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La forme du dialogue Françoise Asso Faut-il être à court... cela j'ai quelques bonnes raisons de penser que vous le direz... faut-il être à court pour rabâcher ainsi, pour inlassablement ressasser...1 LJ ŒUVRE DE NATHALIE SARRAUTE est, en effet, une œuvre qui se répète: parce qu'elle s'est donné un matériau (ou un espace) en un sens limité, et qu'elle n'en finit pas de travailler ou d'explorer, et plus précisément parce que d'un texte à l'autre elle "recommence ", comme si de rien n'était. C'est pourquoi, malgré le danger que représente, pour celui qui prend "la parole" justement, une telle ouverture , j'ai voulu commencer cette intervention par ces quelques mots de L'Usage de la parole. J'aurais pu choisir "Encore les Ballut? mais mon cher, c'est une idée fixe...", ou tout autre passage qui inscrit de la sorte dans l'œuvre la nécessité de la répétition: mais si l'on trouve énoncés, dans tous les textes de Nathalie Sarraute, un certain nombre de refus de sa recherche, de ce sur quoi son travail s'élabore (refus du drame, de la métaphore, de la "complication"...); si, du "spécialiste" at Portrait d'un inconnu à tous ces tribunaux populaires qui hantent les romans et les pièces, l'œuvre multiplie les opposants à ce qu'elle produit; s'il y a toujours une voix pour dire "Encore..." ou "Assez", cette phrase de L'Usage de la parole reprend cette négation de l'œuvre dans l'œuvre d'une manière qui permet de voir ce qui, dans celle-ci, à l'évidence si répétitive, obstinément attachée à une "idée fixe",2 a cependant changé. Je dis "cependant", mais il n'y a là , justement, nulle contradiction; et c'est au contraire dans la mesure où Nathalie Sarraute écrit toujours la même chose, c'est-à -dire toujours de la même chose, qu'il y a dans son œuvre une évolution significative, qui affecte toutes les particularités d'une poétique exceptionnellement cohérente—car, au-delà des deux choix formels que je veux évoquer ici, c'est en effet l'ensemble d'une esthétique qui évolue dans le même sens, celui de l'œuvre elle-même. Cela dit, si je m'attache ici à ces deux choix spécifiques (la forme du dialogue et le "morceau" narratif), c'est pour plusieurs raisons: d'abord parce qu'ils se radicalisent d'une manière immédiatement visible et que leur irrésistible progression se repère aisément, depuis Les Fruits d'Or en Vol. XXXVI, No. 2 9 L'Esprit Créateur particulier; ensuite parce que dans ces deux évolutions qui se font de concert se perçoit un rapport au réel qui me semble informer toute l'œuvre; enfin parce que les trois derniers livres montrent de manière décisive que, au-delà de toute question de "genre", Nathalie Sarraute, toujours plus assurée des formes qu'elle a faites siennes—et qui, en fait, sont les siennes depuis toujours—, écrit du lieu même où l'œuvre prend son origine: car si dans cette dernière période l'œuvre s'éclairât, en tous les sens que suggère le verbe, c'est que, par un renversement de perspective que les romans antérieurs préparaient sur le mode dramatique, les tropismes y acquièrent la "clarté" de ce dont on parle. Du drame de l'autre au drame de l'idée Pour parler du dialogue (du dialogue comme forme, aussi bien que de la forme particulière que Nathalie Sarraute donne à celui-ci), je laisserai volontairement de côté deux discours: celui de Nathalie Sarraute ellem ême, qui tient à distinguer la conversation de la sous-conversation, celui de la linguistique qui nous rappelle que tout discours est un dialogue . Pour celui-ci, c'est que, dans sa généralité, il ne peut dire grandchose de cette œuvre-là , dans sa spécificité; pour celui-là , c'est que si la distinction entre...

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