dire ce qu'ils veulent' (cite par Real La Rochelle dans Cinemas du Que1Jec au fil du direct [Liege: Yellow now 1986], IS), remarque qu'on peut comparer avec cette declaration de Perrault lui-meme sur tusage qu'il pourra faire de Tremblay: 'Alexis m'avait parle de tout. II avait un caractere encydopedique et prophetique. II ne me restait qu'a en faire bon usage ... sans encore savoir lequel.' Pierre Perrault, ed Alain Berson (Montreal: Conseil quebecois pour la diffusion du cinema 1970), 16. 13 Francine LaurendeauJ Le Devoir, 13 octobre 1990. 14 Gerard Boulad, CineMag, 30 aoat 1990. 15 Robert...