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  • On the Sounds of Haitiexcerpt from La belle amour humaine (2011)
  • Lyonel Trouillot (bio)
    Translated by French by Laurent Dubois (bio)

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Arbre Garconet Eclopé. Mixed media on aluminum. 60 × 60 cm. ©2004 Edouard Duval-Carrié.

. . . ici où la vie a peur du silence. Ici, si au réveil on ne s’est pas préparé à partir au combat, on n’a pas la vie devant soi. Le pain, ça se chasse comme le gibier, et vu qu’il n’y en a pas pour tout le monde, le bruit a remplacé l’espoir. Ce que tu as vu a l’aéroport, vingt porteurs pour une seule valise qui baragouinent dans toutes les langues, c’est rien. Attends de voir le centre ville. Il nous faudra le traverser, patauger dans le bruit jusqu’à la gare du Nord. Les étrangers souvent y perdent leurs oreilles, à entendre malgré eux, égaux en droits dans le vacarme, les choses, les bêtes et les humains. Les casseroles. Les pots d’échappement. Les cris qui marchandent tout, des élixirs aux antibiotiques, en passant par les crèmes éclaircissantes et les pilules qui font grossir. Les fonctionnaires de la mairie qui chassent les marchandes de céréales, de fruits et de légumes, installées sur la chaussée. Les porte-voix des volontaires de la santé publique, qui vantent les vertus du lait maternel et du lavage des mains. Nul ne peut écouter tant de bruits en même temps, qui s’opposent, se contredisent, te crèvent les tympans pour fourrer dans ta tête l’illusion du mouvement. Les queues devant le bureau de l’Immigration et le ministère des Affaires sociales, les menaces des agents de sécurité et les réactions de la foule, va te faire voir, cela fait des semaines qu’on attend. Les taxis-motos qui se faufilent entre les voitures. Les cambistes qui te vendent de la fausse monnaie au taux du jour et mettent leurs billets devant la gueule du passant pour attirer la clientèle. Les agentsde la circulation qui font la causette avec leurs maîtresses au milieu [End Page 8]

In this early passage from Lyonel Trouillot’s recent novel La belle amour humaine, a Haitian guide, who has just picked up a European visitor at the airport, offers this typology of the sounds of Port-au-Prince.

… here, where life is afraid of silence. Here, if you wake up unprepared to go into battle, there is no life ahead. Bread is hunted like prey, and since there is not enough for everyone, noise has replaced hope. What you saw at the airport, twenty porters for a single suitcase, babbling in every language, that’s nothing. Wait until you see the city center. We’ll have to cross it, wade through the noise until we get to the Northern station. Despite their best efforts, foreigners often lose their sense of hearing as they confront things, animals, humans all equal in their right to make a din. Pots and pans. Mufflers. Shouters selling everything, from elixirs to antibiotics by way of skin-lightening cream and pills that make you fat. Bureaucrats from the mayor’s office chasing away market-women selling grains, fruits, and vegetables on the sidewalk. The speeches of volunteers from the Public Health department celebrating the virtues of mother’s milk and hand-washing. No one can listen all at once to so much noise in opposition, in contradiction, puncturing your eardrums to stuff your head with the illusion of movement. The lines in front of the Immigration Office and the Ministry of Social Affairs, the threats of security agents and the reactions of the crowd—go screw yourself, we’ve been waiting for weeks. Motorcycle-taxis threading their way between cars. Money-changers who sell you counterfeit money at the precise daily rate and wave their bills in the faces of passersby to attract clients. Traffic police chatting with their mistresses in the middle of the street. Pedestrians who run into each other and argue about whose [End Page 9] de la rue. Les piétons qui se rentrent dedans...

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