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Reviewed by:
  • Les Fondements de l'histoire littéraire. De Saint-René Taillandier à Lanson
  • Morgan Gaulin
Fraisse, Luc . Les Fondements de l'histoire littéraire. De Saint-René Taillandier à Lanson. Paris : Honoré Champion, 2002. Pp. 715. ISBN 2-7453-0657X

Peu d'ouvrages ont été consacrés aux concepts sur lesquels repose l'histoire littéraire. Or, Luc Fraisse remédie admirablement à cette lacune. Un évènement de taille est à l'origine de son travail: la découverte dans un grenier d'une famille amie des papiers de cours du professeur Saint-René Taillandier (1817-1879), collaborateur à la Revue des Deux Mondes. Selon les papiers de cours de Taillandier celui-ci précéda Lanson, à qui on attribue généralement l'acte de naissance des méthodes employées par l'histoire littéraire. Lanson apparaît ainsi comme l'auteur d'une «codification rétrospective» (9). Fraisse, en retraçant minutieusement la genèse conceptuelle de l'histoire littéraire, son contexte d'élaboration, nous présente plusieurs générations de penseurs parmi lesquelles on compte des historiens, des écrivains de même que des philosophes.

Fraisse reproduit un long passage extrait des cours de Taillandier dans lequel ce dernier expose sa définition de l'histoire littéraire (62-65). Puis, Fraisse se pose la question cruciale de savoir quelles furent les sources documentaires de Taillandier. Il croise alors des figures aussi diverses que Cousin, Hegel, Ginguené et Sainte-Beuve. Le rapport de Taillandier à Cousin évoque selon Fraisse un rapport intime entre le spiritualisme libéral et l'Allemagne (140).

Fraisse examine ensuite dans le détail les annotations de Taillandier à l'ouvrage de Sainte-Beuve intitulé Critique et portraits littéraires. Suit des développements des plus stimulants sur les questions que doit aborder toute histoire littéraire: la définition des siècles littéraires, les périodes de transition, les écrivains charnières, les groupes littéraires, la biographie, la genèse des œuvres et les travaux consacrés aux bibliographies. La première partie s'achève sur une charte de l'histoire littéraire, véritable synthèse accomplie par Fraisse des postulats et des définitions formulées par Taillandier.

La seconde partie traite de Gustave Lanson (1857-1934), figure que Fraisse caractérise de «codificateur de l'histoire littéraire». Est examinée la critique de la rhétorique formulée par Lanson, discipline que ce dernier accusée d'avoir affadi les œuvres littéraires. La mise en place, toujours par Lanson, d'une approche plus objective des œuvres en privilégiant l'effacement du critique au profit de l'auteur à l'exemple de l'essai publié en 1882 sur Marivaux, sa vie et ses œuvres par Gustave Larroumet. Alors que la rhétorique favorisait le développement de celui qui étudiait une œuvre, la nouvelle [End Page 332] histoire littéraire met en valeur l'auteur et sa création. L'histoire littéraire de Lanson prend aussi en compte les époques de transition (402 sq.) de même que les études d'influence. Apparaissent des disciplines qui étaient peu pratiquées par les prédécesseurs de Lanson: l'établissement de textes, le recensement bibliographique ainsi que l'étude des sources. De plus, Fraisse nous rappelle que des éditeurs furent plus que d'autres liés à l'émergence de l'histoire littéraire (462). Hachette et sa collection des « Grands écrivains français » est à ce titre exemplaire. On y publia les premiers volumes en 1887. Enfin, dans le chapitre iv Fraisse s'attaque au problème majeur de toute histoire littéraire. Celle-ci, en effet, est-elle capable, dans son souci constant d'insérer les œuvres dans leurs contextes, de comprendre le processus de création individuelle (551)? Selon Fraisse, Lanson a donné des réponses à cette question dans un texte sur «La méthode de l'histoire littéraire». Lanson y utilise la belle expression d'«accident du génie» (552). Avec brio, Fraisse relie ce problème à un autre, qui lui est contemporain et qui est mis en valeur par Bergson dès 1889 entre liberté et déterminisme (552). Selon Lanson...

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