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  • Itinéraires intellectuels entre la France et les rives sud de la Méditerranée
  • Gaelle Corvaisier
Chaulet-Achour, Christiane, coord. Itinéraires intellectuels entre la France et les rives sud de la Méditerranée. Coll. Lettres du Sud. Paris: Karthala, 2010. ISBN 9782811103453, 360 p.

Initialement intitulé Traversées—Itinéraires intellectuels au XX esiècle—France, Maghreb, Machrek, cet ouvrage offre à ses lecteurs seize chapitres, chacun traitant d'un ou deux auteurs littéraires et/ou scientifiques partagés entre les différentes rives de la Méditerranée. Enseignante en Algérie jusqu'en 1993 et depuis en France, Christiane Chaulet-Achour, spécialiste de la littérature du Maghreb et du Machrek et des littératures francophones, propose avec cet ouvrage de suivre le parcours d'auteurs qui, comme elle, traversèrent les différentes rives de la Méditerranée tout au long du vingtième siècle. Ce recueil s'organise autour de deux grandes parties ("Foyers" et "Transversalités"), la première divisée en deux sous-parties ("le désert" et "l'Algérie"), chacune organisée chronologiquement selon les dates de naissance des auteurs traités.

Avec "Isabelle Eberhardt, pionnière et singulière" s'ouvre la première partie, intitulée "Foyers." Si le foyer est d'abord un lieu de résidence, c'est aussi une source de chaleur et de lumière, propre au désert d'abord évoqué. Le désert saharien évoque une spécificité géologique, mais souligne aussi l'intensité d'un espace ouvert et nomadique, qui devient point de convergence pour des auteurs soit de l'entre-deux (Isabelle Eberhardt), soit visiteurs (Théodore Monod et Jean-Marie Gustave Le Clézio) qui y trouvent et y puisent une inspiration forte d'engagement humaniste voire de spiritualité. La traversée du désert, expérience commune de survie, est spécifique à chacun. Si Isabelle Eberhardt y trouve une terre d'adoption dans laquelle elle va jusqu'à s'habiller en homme pour plus facilement s'y mouvoir, Théodore Monod y revient sans cesse découvrant et cataloguant nombreuses espèces végétales et minérales, tandis que Jean-Marie Gustave Le Clézio souligne le caractère transcendant de ces lieux qui envoûtent tout passeur dans un voyage d'abord livresque, puis de retour aux origines pour sa compagne d'origine marocaine.

La deuxième sous-partie de "Foyers" (qui signifie aussi la patrie) s'organise autour de figures essentielles à l'Algérie, un pays en mutation politique et historique, et lui donne son nom. Y sont accueillis ceux dont le travail promeut multiculturalisme [End Page 255]et engagement humaniste et qui éclairent, à travers leurs œuvres, des aspects socioculturels essentiels à la promotion d'une identité algérienne plurielle. Le premier à franchir symboliquement le seuil de la porte d'entrée est "un choyé des dieux" (Djebar 148), 1car Mouloud Mammeri, ou Dda Lmouloudpour ses compatriotes qui marquent ainsi leur respect, est un homme dont l'œuvre romanesque, dramatique, anthropologique, sociologique (à laquelle s'ajoutent essais et traductions) n'est que l'expression tangible du rôle de l' amusnaw, poète héritier de la tamusni(la sagesse kabyle), qui fut en partie le sien. Prégnante est la tamusnien ce qu'elle permet la constante articulation entre hier et aujourd'hui, entre la tradition et un monde en devenir. Ainsi celui qui fut à l'origine du Printemps Berbère resta "dans cet 'entre-deux' du temps et du monde, à la fois héritier de la tamusniet ethnologue à l'écoute des mutations présentes" (71). Il personnifia une force dynamique se nourrissant des échanges intellectuels, tout en militant pour la promotion et l'inclusion officielle de la culture kabyle et des langues berbères dans les strates de l'identité algérienne.

Puisque le foyer, c'est aussi "un point de rayonnement et un point de convergence" (6), le lecteur suit le rayonnement de Mouloud Mammeri pour lire "Jamel Eddine Bencheikh et Jean Sénac: l'Algérie comme lieu commun." Le parcours en zigzag de ces deux hommes de lettres, une fois parall...

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