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  • Roman
  • Pierre Karch (bio)

Cette année, j'ai maintenu la formule de l'an dernier qui consiste à grouper les oeuvres par maison d'édition et à présenter, à l'intérieur de chaque division, les auteurs par ordre alphabétique. Ainsi, pas de discrimination, ce qui ne veut nullement dire que je sois parfaitement objectif, tellement peu, de fait, que je souscris en partie à ce qu'avance Borgès, dans Le livre de sable : « L'imprimerie [...] a été l'un des pires fléaux de l'humanité, car elle a tendu à multiplier jusqu'au vertige des textes inutiles ». Je laisse aux lectrices et aux lecteurs le soin de choisir les titres qu'elles ou qu'ils aimeraient voir figurer à ce triste palmarès.

Boréal

Emma, l'héroïne douteuse de Tequila bang bang !, le deuxième roman de Germaine Dionne, a acheté la maison de sa mère pour s'établir dans un village qui « compte plus de gueules ravagées que de teints fleuris; plus de chômeurs et d'assistés sociaux que de trekkeurs et de véliplanchistes », dans un village, dis-je, qu'elle qualifie de « trou du cul du monde ». L'atmosphère est créée et le lien entre la jeune demoiselle et le milieu qu'elle a choisi est établi. Pour être sûre que son lecteur saisisse ce lien, l'auteure place sa narratrice « à genoux dans les dunes », en train de branler Georges qui lui gicle « entre les seins ». Le portrait qu'Emma et son amie Manon tracent des hommes est on ne peut plus négatif. Le « p'tit Suisse », on s'en doutait, pue le fromage, « Thierry serait homo » et George a eu des « déboires avec une mineure », ce qui fait dire à Manon, la mère exemplaire : « Qu'il s'avise de toucher une seule fois à ma progéniture... Ses couilles, il ne les reverra plus autrement que dans le formol ». C'est un point de vue, celui des femmes pour qui tous les hommes, ceux qui s'intéressent à elles et ceux qui les ignorent, sont des cochons. Mais, comme le dit une vieille chanson populaire, les femmes les valent bien. C'est Emma qui le dit, en apprenant que sa mère revient au village : « Ma mère est une putain ». Les retrouvailles ne se font pas sous le signe de la tendresse et le tout se [End Page 465] termine plutôt mal. Je ne dirai pas pourquoi. Et le titre ? Pour les noninitiés, la narratrice précise: «Une tequila bang bang! Tequila et Seven-up».

David

Les soleils incendiés de Marie-Andrée Donovan est un roman d'une extrême violence, écrit tout en douceur. L'action commence par la suicide du père, chez lui, pendant la récitation du chapelet en famille. Après cela, c'est le silence. Les mots n'arrivant pas à sortir, Caroline cherche en dehors de la maison, des gens pour l'écouter. Elle trouve enfin Emmett. Ils se parlent, ils se comprennent, ils auraient pu devenir amants, mais ils demeurent amis : « Je sais que c'est au pied des tournesols que tout s'est joué. Après l'incendie, je n'ai plus jamais revu Emmett [...]. Les tournesols calcinés ont pénétré la terre et l'ont nourrie de mon histoire ». Quarante ans plus tard, Caroline découvre un tableau d'Emmett, derrière lequel se trouvent une lettre de lui et le carnet que la jeune fille lui avait remis. Ce tableau porte le titre du roman de Marie-Andrée Donovan, indiquant, ainsi, que l'amour des deux héros était réciproque. Ce roman se termine comme il commence, soit par un suicide qui donne à cette histoire un air de légende amérindienne.

Un bout de phrase résume bien l'attitude de la narratrice de Le deux, de Danièle Vallée, envers l'Autre : « J'ai l'endurance à zéro ». Or, elle est toujours en présence des « transportés » qui partagent avec elle l'espace restreint d'un autobus de la ligne 2, d'où le titre. Chaque entrée dans son journal est...

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