Abstract

La violence qu'ont subie les prisonniers iraquiens à Abu Ghraib, aux mains de soldats, femmes et hommes, des États-Unis d'Amérique et du Royaume Uni, était très clairement sexualisée. Une pyramide de prisonniers mâles nus, forcés de simuler la sodomie, communiquait de façon graphique que le projet de l'empire, la domination de l'Occident par rapport au non-Occident, exige des infusions puissantes d'une hétérosexualité et d'un patriarcat violents. Le présent article explore la leçon à tirer de l'incident d'Abu Ghraib sur la façon dont l'empire prend corps et comment il vient à exister par de multiples systèmes de domination. Dans la première partie, l'auteure discute du rôle des pratiques visuelles et de la production de hiérarchies sexuelles, élément essentiel en raison des 1800 photos de torture. Une deuxième partie analyse la violence comme rituel qui permet aux hommes blancs d'atteindre un sens de maîtrise sur l'Autre racialisé, en même temps qu'elle fournit une intimité sexualisée interdite par la suprématie et le patriarcat blancs. Dans la troisième partie de cet article, l'auteure étudie le rôle des femmes blanches à Abu Ghraib, soutenant que c'est comme membres de leur race que l'on peut le mieux saisir la participation des femmes à cette violence—participation qui facilite la même maîtrise et intimité genrée que la violence raciale procure aux hommes blancs. En conclusion, l'auteure examine le régime de la terreur raciale illustrée par Abu Ghraib et d'autres endroits, en insistant sur la terreur comme un « marché de mythologies » qui organise la manière par laquelle les corps en viennent à exprimer les arrangements raciaux de l'empire.

The violence inflicted on Iraqi prisoners at Abu Ghraib, by both male and female American and British soldiers, was very clearly sexualized. A pyramid of naked male prisoners forced to simulate sodomy conveyed graphically that the project of empire, the West's domination of the non-West, requires strong infusions of a violent heterosexuality and patriarchy. This article explores what we can learn from Abu Ghraib about how empire is embodied and how it comes into existence through multiple systems of domination. In the first part, I discuss the role of visual practices and the making of racial hierarchies, a consideration made necessary by the 1,800 photos of torture. In the second part, I consider the violence as a ritual that enables white men to achieve a sense of mastery over the racial other, at the same time that it provides a sexualized intimacy forbidden in white supremacy and patriarchy. In the third part of this article, I consider the role of white women at Abu Ghraib, arguing that it is as members of their race that we can best grasp white women's participation in the violence—a participation that facilitates the same mastery and gendered intimacy afforded to white men who engage in racial violence. In the conclusion, I consider the regime of racial terror in evidence at Abu Ghraib and other places, focusing on terror as a "trade in mythologies" that organizes the way that bodies come to express the racial arrangements of empire.

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