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  • Mémoires de deux jeunes mariées d’Honoré de Balzac: Un roman de l’identité
  • Keri A. Berg
Pich, Edgard. Mémoires de deux jeunes mariées d’Honoré de Balzac: Un roman de l’identité. Lyon: J2C/ALDRUI Editions, 2004. Pp. 61. ISBN2-906196-11-8

Mémoires de deux jeunes mariées (1842) ne serait pas, malgré les apparences, un roman épistolaire: voilà l'idée paradoxale que soutient Edgard Pich. Bien que le texte se compose de la correspondance entre deux jeunes femmes, récemment sorties du couvent, Louise de Chaulieu et Renée de Maucombe, ces lettres ne rempliraient pas de "fonction pragmatique" (7). Dans les grands classiques de la littérature épistolaire, en effet, Rousseau ou Laclos, les lettres suscitent une série d'actions et de réactions, tandis que "dans le 'roman' de Balzac, les deux 'jeunes mariées' ont une influence minimale l'une sur l'autre. . . . Chacune des deux semble s'être accommodée de très bon cœur de ce que sa destinataire ait une conception de la vie différente de la sienne" (7). Pich appuie cette hypothèse sur une étude quantitative des lettres (date, longueur, destinateur, destinataire). Il démontre ainsi que Louise domine la correspondance, laissant à Renée le rôle de "simple confidente" (17). Serait-ce davantage des "mém-oires," comme le suggère Balzac dans son titre? Encore une fausse piste, d'après Pich. Le terme "mémoires" désigne généralement un texte écrit a posteriori. En revanche, une correspondance suppose une narration composée au fur et à mesure des événements. Alors, si le texte n'est ni un roman de lettres ni des mémoires, s'agit-il d'un roman tout court? Pas exactement, affirme l'auteur, car les deux femmes suivent des parcours plus ou moins programmés, sans obstacle ni suspense: la sortie du couvent, le retour à la maison familiale, le mariage, l'ascension sociale, la maternité, la mort. Pich conclut que "tous les désirs de Renée, tous ceux de Louise rencontrent . . . dans le monde où elles vivent, l'adhésion pleine et entière de leur entourage. Pas de méchant, pas d'adversaire. . . . La réalité romanesque, opaque, incertaine, ambiguë, trompeuse, s'est volatilisée" (9). On peut contester ces définitions des genres lit-téraires, néanmoins cette lecture des Mémoires de deux jeunes mariées nous force à relire le texte autrement: "non pas un dialogue ou comme une dialectique qui engagerait la notion de progrès, mais deux monologues dans lesquels chacune va jusqu'au bout de sa propre logique" (21). Louise cherche à régner sur Paris, n'acceptant que la passion absolue, pendant que Renée fait un mariage de raison, choisissant la vie de famille en province.

Les différences entre ces deux modes de vie prennent, à première vue, la forme d'un débat sur le mariage et l'amour. Au-delà, Pich propose de lire ces deux narrations comme un combat intérieur de l'individu, qui oscille entre "le social" et "le métaphysique" (25). Par extension, "Renée et Louise ne sont qu'une seule et même personne," "deux sœurs siamoises [qui] vivent une situation fusionnelle et s'op-posent en même temps, exprimant ainsi la schizophrénie constitutive du génie balzacien" (27, 25-26). Un regret: cette "schizophrénie," son rôle dans les œuvres de Balzac, mériterait d'être précisée, solidement étayée, or, elle ne l'est pas, évoquée seulement comme une évidence. Pour ces Mémoires de deux jeunes mariées, cependant, [End Page 420] Pich soutient sa thèse avec une lecture précise du texte, et notamment une excellente étude de la lettre 25. Les vies des deux femmes se croisent, analyse-t-il, voire se confondent, tant au couvent que dans le mariage. Même la maternité de Renée et la passion de Louise, qui pourraient les éloigner, semblent encore les rapprocher davantage, jusqu'à la fusion. Renée l'explique d'ailleurs clairement à Louise: "ma pensée est assez...

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