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Reviewed by:
  • La Fabrique d'une génération. Georges Valéro postier, militant et écrivain
  • Nathalie Ponsard
Christian Chevandier.- La Fabrique d'une génération. Georges Valéro postier, militant et écrivain. Paris, Les Belles Lettres, 2009, 432 pages.

Sur le fond comme sur la forme, c'est une biographie originale que nous offre ici Christian Chevandier. L'objet de l'étude est d'écrire la vie d'un individu, Georges Valéro, pourvu d'une triple identité : un postier, issu du milieu ouvrier, un militant engagé pour changer le monde et un écrivain. Il est aussi de resituer son itinéraire dans sa génération et de le replacer dans son milieu et son temps. En outre, la biographie repose sur l'usage du Je : au fil du texte, le lecteur, confronté à la coexistence d'une forte implication de l'auteur et d'une distanciation critique de l'historien, est donc convié à une réflexion sur la construction biographique doublée d'une interrogation sur les modalités d'une analyse historique d'écrits romanesques émanant du milieu ouvrier.

Dans la première partie, axée sur les « initiations », l'auteur reconstruit l'univers familial, social et scolaire. Il relate l'histoire des deux familles, brosse un portrait de Villeurbanne dans les années 1930, restitue le parcours scolaire primaire influencé par des instituteurs de gauche, réinscrit le jeune dans une socialisation marquée par une culture ouvrière, communiste et espagnole. Il pose aussi pertinemment la question de l'identité de ce jeune qui, de milieu ouvrier immigré, à la fois s'insère dans la jeunesse des années 1950 et s'en distingue par la poursuite d'études au lycée [End Page 122] Ampère, des rencontres décisives (Joseph Goldberg) et le début du militantisme à l'UJ (Union de la Jeunesse Républicaine de France). Il montre les difficultés de ce jeune homme situé à la croisée des cultures (culture populaire/culture classique/cultures politiques). Puis, à travers l'expérience de la guerre d'Algérie, l'auteur cherche à cerner la position du témoin (un soldat affecté aux transmissions) pour saisir, à partir de sa correspondance, son roman8 et des sources de l'armée de terre9, à la fois le vécu de la guerre et la « représentation » qu'il en donne. La guerre de G. Valéro est celle d'un militant communiste qui la juge injuste, celle d'un homme culpabilisé par l'abandon de sa femme et de sa fille ; c'est une guerre de la modernité qui occulte les horreurs dont il n'aurait pas été témoin direct selon sa correspondance ; c'est aussi une guerre de l'ennui et de la routine trompés par d'intenses pratiques de lecture et le début d'une expérience d'écriture.

Au cœur de l'ouvrage, l'auteur restitue les militances de G.Valéro en prenant soin de les intégrer dans le cadre de la famille, du travail et/ou des mouvements sociaux. Ainsi, dans la reconstitution minutieuse du travail du « service Lyon Chèques de la Poste », puis à partir de 1962 celui de « Lyon Gare », il met l'accent sur la spécificité de la sociabilité nocturne et le quotidien du travail de militant. On peut suivre sa carrière dans la sphère cégétiste : au niveau départemental, des responsabilités au sein de la commission des jeunes, sa participation en 1962 à la commission exécutive du syndicat CGT des PTT du Rhône. C'est l'occasion pour l'auteur de présenter ses camarades de « combat » (Charles Rossez, Michel Barroil). On peut aussi appréhender l'occupation du « Centre PTT de Lyon Gare » dans le temps et l'espace de la contestation soixante-huitarde lyonnaise. L'intérêt réside alors, d'une part dans la description des diverses activités liées à l'occupation (diffusion d'informations, discussions, rédaction de revendications au sein des commissions), d'autre part dans l'ouverture du centre à des « hommes de culture » (Roger Planchon, Patrice Chéreau, Le théâtre de la Cité) rappelant...

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