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Reviewed by:
  • The Ideas of Man and Woman in Renaissance France. Print, Rhetoric, and Law
  • Sylvie Perrier
Warner, Lyndan – The Ideas of Man and Woman in Renaissance France. Print, Rhetoric, and Law, Farnham (G.-B.) et Burlington (É.-U.), Ashgate, 2011, 263 p.

C’est à un changement de perspective sur les idées exprimées au XVIe siècle à propos de la nature humaine, et plus spécifiquement des deux genres qui la composent, que nous invite Lyndan Warner dans ce livre important, à la méthodologie rigoureuse. Elle y propose une confrontation des textes liés à la célèbre Querelle des femmes avec ceux portant sur la dignité et la misère humaines pour démontrer qu’ils partagent un style commun basé sur une rhétorique qui consiste à argumenter les deux côtés d’une question, démarche qui est aussi l’apanage des plaidoiries d’avocats de l’époque. L’auteure nous convie ainsi dans l’univers mental des élites lettrées de la Renaissance française et en profite pour remettre en question les interprétations féministes de la Querelle, trop centrées sur un corpus limité de textes insuffisamment contextualisés selon elle. Warner désire sortir de l’impasse misogynie/féminisme et ouvrir plus largement le questionnement sur les conceptions de l’homme et de la femme au XVIe siècle.

Il ne s’agit pas d’une étude littéraire, mais plutôt d’une histoire socioculturelle des idées où tout le cycle de production, de distribution et de consommation des textes est pris en compte. Le chapitre introductif insiste sur la transformation de la société française au début de la période moderne et le défi que posait aux familles l’expansion rapide de l’appareil royal, en particulier les offices et professions juridiques. La formation des [End Page 459] jeunes hommes issus des élites était d’abord fondée sur l’apprentissage de la rhétorique humaniste, puis était complétée par l’obtention d’un diplôme de droit, ce qui ouvrait un accès aux carrières juridiques. Ce n’était toutefois pas suffisant pour garantir une mobilité sociale ascendante car les qualités personnelles et un mariage avantageux étaient des leviers sociaux importants pour ces jeunes hommes, d’où l’intérêt pour une littérature soupesant la valeur des hommes, des femmes et de la nature humaine en général. Ces hommes et leurs familles formaient le marché visé par les imprimeurs et mar- chands libraires parisiens et lyonnais qui distribuaient les textes portant sur la dignité et la misère humaines et les textes de la Querelle des femmes, souvent à l’intérieur des mêmes volumes, comme le montre le chapitre 2. Comme c’est souvent le cas dans ce type d’études, les aspects production/distribution des œuvres sont mieux couverts que la dimension de la consommation/réception des textes, et l’auteure ne cache pas les difficultés méthodologiques – là et au chapitre 7 – liées à la faible quantité de sources disponibles sur les acheteurs de livres et les habitudes de lecture. Elle exploite habilement l’exemple de Gilbert Hodic, un notaire du Châtelet de Paris, qui possédait, en plus d’un large corpus juridique, un bon nombre de textes de philosophie morale. Lors de l’inventaire après décès, sa veuve, Geneviève Bureau, déclara posséder des livres tant dans leur demeure parisienne que dans leur maison de campagne, ce qui fait dire à Warner que les marchands libraires ne pouvaient ignorer ce marché féminin.

Les chapitres suivants analysent le contenu des textes sur la dignité et la misère humaines (chap. 3) et ceux liés à la Querelle des femmes (chap. 4) en se concentrant sur les procédés rhétoriques utilisés, notamment les contradictions (pro et contra) et les paradoxes, ainsi que les références et lieux communs qui parsèment ces œuvres. À partir de cette comparaison, l’auteure avance que les textes de la Querelle ne forment pas un corpus isolé mais se rattachent au domaine...

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