In lieu of an abstract, here is a brief excerpt of the content:

Canadian Review of American Studies 34.1 (2004) 55-82



[Access article in PDF]

Banditisme social, mémoire collective et histoire:

le rôle de Jesse James dans la création de sa propre légende


En 1939, le film Jesse James, dans lequel Tyrone Power incarne le célèbre hors-la-loi, connaissait un succès foudroyant au box-office1 . Dans ce film, Henry King, réalisateur, représente Jesse James comme un jeune homme s'étant tourné vers le crime pour venger le meurtre de sa mère commis par des agents de compagnies ferroviaires. Aidé par son frère Frank (Henry Fonda), Jesse se venge et s'attaque à la corruption engendrée par le progrès dont le train est la représentation la plus néfaste. Cependant, le banditisme de Jesse devient avec le temps une activité pratiquée pour le profit plutôt que pour le bien de la communauté. Notamment, King démontre cette transition par un changement d'attitude de Jesse quand au commandement de sa bande (la bande James-Younger), passant de leader à «dictateur». Lorsque qu'il affirme à son frère qu'il peut gravir les marches du Capitole s'il le désire, ce dernier le replace juste à temps dans le droit chemin. Malgré le retour au banditisme social, la bande est défaite à Northfield. Jesse est subséquemment tué par Robert Ford alors qu'il vient de promettre à son épouse qu'il va se ranger.

Dans son excellent ouvrage intitulé Gunfighter Nation, l'historien Richard Slotkin analyse ce film en l'insérant dans la tradition narrative de la frontière, liant l'œuvre de King à d'autres, tant dans les thèmes abordés que dans la forme. Pour lui, il est clair que la figure du bandit social incarnée par [End Page 55] le Jesse James de King est liée à la conjoncture socio-économique des années 30, ainsi qu'aux représentations précédentes de ce type de héros. Cette conclusion ne donne pas une vision complète de la réalité. En effet, le Jesse James incarné par

Tyrone Power n'est pas uniquement le produit de l'industrie du divertissement, mais plutôt, Slotkin le mentionne sans toutefois explorer la question, un hybride entre la réalité historique de l'époque, la production culturelle et l'image publique que Jesse James lui-même s'était créée (Slotkin 138-139). Certes, le rôle du hors-la-loi est plutôt limité quant à la diffusion de cette figure, mais il demeure toutefois essentiel de souligner le rôle de Jesse James, de ses associés et de sa famille, dans la construction d'une image publique qui a ensuite été maintes fois répétée par les médias de masse.

Contrairement à plusieurs de ses homologues, Jesse James a laissé de nombreuses traces écrites destinées à influencer la perception de ses contemporains. La thèse du présent article affirme que ces documents sont la pierre d'assise sur laquelle repose le succès de Jesse James dans les médias de masse américains tant à l'époque qu'aujourd'hui. L'union de tous les documents laissés par les membres de la bande James-Younger, leurs associés et leur famille, produit une image cohérente de la personne de Jesse James reflétant parfaitement l'idéal masculin tel que conceptualisé à la fin du 19e siècle. Cette complémentarité a facilité l'incorporation de la figure de Jesse James telle que ce dernier la définissait dans la culture de masse américaine. Après un bref survol historiographique, il importe de définir quelles sont les composantes de cette image, pour ensuite voir en quoi elles correspondent aux idéaux masculins de l'époque.

Jusqu'à tout ré...

pdf

Share