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  • Que la nuit tombe sur l'orchestre : surréalisme et musique
  • Franck Dalmas
Sébastien Arfouilloux. Que la nuit tombe sur l'orchestre : surréalisme et musique. Paris: Fayard, 2009. Pp. 544. 24 €.

En 1928, André Breton assène à la musique sa célèbre diatribe: "Que la nuit continue donc à tomber sur l'orchestre." Sébastien Arfouilloux retrace les circonstances historiques et esthétiques qui justifient un tel rejet à l'intérieur du groupe surréaliste. Son livre comprend douze chapitres en quatre parties. On trouve deux annexes utiles: une chronologie (1909-1969) du Manifeste du futurisme [End Page 117] aux dernières manifestations du surréalisme, et un "Répertoire" de cent vingt-sept noms affiliés au surréalisme (Varèse, Schaeffer), associés (Satie, Auric), ou les grands classiques refusés.

La première partie revient sur les collaborations de peintres, poètes et musiciens avec les Ballets russes ou suédois; l'intercession de Cocteau auprès de Satie et du groupe des Six; ainsi que le rôle précurseur de Dada, avec Tzara et Alberto Savinio, dans la formation d'un "sur-réalisme." Satie est la personnalité qui unit les trois premiers chapitres et y est perçu comme musicien dada pour la part prépondérante qu'il joua dans l'efflorescence d'un art nouveau. La deuxième partie se recentre sur l'esthétique de Breton. Les "raisons historiques" du refus de la musique y contrastent avec les "motifs poétiques" du mouvement: un chapitre discute la primauté du visuel d'après le texte de Chirico, "Point de musique" de L'Art métaphysique, alors que l'autre considère l'automatisme qui déplace les conventions du psychisme créatif. Or la musique, tributaire d'une écriture mathématique, ne saurait stimuler l'automatisme. Toutefois une musique des mots se retrouve dans les jeux du surréalisme et, rejetant l'hégémonie du sens, certains surréalistes s'attachent à la sérialité des sons. La troisième partie sur l'activité ludique du mouvement traite les cas particuliers de la chanson populaire et du jazz. Adoptée par Éluard et Desnos, la chanson est capable "de susciter les associations et les rencontres fortuites de mots" (292) et "d'approcher les territoires oniriques du surréalisme" (294). La préférence de Soupault et Leiris va au jazz, genre "brutal" vu comme "un rejet des habitudes de la civilisation" (319). Dans les années 1940, un rapprochement poétique avec le jazz s'intensifie grâce à la critique de Jacques Bureau. La quatrième partie porte exclusivement sur la musique avec l'apport du compositeur belge André Souris et d'autres. Quatre chapitres se succèdent en repensant le propos de Breton, à l'exemple des mélodies de Poulenc d'après Éluard, des inventions de Boulez d'après René Char (Le Marteau sans maître), et de Souris d'après Paul Nougé (Clarisse Juranville). L'aversion musicale de Breton ne se réduit plus qu'à "un appel à la prudence" (402).

Le livre de Sébastien Arfouilloux nous place au cœur des réflexions critiques de Breton sur la musique et la naissance du surréalisme. L'économie de l'ouvrage opère vers la conclusion que la défiance de Breton est un faux problème et que ce dernier souhaitait repositionner la musique au sein même de la poésie, comme il l'appelait de ses vœux en 1944 dans "Silence d'or." Dès lors le mouvement s'est fortifié dans "la négation d'une certaine musique" (480).

Franck Dalmas
Stony Brook University
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