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  • Éditorial Femmes immigrantes professionnelles et de métier :accès et intégration au travail
  • France Houle, Rédactrice invitée (bio)

Égalité des places. Égalité des chances. Égalité des valeurs. Tels sont les thèmes abordés dans ce numéro spécial sur les femmes immigrantes qualifiées.

D'entrée de jeu, apportons une précision d'ordre terminologique. Le mot qualifié fait partie du langage administratif utilisé en droit de l'immigration. Il désigne les personnes qui possèdent un diplôme postsecondaire et qui sont sélectionnées pour immigrer en permanence au Canada. Ce qualificatif s'oppose à celui de non qualifié et qui sert à désigner les personnes qui viennent s'établir temporairement sur le territoire canadien pour y travailler. Ces personnes sont étiquetées ainsi parce qu'elles ne possèdent pas de diplôme postsecondaire ou encore parce qu'elles n'ont aucun diplôme.

Cette classification entre les personnes qualifiées et non qualifiées appartient au vocabulaire de l'égalité des places. Il maintient un système de classes sociales qui, dans une économie du savoir, est organisé sur un modèle gratifiant les connaissances et les compétences spécialisées aux dépens des connaissances et compétences générales. Le savoir spécialisé est mieux rémunéré parce qu'il est jugé moins interchangeable et plus rare dans une économie de marché. Ces « ressources humaines » sont vues comme étant plus difficiles à remplacer ; c'est pourquoi elles possèdent une valeur économique plus grande. À l'inverse, le savoir général, parce qu'il est jugé plus abondant, plus facilement remplaçable et interchangeable, a moins de valeur économique. La « loi » de l'offre et de la demande jouant, ici et une fois de plus, le rôle de principe économique régulateur immuable. Toutefois, les données montrent que ces postulats issus de la théorie économique devraient recevoir une application plus nuancée notamment lorsqu'ils sont mobilisés pour justifier les politiques adoptées en droit de l'immigration. Mais tel ne semble pas être le cas, ce qui laisse croire qu'un certain nombre de stéréotypes et de préjugés sont à l'oeuvre et qu'ils exercent de fortes pressions sur l'élaboration et l'application de nos programmes migratoires.

En effet, ce système de classes sociales, que l'on connait bien dans les sociétés capitalistes, est reproduit en droit canadien de l'immigration. Ainsi, les immigrants et les immigrantes qualifiés font partie de la classe supérieure, c'est-à-dire d'une catégorie de personnes ayant droit à des privilèges auxquels les autres n'ont pas accès. Elles peuvent s'établir au Canada de manière permanente et bénéficier de tous les avantages économiques, sociaux et culturels auxquels les citoyens et les citoyennes (au sens légal) ont droit au Canada, sauf le droit de vote. Quant aux immigrants et aux immigrantes non qualifiés, ils et elles n'ont généralement pas le droit s'établir en permanence sur le sol canadien. Bien qu'ils peuvent [End Page i] théoriquement jouir de nombreux droits économiques et sociaux, au même titre que les résidents et les résidentes permanents ainsi que les citoyennes et les citoyens, l'ineffectivité de ces droits a fait l'objet de maints constats dans plusieurs études empiriques. Par ailleurs, ne pouvant séjourner que temporairement sur le territoire canadien, les migrantes et les migrants au statut temporaire sont assujettis à de multiples contraintes et contrôles administratifs dont plusieurs posent problème sur le plan du respect des droits et libertés fondamentales des personnes.

C'est à cette première problématique générale relative à l'égalité des places et à la division du travail entre travailleuses migrantes qualifiées et non qualifiées que le texte de Seori Choi et Lenore Lyons s'attaque. Dans leur contribution intitulée Gender Citizenship and Women's 'Unskilled' Labour : The Experience of Filipina Migrant Nurses in Singapore, les auteures documentent les effets des programmes migratoires singapouriens qui opèrent un classement des cat...

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