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Reviewed by:
  • Mont Plaisant
  • Moïse Ngolwa
Nganang, Patrice. Mont Plaisant. Paris: Philippe Rey, 2011.
ISBN 9782848761770. 512 p.

Poète, romancier et essayiste, Patrice Nganang enseigne la théorie littéraire à la Stony Brook University aux États-Unis. Jouissant d’une reconnaissance, il a obtenu le prix Marguerite Yourcenar en 2001 et le Grand Prix de littérature [End Page 283] d’Afrique noire en 2003 pour son roman Temps de chien (2001). Il est aussi auteur de deux autres romans: La Promesse des fleurs (1997) et La Joie de vivre (2003) et des essais: Manifeste d’une nouvelle littérature africaine (2007) et La République de l’imagination (2008).

Dans Mont Plaisant, roman publié en 2011, la narration est prise en charge par Bertha, une jeune doctorante en histoire vivant aux États-Unis, dont les recherches portent sur les origines du nationalisme camerounais. À l’occasion d’un voyage au Cameroun, elle fait la connaissance de Sara, une nonagénaire, à Nsimeyong, un quartier de Yaoundé où vivent Sara et Arouna, le guide qui mène l’étudiante chez la “doyenne” (26).

La coïncidence du nom de Bertha avec celui de la matrone de Sara amène celle-ci à rompre son mutisme de “quatre-vingts ans” (27) pour raconter l’histoire de sa vie. Âgée de neuf ans lorsqu’elle fut arrachée à sa mère par les hommes de Charles Atangana, chef supérieur des Ewondo, Sara a été offerte au sultan Njoya exilé de force par l’administration française à Mont Plaisant, une résidence de Nsimeyong devenue un champ de ruines. La matrone chargée de l’initier au statut de femme du sultan avait reconnu en Sara son fils Nebu disparu. Elle lui avait aussitôt attribué le nom du défunt, puis elle l’avait travestie en garçon. Pour arrêter la croissance des seins de Sara, la matrone repassait sa poitrine à l’aide de cailloux chauds en complicité avec la principale intéressée “heureuse d’avoir trompé l’omniscient sultan Njoya” (57).

La vie de Sara au Mont Plaisant fut marquée par une attention inconditionnelle de sa matrone qui lui racontait la vie de Nebu, des détails de son épopée singulière, de sa vie en pays Bamoum, de ses pérégrinations à Foumban. Sara, dont “la mémoire est une archive” (202), se souvient de sa formation, de sa présentation par sa matrone à certaines personnalités proches de Njoya, de la vie dans les couloirs du Mont Plaisant et surtout du soir où elle avait sauvé la vie de Njoya en allant chercher de l’aide, alors que le sultan venait de s’effondrer. Cependant, la vieille femme avait toujours ignoré qui était réellement son père.

Grâce aux recherches effectuées par l’étudiante, Sara apprend finalement que son géniteur se nomme Joseph Ngono. Il enseignait l’ewondo à Berlin, ville où il avait été sauvagement battu, puis laissé mourant à cause de la couleur de sa peau. Cette raclée était l’œuvre d’une bande de “voyous” dont le leader Adolf Rudolf, surnommé “Adolf le moustachu” (170), nourrissait une “illusion plutôt démentielle” (273) de dominer le monde. Réfractaire à la colonisation de son pays, le père de Sara était devenu, après son retour au Cameroun, un “agitateur politique” (134). Il avait péri dans un incendie qui avait ravagé la cacaoyère de Charles Atangana.

Sara vivait sous l’ombre de Njoya qui avait fini par faire du visage de la petite fille le modèle de ses dessins. La véritable identité de Sara est révélée au cours d’une promenade dans le centre-ville de Yaoundé. Assis à bord de sa Cadillac en [End Page 284] compagnie de Sara, Njoya et ses deux accompagnateurs Nji Mama et Ibrahim, Atangana l’avait appelée Sara au lieu de Nebu, nom sous lequel elle était connue de tous à Mont Plaisant, à la surprise générale de ces “sommités” (489) étonnées que “les polygames qui entouraient Sara” (487) au Mont Plaisant et les six cent quatre-vingt et une épouses de Njoya n...

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