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  • Le théâtre franco-ontarien - Une identité en évolution
  • Denis Bertrand

Le théâtre continue de jouer un rôle important dans l'édification d'une identité franco-ontarienne, même si la nature de son apport a été appelée à évoluer au fil des ans. Ceux et celles toujours à la recherche d'un théâtre francophone engagé seront heureux d'apprendre que les compagnies n'hésitent pas à revisiter occasionnellement ce terroir fertile d'où ont été puisées plusieurs productions pendant les années 1970 et 1980. Pour les autres, intéressés à l'expérience artistique que propose le théâtre, peu importe la parole véhiculée, les huit compagnies1 d'ici peuvent aussi répondre à leurs attentes.

Même si ces deux pôles peuvent sembler difficilement conciliables dans le contexte du développement et du maintien de l'identité franco-ontarienne, ils sont effectivement liés et exercent une influence sur les nouvelles générations de créateurs qui font leur place dans le milieu.

Mais il y a une ombre qui accompagne cet arc-en-ciel. Ce sont les difficultés que rencontrent ces jours-ci le théâtre professionnel et les productions destinées au grand public lorsqu'il est question de rejoindre et de toucher les francophones qui vivent à l'extérieur des centres urbains que sont Sudbury, Toronto et Ottawa. Le défi identitaire, pour ainsi dire, se trouve de ce côté.

Avant de poursuivre plus loin cette analyse, examinons le parcours suivi par le théâtre professionnel dans la dernière partie du XXesiècle pour en arriver rapidement aux caractéristiques du théâtre d'aujourd'hui.

Les débuts du théâtre professionnel franco-ontarien tel qu'on le connaît de nos jours remontent aux années 1960, avec l'avènement en 1965 de l'Atelier à Ottawa, sous la direction de Gilles Provost, et la naissance du Théâtre du P'tit Bonheur2 à Toronto, en 1967.

Ces deux instances, issues du théâtre communautaire, se sont professionnalisées rapidement et présentaient, règle générale, des textes québécois, étrangers et de répertoire. Gilles Provost a ensuite fondé pendant les années 1970 la Compagnie Gilles-Provost qui, malgré ses assises à Ottawa, chevauchait allègrement la frontière Ontario-Québec avec la présentation de bon nombre de ses spectacles à Hull (Québec). Même si au départ ces compagnies faisaient peu de place à la création, elles ont permis aux publics de la Ville reine et de la capitale nationale3 de découvrir le théâtre d'expression française et ont servi de «lieux» de rassemblement pour leurs communautés artistiques respectives.

La parole franco-ontarienne a pris l'avant-scène avec la création du Théâtre du Nouvel-Ontario (TNO) à Sudbury, en 1971. Sous la direction d'André Paiement, le TNO s'était donné pour mandat d'illustrer la réalité que vivaient les francophones dans leurs familles, dans leurs paroisses et dans le milieu franco-ontarien. C'est ainsi que naissent des œuvres telles que Moé, j'viens du Nord, s'tie et Lavalléville. Ces dernières et [End Page 157] d'autres pièces produites à cette époque se voulaient le reflet du vécu de «monsieur et madame Tout-le-Monde». L'expression est du TNO, non de moi.

À Ottawa, ou plus précisément à Vanier, c'est au Théâtre d'la Corvée4 que revient l'honneur d'œuvrer au développement de la culture franco-ontarienne, dès son avènement en 1975. Le spectacle La parole et la loi demeure l'œuvre la plus connue de cette compagnie. La lutte au Règlement xvii, ses séquelles et les combats de l'époque y tenaient une place de choix. De l'aveu même des dirigeants de la compagnie, le théâtre d'alors se voulait «une forme d'action, car faire du théâtre en Ontario, c'est un choix politique».

L'influence du travail de ces deux compagnies, jointe aux initiatives de développement lancées en...

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