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  • Œuvres complètes. Œuvres romanesques
  • Katherine Ashley
Edmond et Jules de Goncourt: Œuvres complètes. Œuvres romanesques, VIII: Edmond de Goncourt: La Fille Élisa. Édité par David Baguley. (Textes de littérature moderne et contemporaine, 127). Paris: Honoré Champion, 2010. 310 pp. Hb €65.00.

Les éditions des œuvres complètes des frères Goncourt qui existent actuellement sont loin d’être idéales: celle de Slatkine Reprints est une reproduction qui date des années 1980, tandis que l’édition électronique Les Goncourt: l’œuvre romanesque (cédérom, Garnier, 2002) ne contient aucun appareil critique — ni introduction, ni notes, ni ressources supplémentaires. Bref, c’est une édition qui convient mal aux besoins des chercheurs. La présente édition de La Fille Élisa, admirablement préparée par David Baguley, fait partie d’une série qui comble ce vide en remettant les Goncourt dans leur siècle et en leur donnant l’attention critique qu’ils méritent en tant que — selon eux, du moins — fondateurs du naturalisme. La Fille Élisa (1877) est un roman en deux parties: le livre premier décrit la vie d’une prostituée des bas-fonds; le livre deuxième fonctionne comme plaidoirie contre le système pénitentiaire du silence continu (ayant tué son amant, un soldat, la prostituée-criminelle devient prisonnière muette). Comme Baguley le constate, le roman cherche à démystifier la prison romantique tout aussi bien que la prostitution (p. 15). À cet égard, La Fille Élisa joue un rôle important dans le canon naturaliste ainsi que dans le canon de littérature carcérale: il s’agit d’un des premiers romans à peindre la prostituée et la prison autrement. De plus, l’intérêtdu roman dérive au moins en partie du fait qu’il ne s’agit pas d’un texte écrit ‘à quatre mains’ par les deux frères Goncourt, mais plutôt du premier roman écrit par Edmond seul après la mort prématurée de Jules en 1870. Il contient néanmoins les empreintes de leur collaboration, ce qui se manifeste principalement dans la genèse du roman, qui est tracée avec habileté dans l’Introduction très complète. Baguley fait appel au travail majeur de Robert Ricatte, tout en ajoutant des détails qui font voir le long développement du projet au cours des années 1860 et 1870. Il analyse l’évolution, les modèles et les thèmes du roman, mais explore également l’histoire de sa publication, sa préface, les maintes parodies, pastiches et adaptations (pour le théâtre et le cinéma) du texte, et, dans une section qui retiendra l’attention des passionnés d’écriture artiste, les liens entre le style goncourtien et l’art de Constantin Guys et Félicien Rops, entre autres. Le tout sert à souligner les questions éthiques et esthétiques posées par le roman. À l’Introduction et aux notes détaillées s’ajoute un dossier documentaire dont certains documents portent sur la génétique textuelle (le carnet du roman, des extraits du Journal, un chapitre supprimé), d’autres sur la publication (une lettre de Huysmans) et la réception du roman lors de sa parution (un compte rendu de Henry James). Bien que certains de ces documents soient déjà disponibles ailleurs, le mérite de cette édition critique de tout réunir entre deux couvertures. Ainsi l’édition deviendra-t-elle un ouvrage essentiel pour ceux qui s’intéressent aux Goncourt, au naturalisme, ou bien à l’histoire littéraire du dix-neuvième siècle.

Katherine Ashley
Corner Brook, NL, Canada
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