Les rituels de l'absolu. Essai sur la poésie d'Alain Grandbois (review)

De l'auteur, Yves Laliberté, spécialiste de la poésie grandboisienne, il est dit, en quatrième de couverture de Rituels de l'absolu. Essai sur la poésie d'Alain Grandbois, qu'il a une « quasi incommensurable érudition » – commentaire que partageront probablement tous ceux et celles qui consulteront son étude exigeante et touffue.

Écrit dans un style savant – des expressions comme « artialisation du cosmos », « entéléchie platonicienne », « neptunisme », « hylogénie », « orogenèse » et « axiomatique déductive » en font foi –, et ne reculant jamais devant la complexité et l'abstraction des concepts, l'ouvrage propose de mettre en lumière un aspect méconnu, selon Laliberté, de l'écriture d'Alain Grandbois, soit « l'envergure de[s] lectures » de l'écrivain et « leur importance dans son inspiration poétique ». L'une des prémisses de l'analyste est effectivement que le « lyrisme mystique » d'Alain Grandbois puise à même les « images archétypales » développées par les innombrables auteurs qu'il a fréquentés et qu'il se réapproprie afin de traduire sa conception du « monde sensible ».

L'essai de Laliberté se divise en deux parties qui se subdivisent à leur tour en trois et sept chapitres respectivement. Dans « Le cosmos sacré », la première partie, le chercheur s'attarde aux thèmes (haine, amitié, amour, guerre, paix. . . et aux images « bras », « sentinelles », « poitrines aveugles », « solitude d'acier », « sang », « transparence ») apparaissant dans ce qu'il appelle les « poèmes-genèses », c'est-à-dire des poèmes aux structures « cosmographi[ques] » et « cosmogoni[ques] » qui, en plus d'ouvrir les recueils de poésie d'Alain Grandbois, se donnent comme une minutieuse « relecture de la genèse » à la lumière des philosophes présocratiques en général et d'Empédocle en particulier. Il est à noter, cependant, que l'essayiste se penche plus en détail sur deux images récurrentes dans la poésie grandboisienne : la mer (son sens, son bestiaire et sa végétation), puis l'arbre (« anthropomorph[isé] » et « anthropog[énisé] »).

Dans la seconde partie de son étude, Laliberté explore les principes de « [l']initiation mystique » (autrement dit, les différentes étapes que doit traverser l'être humain – ou, plutô t, le poète – pour atteindre la sphère du divin) qui se dégagent, à ses yeux, de la poésie d'Alain Grandbois : l'épreuve de la purification passerait par la prière, le silence et la veille ; la transcendance, indissociable du motif de la lumière, se rattacherait plus à « l'amoureuse » qu'à Dieu ; le but de l'initiation serait d'« affronter » et de « vaincre » la mort. Or cette mort et ses avatars semblent revêtir une importance capitale pour le critique dans la mesure où il commente pendant quatre chapitres la façon dont est abordé ce thème chez Alain Grandbois. Laliberté examine ainsi les manières de mettre fin à ses jours qui sont exposées dans les vers du poète, tout comme les lieux (« [t]emples et cathédrales [. . .], points élevés, remparts, cavernes, rivages, parapets, îles, portes et portiques ») qui sont associés au trépas.

Que ce soit dans la première ou dans la deuxième partie de l'ouvrage, la méthode de l'analyse reste la même. Laliberté part d'abord d'images ou d'expressions grandboisiennes. Ensuite, à travers une pluralité d'exemples probants (tirés, ici, de l'histoire, de la philosophie, de la mythologie, de la religion, de la littérature ; là, de la biologie, de la géologie, de l'ethnologie, de l'électrologie, de la chimie, pour ne donner que ces exemples), il retrace en quoi ces expressions ou ces images relèvent de l'emprunt, en quoi elles font écho à d'autres œuvres ou à d'autres idées. De cette façon, comparaisons, analogies et parallèles structurent l'essentiel de son propos dont l'organisation est plus spiralée que...