Abstract

Le présent article se fonde sur la théorie du genre et de la nation de Nira Yuval-Davis ainsi que sur la théorie de la race et du nationalisme de Étienne Balibar pour étayer l'argument que la race est un des moyens significatifs par lesquels le régime juridique de l'État-nation différencie, évalue et organise les contributions des femmes à la reproduction. L'auteure démontre comment le statut d'Irlandais-e est un concept national à la fois racialisé et genré et retrace les méthodes par lesquelles la race a été récupérée par le droit pour stigmatiser et réglementer certains types de décisions d'avortement dans la République d'Irlande. Ce faisant, l'auteure analyse les arrêts dans les affaires C. et « Baby » O ainsi que trois entrevues réalisées à Cork, à Dublin et à Limerick, portant sur le traitement réservé par l'État aux femmes immigrantes cherchant à se procurer un avortement. Bien que la race soit maintenant comprise de plus en plus en termes de couleur de peau en vue d'exclure certain-es immigrant-es du statut d'Irlandais-es authentique, la race a aussi été utilisée comme complément au nationalisme dans les politiques d'avortement des années 1980 et 1990. Le statut d'Irlandais-e a été genré et racialisé de différentes façons en matière d'avortement suivant le déplacement d'une opposition à la Grande-Bretagne post-coloniale, à travers des hiérarchies internes qui célèbrent la reproduction de certaines femmes irlandaises plus que d'autres, vers une opposition émergeante à l'immigration noire. Ces déplacements révèlent que le droit irlandais en matière d'avortement post-1983 a toujours été racialisé, mais que le concept de race change selon que l'État-nation cherche à valoriser la reproduction de certaines femmes plutôt que d'autres.

This article draws on Nira Yuval-Davis's theory of gender and nation and on Étienne Balibar's theory of race and nationalism to develop the argument that race is one significant means by which the legal regime of the nation-state differentiates, values, and organizes women's reproductive contributions. I show how Irishness is a racial as well as a gendered national concept, and I trace the ways in which race has been legally mobilized to stigmatize and regulate certain kinds of abortion decisions in the Republic of Ireland. In doing so, I draw in particular on the cases of C (1997) and "Baby" O (2002), and on three interviews with crisis pregnancy counsellors and their discussion of the state's treatment of abortion-seeking migrant women. Although race is now being signified increasingly in terms of skin colour and used to exclude certain migrants from Irishness, race has also been mobilized as a supplement to nationalism in the abortion politics of the 1980s and 1990s. Irishness has been gendered and racialized in different ways through abortion law as it has shifted from an opposition with post-colonial Britishness, through internal hierarchies that celebrate the reproduction of some Irish women over others, to an emerging opposition with migrant Blackness. These shifts reveal that post-1983 Irish abortion law has always been racialized but that the concept of race has changed as the nation-state moves to value the reproduction of some women over others.

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