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  • Le Conte en ses paroles: La figuration de l’oralité dans le conte merveilleux du Classicisme aux Lumières
  • Eric Méchoulan (bio)
Anne Defrance et Jean-François Perrin, éds. Le Conte en ses paroles: La figuration de l’oralité dans le conte merveilleux du Classicisme aux Lumières. Paris: Les Éditions Desjonquères, 2007. 512pp. €32. ISBN 978-84321-091-4.

Ce volume édité par Anne Defrance et Jean-François Perrin, deux spécialistes reconnus du conte d’Ancien Régime, réunit les actes du colloque tenu à Grenoble en septembre 2005. Celui-ci avait pour soustitre: « Le dire et le dit dans le conte merveilleux de l’âge classique (xviie– xviiie siècle) ». La modification du sous-titre précise en fait la question principale du volume qui en assure manifestement l’unité: ce ne sont pas simplement les problèmes de l’énonciation mis en jeu par les contes merveilleux dont il est traité, mais plus fondamentalement des rapports à l’oralité mis en scène par ces textes. Bien sûr, ces rapports nécessitent un examen minutieux des procédures d’énonciation, des façons de dire et des effets de ce qui est dit, cependant, l’orientation choisie met l’accent sur le caractère ouvragé, voire retors de ces procédures pour faire croire à l’oralité originaire des contes. Depuis au moins deux décennies, cette oralité originaire a été réexaminée et largement déconstruite historiquement, cependant ce volume permet dans la diversité des textes convoqués et des perspectives mobilisées de faire véritablement le point sur la question.

Il est impossible dans les limites de ce compte-rendu de rendre justice à tous les articles ni même de mentionner les trente-deux participants. On peut au moins noter que les corpus analysés vont de Perrault et Mme d’Aulnoy jusqu’à Rétif de la Bretonne avec une particulière insistance sur les contes du xviiie siècle. Et les approches sont multiples, tantôt par la confrontation avec les autres genres, tantôt par les ressources exploitées de l’anthropologie (M.-A. Thirard, N. Decourt). L’ouvrage compte trois parties qui répartissent utilement la matière.

Dans « Fictions de voix », il s’agit surtout d’analyser comment la voix est figurée, que ce soit en la liant à des pratiques orales ou à une mémoire collective, de façon traditionnelle, ou que ce soit en critiquant justement ces sources illusoires à partir d’une exploitation des ressources du dialogue et de la conversation (comme le fait J.-P. Sermain). C’est alors aussi la rhétorique de l’énonciation qui est convoquée avec ses outils de mise en fiction (C. Noille-Clauzade, R. Robert) ou les effets de pouvoir du langage (A. Defrance. J. Boch). Dans une culture de la pratique orale et des bons usages de la conversation, il apparaît ainsi d’autant plus juste de s’attarder à ces modélisations de l’énonciation pour comprendre et le fonctionnement et la vogue des contes merveilleux. [End Page 574]

Ensuite, dans « Co-énonciation et mise en scène », ce sont les effets de cette parole qui porte pourtant le deuil de soi-même qui sont étudiés jusque dans ses indispensables scénographies et jeux de présence, ouvrant ainsi un espace d’expérimentation ( J.-F. Perrin). Que ce soit les usages de la parole dans le conte libertin (M. Bokobza Kahan), en particulier dans Le Sopha de Crébillon (R. Jomand- Beaudry), ou les enjeux de la traduction et de la puissance de l’acte de parole (A. Gaillard, M. Couvreur), ce sont des mises en scène de la voix comme corps érotisé qui sont scrutées. Du coup, il devient très intéressant de suivre ce qui arrive à la parole conteuse lorsqu’elle prend les tournures d’une voix sur scène. Ainsi toute une série d’études portent sur la « mise en scène » au sens strict des contes merveilleux (N. Rizzoni, C. Ramond, M. Poirson, B. Pintiaux).

En troisième lieu, dans « Le corps des mots, le jeu des...

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