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  • Les imaginaires de l'écriture. Personnages et scénarios de la vie littéraire, Les Cahiers du XIXe siècle
  • Jeremy Worth
Les imaginaires de l'écriture. Personnages et scénarios de la vie littéraire, Les Cahiers du XIXe siècle, no 1, 245 p.

Dans ce volume, le comité de rédaction de la nouvelle revue canadienne Les Cahiers du XIXe siècle a réuni treize textes de chercheurs canadiens et européens – articles qui, ensemble, constituent une réflexion stimulante, révélatrice et multiple sur le rô le, la valeur symbolique et l'autorité de l'écrivain et de l'intellectuel au XIXe siècle. Il ressort que le statut identitaire de ce « savant », cet « individu exceptionnel » (Maxime Prévost), est avant tout paradoxal, sa place dans le champ social instable et contradictoire ; ce qui frappe, c'est que tout en faisant contraste avec le profil relativement « appauvri » (comme le constate Prévost) de l'intellectuel de nos jours, l'image du penseur littéraire au XIXe siècle [End Page 619] en vient aussi, à partir de certain moments importants, à anticiper celle de son héritier. Songeons par exemple à la perte de son aspect « mythique » (voir le « paradigme de la mort romantique du poète » dont parle José-Luis Diaz), aux « postures » banalisantes et aux « manifestations trop sensibles de solidarité » des membres de l'institution littéraire (Anthony Glinoer), et au dilemme vécu par Balzac, sensible à la fois à la « noblesse » de son rô le et à la nécessité, pour « vivre de sa plume », de « faire de la littérature un métier » (Geneviève Madore).

Le but explicite du volume et des Cahiers du XIXe siècle, selon le comité de rédaction, est justement de « diffuser la réflexion qui a présentement cours sur le XIXe siècle, au moment où se pose de plus en plus la question de sa proximité avec l'époque contemporaine ». On insiste aussi sur la visée œcuménique qui ne néglige aucune des dimensions « littéraire, sociale, historique [et] artistique ». L'une des forces de cet ouvrage provient précisement du fait que ce défi ait été si habilement relevé; la variété de sujets et d'approches n'enlève rien à la cohérence du tout.

Le numéro est divisé en quatre sections. Bien que ce soit le dossier « Les imaginaires de l'écriture » qui contienne des articles ayant un rapport particulier avec la problématique centrale de l'ouvrage, la section « essais » en vient à compléter la première partie en apportant beaucoup elle aussi à l'étude du rô le et de l'identité problématiques de l'artiste au XIXe siècle. La partie suivante, « Le dix-neuvième siècle au présent », répond également bien aux visées présentées dans les remarques préliminaires du volume. L'ouvrage se termine par un excellent « débat » sur les façons dont un historien et un littéraire peuvent intégrer les méthodes de l'autre dans leurs recherches et activités intellectuelles respectives.

Pour entamer le dossier, Pascal Brissette et José-Luis Diaz proposent des articles sur la figure du « poète-misère » et son importance au XIXe siècle, le premier partant d'une étude des représentations picturales de la mort de Nicolas Gilbert. Il met le mythe du « talent commun devenu génie par la grâce de la souffrance » dans son contexte historique, le contrastant avec les conceptions du poète malade, indigent et hospitalisé qui avaient cours sous l'Ancien Régime. Diaz, quant à lui, démontre comment l'image, dans la littérature de l'Empire et de la Restauration, de la « mort virginale » du « noble » poète-martyre se transforme au cours du siècle en la version réaliste (souvent « riche en hémoglobine ») qui met l'accent sur les aspects macabres de sa situation: désormais, la mort n'est plus un « dispositif d'évanescence ».

Anthony Glinoer et Geneviève Madore évoquent les questions de la « collectivisation » de l'activité littéraire...

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