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Reviewed by:
  • Le Chevalier de Mouhy, Bagarre et bigarrure
  • Ioana Galler (bio)
Jan Herman, Kris Peeters et Paul Pelckmans, éds. Le Chevalier de Mouhy, Bagarre et bigarrure. Amsterdam: Rodopi, 2010, 242pp. 48€. ISBN 978-90-420-3094-7

Rares sont les dix-huitiémistes qui n’aient pas rencontré, à un titre ou un autre, le chevalier de Mouhy au cours de leurs recherches. Issu d’un colloque international organisé le 28 et 29 mai 2009 à Leuven et Anvers, le volume édité par Jan Herman, Kris Peeters et Paul Pelckmans fournit à tous ces publics un instrument de travail pour mieux appréhender la carrière (littéraire, mais pas seulement) du personnage, son esthétique, en se focalisant sur les fortunes diverses de ses textes et sur les liens qu’ils entretiennent avec la production romanesque des Lumières. Le travail de Françoise Weil sur les éditions des textes de Mouhy, l’analyse de ses deux premières traductions en Angleterre entreprise par Annie Cointre, tout comme le survol bio-bibliographique entrepris par Annie Rivara constituent autant d’apports à la redécouverte de cet écrivain de second rang, de la place et de son rôle dans la littérature et la civilisation du xviiie siècle. On regrettera toutefois l’absence d’une contribution sur Mouhy critique littéraire, et plus particulièrement sur son Abrégé de l’histoire du théâtre français, même si le choix de se focaliser sur sa production romanesque est amplement justifié par le poids du genre dans l’ensemble de son œuvre.

Au fil des articles, surgit la figure d’un romancier de tous les possibles: formels, auctoriaux, narratifs. La très intéressante contribution d’Ugo Dionne insiste sur la perception par Mouhy de la lecture des romans comme une expérience à part (surtout temporelle), qui lui fait tourner le dos aux efforts de cohérence entrepris pour miser sur un autre type de pacte avec le public. Les « étourderies du romancier » (67) s’expliquent ainsi dans la perspective d’une « poétique hyperromanesque » (84), qui se soucie moins du lien entre les différents épisodes que du plaisir qu’ils fournissent soit pris individuellement, soit en tant qu’ensemble qui n’a surtout pas la prétention de reproduire le monde (tout en se proposant de le figurer). Comme le montre également le survol bio-bibliographique entrepris par Annie Rivara, Mouhy peut être vu comme un véritable « professionnel » de l’écriture romanesque, capable d’en mobiliser tous les instruments pour captiver un public caractérisé par la curiosité et le goût de l’extraordinaire, tout en y trouvant « refuge devant l’échec d’une carrière et des ambitions d’une nature conquérante mais vaniteuse et chimérique » (15). La focalisation de trois articles (ceux d’Yves Citton, d’Emmanuelle Sempère et de Françoise Dervieux) sur Lamékis, le roman sans doute le plus caractéristique de l’imagination débridée de l’auteur, vient conforter cette image d’un écrivain qui maîtrise un genre jusqu’à le pousser à ses limites, celles où il « démystifie les mythes tout en les alimentant » (171). [End Page 748]

Comme le Traité des mouches secrètes de Patrick Wald Lassowski, pratiquement tous les articles semblent portés par une volonté de réévaluer les mérites d’un auteur dont l’intérêt aurait été sous-évalué par la critique traditionnelle, et qui « parle » autrement aux modernes que nous sommes. Pour René Démoris, « peut-être serait-il temps de se demander si la critique et le silence dont est victime Mouhy ne tiennent pas aussi au fait qu’à choquer le bon goût, il touche à des sujets plus ou moins interdits dans des formes qui sont pour nous, parfois, d’une étrange modernité » (122). Son analyse de la sexualité et du tragique dans La Mouche ou la mise en relief, par Jean-Paul Sermain, d’une « tentative d’exprimer ce qui échappe à l’expression » (121) dans Les Mémoires d’Anne-Marie de Moras participent de cette volonté de réhabilitation. Naît toutefois à la lecture de ces réhabilitations le sentiment...

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