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Reviewed by:
  • Fiction et cultures
  • Ana Delia Rogobete (bio)
Françoise Lavocat et Anne Duprat, éds. Fiction et cultures. Paris: Société française de littérature générale et comparée, 2010. Collection « Poétiques comparatistes ».

Le recueil Fiction et cultures, dirigé par Françoise Lavocat et Anne Duprat, se propose une approche comparatiste de la notion de fiction. Dans sa préface au livre, Jean-Marie Schaeffer note que la fiction est un terme clé des études littéraires souvent employé comme « passe-partout pour accéder à l'essence ultime de la littérature ». C'est pourquoi, dans le présent volume les auteurs, spécialistes dans des champs variés de la littérature, essaient de surprendre les caractéristiques de la fiction dans des périodes et littératures différentes qui vont du monde grec antique, en passant par la littérature médiévale arabe et hébraïque, jusqu'à l'extrême contemporain des industries de divertissement.

Françoise Lavocat explique dans son Introduction que le but du livre n'est pas de proposer une nouvelle définition de la fiction, mais de rendre compte des diverses pratiques qui relèvent de la fictionnalité, des relations pragmatiques qui lient la fiction aux notions telles que réalité et vérité et aussi d'offrir au lecteur un panorama des principales approches du concept de fiction tout en intégrant des visées anthropologiques et esthétiques. En ce sens, l'auteur identifie trois grands modèles fictionnels qui se dégagent des différentes approches de ce recueil. Le premier, que Lavocat appelle « une conception moniste de la fiction » concerne le texte de Claude Calame sur la Grèce antique, celui de Rukmini Bhaya Nair sur l'Inde traditionnelle ou l'essai de Maya Boutaghou sur la culture arabe moderne. Ce premier usage se caractérise par une indistinction des pratiques culturelles en tant que produits de l'imagination.

Le deuxième modèle proposé est le modèle « dualiste » qui oppose dans certaines cultures la langue littérale à la langue métaphorique, la prose à la poésie, la parole vraie à la parole mensongère et qui concernerait les textes de Daniel Struve sur le Japon classique, celui de Revital Refael-Vivante sur la littérature hébraïque médiévale ou celui de Hachem Foda sur la poésie arabe du Moyen Âge. D'autres textes sur les pratiques fictionnelles en Afrique ou même dans le roman sud-américain relèvent de cette même conception.

L'approche triadique est un troisième modèle proposé, conformément auquel la fiction ne relève ni de la vérité, ni du mensonge. Le produit de l'imagination acquiert ainsi un statut singulier, comme le montre Anne Duprat à propos des fictions européennes du XVIe et XVIIe siècle. [End Page 942]

L'article de Claude Calame sur le monde grec peut, sans doute, être classé aux côtés d'autres textes qui proposent une interprétation « moniste » de la fiction. Mais il a, cependant, ceci de particulier qu'il cherche à entreprendre, de façon simultanée à une archéologie (savante) des récits mythologiques helléniques, une analyse (également savante) de notre propre paradigme littéraire, « moderne » puis « postmoderne ». Une telle méthodologie, ouvertement comparatiste, aboutit à son tour à une double conclusion : d'une part, à l'impossibilité de saisir rétroactivement, à l'aide de notre catégorie contemporaine de fiction, le récit mythique ancien, structurellement lié à une praxis non seulement poétique, mais aussi politique. Et, d'autre part, au moyen même de cette analyse historique « avisée », non naïve, à la critique de ce qui serait alors notre propre mythe littéraire : l'idée très répandue dans le milieu de la critique d'une autoréférence absolue du langage à lui-même.

Or, dit Calame, voici ce qui est peut-être la leçon des Grecs aux modernes : du fait même de l'utilisation du langage - support toponymique et pragmatique -, aucun récit ne peut se passer de références au réel, qu'il porte sur...

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