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French Forum 28.2 (2003) 120-122



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Sydney Lévy. Francis Ponge. De la connaissance en poésie. Paris: Presses Universitaires de Vincennes, 1999. 141 pp.

La lecture de Ponge proposée par Sydney Lévy insiste sur les qualités cognitives de Ponge et s'appuie sur ses revendications épistémologiques. Cet ouvrage nous invite principalement à repenser le projet pongien sous l'angle de la fabrication aléatoire du réel, de la poïésis, de la connaissance. Selon la thèse proposée, en effet, si Ponge privilégie la matière du poème et le matériau brut de la langue, c'est pour [End Page 120] révéler ou mettre en oeuvre la connaissance du singulier. Les lieux communs de la poétique de Ponge tels que le mollusque, la figue, l'huître ou l'escargot se détachent en fin de compte du biologique selon Lévy qui écarte toute lecture naturaliste de Ponge: «Il ne suffit pas de mimer l'objet ou de restituer son épaisseur. Il faut aussi reproduire un peu de sa spécificité, de sa singularité.» (85). L'analyse proposée ici au travers d'une lecture minutieuse du corpus de Ponge démontre à juste titre que son oeuvre s'apparente à une véritable «science du singulier.» Cette réflexion sur «la singularité du réel» engendre aussi une nouvelle conception de l'expérience de la chose et donc de la représentation: «c'est donc en inventant contre le langage, des moyens d'exprimer le singulier que Ponge inventera des moyens de connaissance du singulier. C'est là que se croisent le poïétique et l'épistémologique.» (70).

Fidèle à la pensée «en boucle» de Ponge qui s'attache à lier la poésie au poétique, Lévy réfute lui aussi toute approche linéaire ou chronologique d'une oeuvre marquée selon lui par une seule dimension, «la rage» de la connaissance: «Et si Ponge se distingue de ses prédécesseurs, c'est pour pousser plus loin ce que Mallarmé avait inauguré: une théorie de la connaissance.» (14). En posant les conditions et les cheminements qui mènent à cette connaissance, Lévy ouvre ainsi des perspectives nouvelles et inédites sur l'œuvre pongienne de même que sur le statut de l'objet dans la modernité.

Par ailleurs, cet essai démontre comment l'expérience du texte pongien introduit un véritable paradoxe dans son appréhension du réel: ce paradoxe relève non seulement du déjà vu mais il invente par ailleurs de nouvelles formes et de nouveaux moyens inaccoutumés d'accéder à la connaissance. C'est dans cette perspective que Sydney Lévy soulève une problématique fondamentale et décisive chez Ponge: dans quelle mesure Ponge met-il en oeuvre une «science des impressions?»

Cette lecture concise de Ponge ouvre assurément un nouveau volet dans notre approche de Ponge. Car, en effet, il s'agit désormais de replacer le scientifique dans le poétique et de discerner comment ce «savoir» mène à la compréhension de nouvelles formes. Dès lors, l'objet, par ses fonctions cognitives, joue un rôle central dans la connaissance en ce sens qu'il contient «une temporalité, un passé, un avenir, un écoulement, bref un devenir.» (114).

Cette analyse approfondie et minutieuse dévoile les stratégies textuelles [End Page 121] de Ponge qui mettent en oeuvre un véritable «processus de confusion» (116). Ces stratégies actualisent le récit et impliquent le lecteur qui, à la recherche de la «qualité différentielle de l'objet», est lui aussi en train d'inventer le texte: «les textes ne permettent pas de nous approprier l'objet; ils resteront toujours des textes destinés à être lus et les objets destinés à être mangés, manipulés ou observés.» (135).

Ce travail approfondi sur les caractéristiques différentielles de la chose ouvre la voie à de nouvelles considérations interdisciplinaires qui interrogent les modes de croisement du...

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