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Book Reviews Daniele Sallenave. L'Amazone du grand Dieu. Paris: Bayard/Rencontre, 1997. Pp.157. Ce livre est un essai sur la vie et l'œuvre de Marie de l'Incarnation, née Marie Guyart à Tours en 1599, l'une des plus brillantes figures de la mystique française. Mariée à 17 ans, mère à 18, veuve à 19, Marie Guyart est entrée en religion à 33 ans, après dix années d'intenses ravissements mystiques. Sallenave distingue d'abord trois figures-clefs de "l'écart féminin" dans ce siècle marqué par la Reconquête catholique: la mystique engagée (Brémond), la mondiale possédée (De Certeau) et la sorcière persécutée (Michelet). Puis elle étudie les trois traits qui font la singularit é de Marie Guyart: l'intensité de ses ravissements; son extraordinaire capacité d'introspection; sa grande compétence en matière d'administration. Ces caractéristiques se manifestent de façon éclatante dans ses écrits spirituels, dans sa volumineuse correspondance, et surtout dans ses deux longues relations autobiographiques. La première relation (1633), rédigée en France, est un compte-rendu détaillé de ses visions et de ses extases, comme ceux qu'exigeaient les confesseurs de l'époque pour suivre et contrôler le développement de la poussée mystique. La seconde relation (1654), rédigée au Canada, raconte son installation à Québec et témoigne sur ce nouveau pays. Marie Guyart a quitté la France en 1639 pour aller fonder le premier établissement des Ursulines au Canada. Sallenave souligne l'extraordinaire détermination de Marie Guyart: peu de femmes pouvaient concevoir et entreprendre un tel voyage à l'époque. Mais en même temps Sallenave montre comment Marie Guyart réalise ainsi le mandat que la France s'est donné en réponse tardive aux décisions du concile de Trente: restaurer la chrétienté catholique. Comme Thérèse d'Avila, dont elle a lu et médité les textes, Marie Guyart est une mystique inspirée doubl ée d'une femme d'action à l'esprit très pratique. Sallenave interroge cette double vocation— contemplation et action—pour essayer d'en comprendre l'unité. Ce faisant, Sallenave évite deux écueils. D'une part le réductionnisme des critiques contemporains que fascine exclusivement le phénomène mystique, par le biais de la psychanalyse plus que de la théologie. D'autre part elle évite la pusillanimité de ceux qui veulent ignorer la question de l'évangélisation forcée des "sauvages". En réalité, montre Sallenave, l'histoire religieuse de cette partie du XVIIe siècle est toute entière placée sous le signe de la mission. Mission de conquête à l'intérieur, en France, où il s'agit de reconquérir l'espace national après la secousse de la Réforme (Tours, où Marie Guyart est née, fut l'un des foyers du protestantisme). Mission de conquête à l'extérieur, dans le Nouveau Monde où, à l'instar des Jésuites, il s'agit de "planter la croix avec les lis". Il est clair que la conversion en masse des Hurons et des Algonquins—souvent par villages entiers—s'inscrit dans une politique de conquête coloniale. Mais Sallenave souligne que pour Marie Guyart cette vie d'action, de soins concrets, d'éducation des âmes, est surtout le complément nécessaire de la vie contemplative: son "acting out". Sallenave souligne aussi qu'il existe dans la vocation de Marie Guyart un souci indéniable d'identifier une voie simple et droite pour échapper au contexte trouble et politiquement chargé de la France de l'époque. Dans les quatre derniers chapitres, Sallenave étudie la conception du temps qui émerge de la correspondance de Marie Guyart: temps "prédéterminé" mais laissant sa part de liberté à l'homme pour choisir entre le bien et le mal. Sallenave étudie d'autre part le "dolorisme" de la grande mystique, véritable morale ascétique fondée sur l'espoir de la rédemption, et son expérience particulière de la "paix de cœur", union avec l'esprit divin par "forme de respir". On...

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