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351 Vitalité et pluralité : le cinéma français au féminin Françoise Ravaux-Kirkpatrick University of Richmond et Peter S. Kirkpatrick Virginia Commonwealth University Les films des femmes sont souvent différents : ils provoquent une rupture dans nos habitudes de consommation. Le sujet, le rythme, l'image même, le montage enfin, créent une vision nouvelle dont le public n'est pas encore coutumier, et qui pourtant est déjà la nôtre. Insolites, déroutants? Les films de femmes bouleversent notre conformisme et nos habitudes de pensées. Manifeste du CollectifMusidora, 1974 C'est en 1896 qu'Alice Guy, la pionnière des femmes cinéastes, réalise sa première « bande », La Fée aux choux, en fait le premier court métrage français. Les réalisatrices françaises seront, dès les débuts du cinéma, animées d'une même volonté : gagner droit de cité dans un monde professionnel aux pratiques corporatistes et à domination masculine. Pourtant, si elles sauront se faire reconnaître, ce n'est pas en faisant éclater les cloisonnements propres au monde du cinéma ou en s'emparant des outils de production de la machine cinématographique, structurée et accréditée par un pouvoir à dominance masculine. Elles s'imposeront en faisant leurs preuves aux différents échelons de la création et de la production cinématographique et même, pour certaines, en créant leurs propres stmetures de travail. Ainsi, nombre de femmes sont-elles passées du métier d'actrice, de photographe de scène, d'écrivain, de scénariste, de scripte ou d'assistante de metteurs en scène masculins, à celui de réalisatrice. D'autres ont créé leurs maisons de production pour assurer le financement de leurs films. C'est le cas des deux pionnières Alice Guy et Germaine Dulac, mais aussi de Jacqueline Audry après la Deuxième Guerre mondiale, puis d'Agnès Varda, Vera Belmont et Yannick Bellon dans les années 1950 à 1970 ; la toute première, Alice Guy, a même créé son propre studio. De plus, si elles se sont imposées, ce n'est pas en se contentant de dénoncer les valeurs et les rôles sociaux prônés dans les films de réalisateurs masculins, ou en attaquant les modes de représentation reconnus. Elles se sont fait leur place en apportant une vision spécifique, plus attentive et intimiste, de la réalité quotidienne et des comportements humains. Finalement, même si certaines d'entre elles refusent l'appellation de « cinéma de femmes » pour leurs œuvres, lui préférant celle de 352FRENCH AND FRANCOPHONE WOMEN cinéma à'auteur, c'est aussi en inventant un langage cinématographique particulier, en rapport avec leur propos intime et existentiel qu'elles se sont distinguées des cinéastes masculins. Notre présentation de l'apport des réalisatrices françaises comportera deux sections. La première retracera la progression des cinéastes françaises pour s'affirmer dans le monde du cinéma français à prédominance masculine, en insistant sur les événements qui ont permis de lever certains des obstacles à leur avancement et d'arriver à la consécration de leur talent. Dans la seconde partie, nous explorerons le cinéma féminin des vingt dernières années, caractérisé par sa vitalité et son état de continuelle gestation, non plus en suivant une approche chronologique, mais plutôt thématique, plus appropriée à son objet. Nous évoquerons également l'aspect de la réception des films en considérant la transformation, ou la formation, du regard du spectateur, invité par les femmes cinéastes à une autre sélection du réel à explorer, à un autre rapport au monde, ainsi qu'à une nouvelle perception de la femme représentée. Un index des films de réalisatrices françaises et une bibliographie, placés à la fin de l'article, serviront de répertoire commun à ces deux modes de présentation de la création cinématographique féminine française. I. Chronique d'une consécration : le cinéma féminin français de 1896 au...

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